La comparaison avec l’Obamacare était inévitable. En dévoilant, jeudi 1er février, un projet d’assurance-maladie pour les familles les plus défavorisées, le ministre indien des finances, Arun Jaitley, a parlé d’un « Modicare », en référence au chef du gouvernement, Narendra Modi. Inscrit dans le projet de loi de finances pour l’année fiscale 2018-2019 qui démarrera en avril, le dispositif a été calibré pour bénéficier à 100 millions de foyers, soit un demi-milliard d’individus environ, ce qui en fera « le plus important au monde », a souligné le ministre.
Il sera financé sur fonds publics et permettra notamment une prise en charge des traitements médicaux jusqu’à 500 000 roupies (6 265 euros) par an et par personne, en cas de maladie grave. Une révolution quand on sait que l’argent public consacré à la santé en Inde représentait 214 euros par personne en 2014 (contre 7 551 euros aux Etats-Unis), d’après les calculs de la Banque mondiale.
Globalement, ce Modicare représente un besoin de financement annuel de 110 milliards de roupies (1,4 milliard d’euros), mais les commentateurs se demandent où le gouvernement va bien pouvoir trouver cet argent. Aucun crédit n’a été orienté sur ce projet dans le budget de l’année à venir et l’Etat fédéral fait d’ores et déjà savoir que sa contribution ne pourra pas dépasser 70 milliards de roupies par an, ce qui laisse à la charge des 29 Etats fédérés de l’union indienne une ardoise de 40 milliards de roupies.
« Une folie »
« L’intention est admirable », a expliqué dans The Indian Express Pratap Bhanu Mehta, vice-doyen de l’université privée Ashoka. Selon une étude publiée fin 2017 par le ministère de la santé, seules 20 % des femmes et 23 % des hommes de la tranche d’âge 15-49 ans jouissent actuellement de l’un des rares systèmes de couverture maladie existant à l’échelle régionale. Pour autant, prévient-il, le Modicare est « une folie », car « il engage l’Inde irrévocablement vers un système de santé fonctionnant comme une assurance à l’américaine ».
La réforme soulève d’autres interrogations, car le gouvernement Modi vient d’entreprendre la mise en chantier d’une promesse d’une tout autre ampleur : l’instauration d’une sécurité sociale universelle, pour les personnes qui travaillent dans le secteur informel de l’économie et qui, à l’heure actuelle, ne bénéficient ni de l’assurance-maladie, ni de l’assurance-chômage, ni de la retraite.
Il vous reste 45.48% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.