Syrie. Un Breton raconte son combat auprès des Kurdes

Par Propos recueillis par Gwen Rastoll

Depuis le 20 janvier, la Turquie mène, dans la région d’Afrine (nord de la Syrie), une offensive contre les Unités de protection du peuple (YPG), une milice kurde qu’elle considère comme «terroriste». Alliés aux États-Unis dans la lutte contre Daesh, les YPG sont épaulés par des volontaires étrangers. Parmi eux, un Breton de 40 ans, qui se fait appeler Kendal Breizh. Il témoigne.

Syrie. Un Breton raconte son combat auprès des Kurdes

> Depuis quand vous trouvez-vous en Syrie ? 

Je suis arrivé au Rojava (la fédération autoproclamée par les Kurdes, située dans le nord de la Syrie et de l’Irak) début juillet 2017. J’ai commencé à préparer mon départ plusieurs mois en avance. J’avais de nombreux détails à régler, tant matériels que financiers. J’ai contacté les YPG par e-mail, comme tous les volontaires. Lorsque j’ai eu le feu vert des YPG, je suis parti. Le reste du voyage est confidentiel.

> Où les combats se situent-ils actuellement ? 

Je me trouve dans le canton d’Afrine où nous combattons l’invasion turque. Ici, la Turquie est alliée avec différents groupes jihadistes, comme Al-Qaïda. Nous les combattons comme nous avons combattu Daesh. Il existe encore deux poches principales de Daesh : l’une dans la province de Deir ez-Zor, l’autre un peu plus au nord, le long de la frontière irakienne. Il doit rester actuellement entre 800 et 2.000 combattants de Daesh, dont quelques dizaines d’Européens. Quelques-uns d’entre eux ont aussi probablement rejoint les supplétifs de l’armée turque autour d’Afrine. 

> Qu’est-ce qui a motivé votre engagement auprès des forces kurdes ? 

Sur place, il y a eu, et il y a, des Bretons dans les rangs des YPG. Essentiellement des anarchistes, des communistes, des antifascistes… Pour ma part, je m’intéresse à la question kurde depuis des années et je soutiens leur lutte. La bataille de Kobane et le courage extraordinaire des YPG contre Daesh, alors que la Turquie voisine aidait, armait et finançait l’État islamique, ont achevé de me convaincre que ma place était ici. J’étais aussi très intéressé par l’aspect révolutionnaire et le projet de société développé par les Kurdes, autour des idées d’Abdullah Ocalan (l’un des fondateurs et le dirigeant du PKK, Parti des travailleurs du Kurdistan). 

> Comment avez-vous été accueilli par vos compagnons kurdes ?

 Ils sont très heureux de voir des étrangers soutenir leur révolution et se battre à leur côté. D’autant plus d’ailleurs, lorsqu’il s’agit de combattants politisés qui ne viennent pas que pour faire la guerre mais qui soutiennent aussi le projet révolutionnaire du confédéralisme démocratique. L’accueil dans les zones libérées est très bon, de manière générale. Les populations sortent de trois ans de privations de liberté et d’oppression. Il y a parfois des réticences dans les zones villageoises où Daesh avait été perçu comme une alternative au régime de Bachar al-Assad et où il existe une méfiance ancienne entre les différentes composantes de la société : kurdes, arabes, syriaques, yezidis… À Afrine, l’accueil est encore meilleur. Nous sommes ici pour protéger la ville de l’invasion turque, alors les gens nous voient un peu comme des héros. 

> Comment votre formation s’est-elle déroulée ? 

J’ai reçu une formation basique à l’Académie YPG, Sehîd Kemal. Puis j’ai continué à m’entraîner au sein de mon Tabûr (bataillon, corps militaire). Les internationaux qui rejoignent les YPG combattent. J’ai participé à la bataille de Raqqa et à une partie de la campagne de Deir ez-Zor, avant de venir à Afrine. Il y a aussi des volontaires qui viennent pour des projets civils, mais ceux-là ne sont pas sous uniforme YPG. 

> Êtes-vous entré en contact avec des forces de l’armée française ? 

Non. Nous n’avons d’ailleurs aucune relation avec eux. Nous, volontaires, sommes sous le commandement des YPG. Tout au plus, nous nous croisons parfois.

> Pensez-vous que l’issue du conflit est proche ? 

Daesh a perdu son État et son armée, mais il lui reste des combattants, y compris mélangés aux civils. L’EI se transforme en guérilla, il y a donc toujours des risques d’attentats ou d’attaques. Au Nord, c’est encore pire. Le pire ennemi de la liberté du Rojava, c’est la Turquie d’Erdogan qui, après avoir soutenu Daesh, nous attaque désormais directement avec l’aide des jihadistes des FSA (Free Syrian Army). Tant que les islamistes de l’AKP gouverneront la Turquie, et tant que l’État turc continuera ses attaques incessantes contre les Kurdes, y compris sur son propre territoire, il n’y aura aucune paix possible. 

> Quand envisagez-vous le retour en Bretagne ? 

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Encore quelques mois… Je pense rentrer au milieu de l’été, mais cela dépendra des événements.

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