2018, année du vélopartage ? Gobee.bike, Ofo, Mobike, Obike... Les nouveaux entrants se pressent : rien qu'à Paris, on dénombre désormais 4 opérateurs de vélos en free floating (libre service sans borne d'attache). Un principe en théorie très simple et moins contraignant que les systèmes classiques, puisque les villes n'ont plus besoin d'engager des frais pour construire des stations d'accueils. Et pour l'usager, l'assurance de ne plus tomber sur une station déjà pleine. Mais le système n'est pas si parfait. S'il est facile de restituer un vélo, il peut en revanche être plus compliqué d'en trouver un, d'autant plus que certains utilisateurs les cachent dans des zones "privatisées" (cours, halls, balcons...). D'autant plus que ces cycles, fonctionnels ou non, occupent l'espace public. Frédéric Héran, spécialiste de l'histoire du cyclisme urbain en France, apporte sur cette question son regard d'économiste et d'urbaniste.
Le "free floating" occasionne des coûts cachés pour la collectivité
"Ces vélos occasionnent 3 coûts cachés pour la collectivité", estime Frédéric Héran. C'est ce qu'on appelle des externalités négatives en économie. "Le premier, c'est le coût de l'espace public. Il faut le construire, mais ensuite le nettoyer, le surveiller... en hypercentre, cela coûte aussi cher que le foncier ! Puis il y a aussi le coût de la délinquance. La police se retrouve obligée d'agir." Enfin, il y a le coût de l'organisation de l'espace. "Quelqu'un doit bien finir par débarrasser les vélos abandonnés n'importe où, surtout lorsqu'ils sont cassés." Autrement dit, les vélos en "free floating" proposent des tarifs avantageux... parce qu'ils reportent ces coûts sur la collectivité au lieu de les assumer eux-mêmes comme un opérateur classique. "Ces frais restent indirectement pris en charge par le contribuable", rappelle-t-il, rappelant aussi la jeunesse de ce modèle économique, créé en 2014 par deux étudiants japonais.
COMPROMIS. La solution pour abaisser ces 3 coûts ? Tout simplement... créer des stations, avance l'économiste. Les cycles d'IndigoWheels, déjà présents au Royaume-Uni et en cours de déploiement en Allemagne, cherchent toutefois une forme de compromis. Cela passe par un système de geofencing, qui définit via l'application les zones de stationnement autorisée ou interdites. Si l'utilisateur dépose son vélo n'importe où, il subira un malus. "Mais au bout d'un moment, s'il y a trop de vélos déposés au même endroit, le même problème se répétera, et on en reviendra à la conclusion qu'il faut bien des stations d'accueils", conclut Frédéric Héran.