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Macron veut "réduire l'influence des pays arabes" sur l'islam français et réformer le CFCM
Le Président ne pourra éviter l'épineuse question du CFCM

Macron veut "réduire l'influence des pays arabes" sur l'islam français et réformer le CFCM

Culte musulman

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Dans le JDD du dimanche 11 février, Emmanuel Macron annonce qu'il prépare une réorganisation du culte musulman à l'horizon du premier semestre 2018. Il vise notamment la question de la formation des imams.

Tel Godot, on l'attendait, et il n'arrivait pas. Mais voilà que le projet de "structuration de l'islam de France" paraît bel et bien à l'agenda, à en croire le verbatim que publie ce dimanche 11 février Emmanuel Macron dans les pages des JDD. "Je souhaite poser les jalons de l'organisation de tout l'islam de France" écrit le Président. Pour étoffer ce sujet sur lequel nombre de ses prédécesseurs ont buté, il s'est entouré d'intellectuels - le politologue Gilles Kepel, l'essayiste Hakim El Karoui, l'islamologue Youssif Seddik - et de religieux. Selon l'hebdomadaire, il sera ainsi question de "création de nouvelles instances représentatives, un cadre pour le financement des lieux de culte et la collecte de dons", plus l'épineuse question de la formation des imams. Sans qu'on n'ait plus de détails.

L'islam français doit "entrer dans la modernité"

"Nous devons nous inspirer fortement de notre histoire, de l'histoire des catholiques et de celle des protestants", affirme le chef de l'Etat dans le JDD, en entendant reprendre la main sur les leviers de l'organisation du culte musulman. Car l'enjeu sera de "réduire l'influence de pays arabes, qui empêche l'islam français d'entrer dans la modernité", selon un conseiller de Macron cité par l'hebdomadaire. Il est avéré que des pays du Golfe et du Maghreb financent la construction mosquées sur le sol hexagonal, ce qui transgresse la loi de 1905, et qu'au moins 300 imams en France sont payés par des Etats étrangers.

Quid d'un nouveau "concordat" ?

Interrogé sur la possibilité de créer un nouveau "concordat" avec l'islam de France, Macron répond : "Quelle que soit l'option retenue, mon objectif est en tout cas de retrouver ce qui est au coeur de la laïcité, la possibilité de pouvoir croire comme de ne pas croire, afin de préserver la cohésion nationale et la possibilité d'avoir des consciences libres. Je pense que le risque est de brandir des objets connotés, qui ont leur propre histoire, ou de faire des raccourcis en plongeant tout le monde dans un même sac."

La nécessaire refonte du CFCM

Dans cette refonte du sol au plafond, il sera dur d'esquiver la question du Conseil français du culte musulman (CFCM), encombrant organe créé en 2003 sous la houlette de Sarkozy, censé être représentatif des musulmans en France. Devenu gardien de l'orthodoxie, il n'est jamais parvenu à représenter leur pluralité. Le philosophe Abdennour Bidar y voit ainsi dans nos colonnes un "pur anachronisme". Pour les "experts" cités par le JDD, il est un "facteur d'immobilisme". Même dans l'instance, on n'est pas aveugle : "Il y a au sein du CFCM une prise de conscience qu'une ouverture est nécessaire", reconnaît dans l'hebdomadaire son vice-président, Anouar Kbibech. Sa refonte est confiée au ministre de l'Intérieur Gérard Collomb. Puisque les prochaines élections du bureau du CFCM sont en juin 2019, la Macronie devra agir tôt. "Au premier semestre 2018", assure le Président.

En dépit de quelques annonce égrenées ci et là, Emmanuel Macron était resté depuis le début de sa mandature peu disert sur la question. Il saupoudre : le 4 janvier, il annonçait "un travail sur la structuration de l'islam en France" ; le 21 décembre, refusait"la radicalisation de la laïcité" à ses yeux instrumentalisée à des fins identitaires... Sans dévoiler de vision ni de plan précis. C'est qu'il ne souhaite pas bâcler la question. "Je ne dévoilerai de proposition que quand le travail sera abouti"

, tranche Emmanuel Macron.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne