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Au Cambodge, Saint-Valentin rime avec harcèlement

Le jour des amoureux, de nombreux Cambodgiens usent de tous les moyens pour faire perdre leur virginité à leur partenaire.

M le magazine du Monde

Publié le 09 février 2018 à 14h40, modifié le 13 février 2018 à 10h10

Temps de Lecture 3 min.

Pour endiguer les débordements, la police a organisé des patrouilles aux abords des « guesthouses ».

Chaque année, au Cambodge, à l’approche de la Saint-Valentin, des vendeurs ambulants proposent ours en peluche, bouquets de fleurs et ballons en forme de cœur. Ce jour-là, une partie de la jeunesse sèche les cours pour se retrouver à Koh Pich, l’île artificielle où l’on peut pratiquer tours à moto et rapprochement des corps, jusqu’à ce qu’arrive la fatidique question : « On va à l’hôtel ? »

Car cette fête, devenue très populaire, s’est associée dans l’esprit des jeunes à l’idée de perte de virginité. « La Saint-Valentin, c’est l’occasion de prouver son amour, sa confiance en l’autre. Faire l’amour est considéré comme un gage », rapporte Kosoma, diplômée en communication. Dans ce pays bouddhiste, les valeurs traditionnelles sont toujours bien ancrées, mais elles cohabitent désormais avec l’aspiration à plus de liberté. Les « amoureux » n’attendent pas tous leur nuit de noces pour goûter au fruit qui leur est défendu.

Cette « preuve » d’amour peut alors devenir l’objet d’un sordide marchandage. Lors d’une enquête menée en 2014 auprès de garçons âgés de 15 à 24 ans, près de la moitié ont révélé leur intention de coucher avec leur partenaire à l’occasion de la Saint-Valentin, peu importe le consentement de cette dernière. « Cela ne signifie pas que les garçons ont tous l’intention de violer leur partenaire, mais qu’ils tentent par tous les moyens d’arriver à leurs fins ; en promettant à la jeune fille un bijou, en la conduisant à l’écart de la ville ou en la faisant boire », détaille Tong Soprach, l’analyste à l’origine de cette étude.

« S’acheter des fleurs, c’est bien, mais si c’est une manœuvre pour aller au-delà de l’amitié et que ce geste conduit à perdre sa virginité, cela viole notre culture. » Hang Chuon Naron, ministre l’éducation

Pour endiguer le phénomène, la police a organisé des patrouilles aux abords des guesthouses offrant un refuge aux amants moyennant cinq dollars les trois heures. Le ministère de l’éducation, lui, a organisé des examens le jour J pour dissuader les absentéistes et envoie chaque année des messages d’alerte. « S’acheter des fleurs les uns les autres, c’est bien, mais si c’est une manœuvre pour aller au-delà de l’amitié et que ce geste conduit à perdre sa virginité, cela viole notre culture », a même alerté, l’an passé, le ministre Hang Chuon Naron. L’éducation sexuelle a fait sa timide apparition dans les manuels scolaires en 2013 et doit désormais être généralisée à l’ensemble du pays.

« Le Cambodge a une forte culture du viol : les femmes portent rarement plainte parce qu’elles sont conditionnées à penser que c’est de leur faute. Si elles se font violer, elles n’en parlent pas de peur d’être rejetées et que leur famille perde la face », déplore Catherine V Harry, une militante de 22 ans. Dans ses vlogs, « A dose of Cath », suivis par près de deux mille personnes, elle se frotte à des sujets aussi tabous que les règles, la contraception ou l’égalité des sexes. Une manière de faire évoluer les mentalités, en donnant des clés aux jeunes pour leur permettre de prendre les bonnes décisions.

Par Eléonore Sok-Halkovich

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