Le narcotrafiquant mexicain Joaquin « El Chapo » Guzman, tenu à un régime de quasi-isolement, a affirmé jeudi 15 février que son procès prévu en septembre serait « une farce » si les règles qui l’empêchent actuellement de financer sa défense n’étaient pas assouplies.
Lors d’une audience au tribunal fédéral de Brooklyn, à New York, jeudi matin, son avocat, Eduardo Balarezo, a expliqué que la défense ne pouvait pas le préparer correctement « faute d’argent ».
Me Balarezo avait notamment évoqué quelque 100 témoins potentiels à charge, souvent des prisonniers, espérant des réductions de peine en échange d’informations sur « El Chapo », sur lesquels il ne pouvait pas enquêter faute de fonds. « J’ai reçu un paiement partiel de mes honoraires », mais les amis d’« El Chapo » qui l’ont aidé pour ce premier versement « ne peuvent pas payer le reste », avait fait savoir l’avocat. Et comme « El Chapo » n’a le droit de donner aucune instruction à personne, « c’est un cercle vicieux ».
Lettre versée au dossier
Le narcotrafiquant de 60 ans, qui s’est évadé à deux reprises de prisons mexicaines, avait demandé lors de l’audience à lire une lettre à haute voix, mais le juge Brian Cogan ne l’y a pas autorisé.
Cette lettre a cependant été versée au dossier jeudi soir. « Monsieur le juge, je demande une modification des règles et qu’on m’autorise à voir mon épouse en face-à-face pour régler ce problème », écrit « El Chapo ». La jeune épouse d’« El Chapo », l’ex-reine de beauté Emma Coronel, assistait à l’audience avec leurs jumelles âgées de 6 ans. L’accusé les a saluées de la main.
Interpellé en janvier 2016 au Mexique et extradé vers les Etats-Unis un an plus tard, « El Chapo » est accusé d’avoir dirigé pendant vingt-cinq ans le cartel de Sinaloa, l’un des plus puissants que le continent américain ait jamais connus.
Argent caché
Les Etats-Unis estiment à quelque 14 milliards de dollars les revenus que Joaquin Guzman aurait ainsi dégagés, et espèrent « récupérer au moins une partie » de ce butin. Un responsable mexicain avouait cependant en mai dernier que les Etats-Unis n’arrivaient pas à retrouver son argent, qui contournait les circuits financiers traditionnels.
En raison de ses précédentes évasions, « El Chapo » est détenu dans des conditions particulièrement strictes à Manhattan, avec des visites et des contacts téléphoniques très limités, des conditions que ses avocats n’ont cessé de dénoncer. Jeudi encore, M. Balarezo a affirmé que son client souffrait « constamment de maux de tête et vomi[ssai]t presque tous les jours ».
Dans sa cellule, « il fait soit très froid, soit très chaud, il ne peut pas dormir, il ne peut pas se concentrer ni aider à sa défense dans ces conditions ». La sélection des jurés doit démarrer le 5 septembre, avant l’ouverture du procès qui pourrait durer « trois ou quatre mois », selon l’avocat.
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