Pourquoi l’être humain ne grandit plus (trop)

Depuis la fin du XIXe siècle, on a gagné en hauteur : plus de 8 cm pour les femmes et près de 9 pour les hommes, dans le monde. Pourtant, selon une étude, l’être humain serait en train d’atteindre sa taille maximale. Explications.

 Xi Shun, originaire Mongolie, l’un des hommes les plus grands du monde avec ses 2,36 m de hauteur, photographié à Paris en 2006.
Xi Shun, originaire Mongolie, l’un des hommes les plus grands du monde avec ses 2,36 m de hauteur, photographié à Paris en 2006. LP/AURELIE AUDUREAU

    « Mange ta soupe si tu veux grandir ! » Les petits Homo sapiens tiennent enfin une vraie bonne raison de ne pas terminer leur assiette. A quoi bon puisque l'être humain est en train d'atteindre sa taille maximale ? C'est que constate une étude de l'Institut de recherche biomédicale et d'épidémiologie du sport (Irmes) menée sur la base de données internationales. « Il en ressort clairement que notre espèce est en train de toucher ses limites physiologiques, en taille comme en âge », précise le biologiste Adrien Marck, l'un de ses auteurs.

    Certes, s'il n'est pas indispensable de faire 1,85 m pour se sentir exister, on espérait tout de même encore gratter quelques centimètres, si ce n'est nous, au moins notre progéniture ! Car on avait fini par s'y habituer : depuis la fin du XIXe siècle, ce sont en moyenne un peu plus de 8 cm que les femmes ont gagnés et les hommes presque 9 cm (chiffres à l'échelle mondiale), grâce à une meilleure alimentation et au progrès de la médecine. Sauf que ce phénomène est en train de s'enrayer.

    « Depuis une trentaine d'années, on voit que la courbe stagne un peu partout et pas uniquement dans les pays développés, précise Adrien Marck. Même les Néerlandais, qui sont les plus grands au monde, plafonnent. Là-bas, les hommes mesurent en moyenne 1,82 m et les femmes 1,68 m. Or, c'était déjà le cas il y a trentaine d'années. »

    En France, chaque sexe continue de grappiller encore un peu de hauteur. A 1,65 m, les femmes ont fini par égaler la taille du poilu de la guerre de 1914, et à 1,79 m le standard masculin continue de marcher toujours sur les traces du Général de Gaulle. Mais jusqu'à quand ? « Pour l'instant, on est encore protégé, notre population tire toujours les bénéfices du bond nutritionnel et des progrès médicaux et vaccinaux accomplis au XXe siècle, mais d'ici 20 à 30 ans cela va s'essouffler », pronostique Adrien Marck.

    Un indicateur de bien-être et de santé

    Mais l'homo sapiens pouvait-il grandir à l'infini ? « Certainement pas, il y a dans notre espèce une taille maximale inscrite dans notre capital génétique. Cette taille limite, on ne la connaît pas précisément. Elle varie d'ailleurs d'un individu à l'autre. Mais, en croisant les données, on pense qu'on est en train de s'en approcher », résume Adrien Marck.

    Côté sportif, c'est sans doute une bonne nouvelle. Fini les records pulvérisés haut la main sans suspens! Mais sur le fond il n'est jamais très bon signe qu'une espèce cesse de progresser. « La taille moyenne de la population demeure un indicateur de bien-être et de santé. Il va falloir se montrer plus vigilant que jamais sur nos apports nutritionnels, et arrêter de dégrader notre environnement, sinon l'Homo sapiens pourrait se retrouver sur une mauvaise pente », alerte le scientifique.