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L'emploi repart, les arrêts maladie s'envolent

Les dépenses d'indemnités journalières de l'Assurance-maladie ont bondi de 8 % en janvier et de plus de 5 % sur les douze derniers mois.

Par Solveig Godeluck

Publié le 20 févr. 2018 à 18:15

C'est un chiffre inquiétant. En janvier, les dépenses d'indemnités journalières versées par le régime général d'assurance-maladie pour les risques maladie et professionnels ont grimpé de 8 % par rapport au même mois de 2017. Certes, le mois de janvier 2017 était un peu en retrait. Mais la tendance de long terme est, elle aussi, orientée fortement à la hausse. Sur les douze derniers mois, les arrêts de travail ont coûté 10,3 milliards d'euros au régime général, un montant en croissance de 5,2 % en données corrigées des jours ouvrables. Alors que les remboursements de soins doivent, selon l'objectif légal, être contenus à 3,2 % de progression annuelle. La hausse provient pour deux tiers d'un plus grand nombre de jours d'arrêt et pour un tiers d'indemnités plus élevées.

Un outil statistique inadapté

Pourquoi les arrêts de travail caracolent-ils dans les statistiques ? La précédente majorité était déjà très ennuyée par ce problème. Les indemnités journalières augmentent plus vite que la dépense de santé depuis 2014. Les spécialistes avancent un faisceau d'explications, dont aucune n'émerge. Est-ce la faute de la crise économique, qui pousse les salariés à tirer sur la corde jusqu'à ce qu'elle rompe, plutôt que d'avouer une faiblesse passagère ? Ou au contraire de la récente reprise de l'emploi, qui accroît la population pouvant bénéficier d'un arrêt de travail ? Le décalage de l'âge de la retraite à 62 ans pourrait aussi avoir changé la donne, en multipliant le nombre de seniors actifs. Certains employeurs sont même soupçonnés de ressusciter la pratique des retraites anticipées via des arrêts de longue durée.

Un rapport des Inspections des finances et des affaires sociales a conclu l'été dernier que l'outil de prévision de la Caisse nationale d'assurance-maladie (Cnam) était inadapté aux temps modernes et qu'il allait falloir y intégrer de nouveaux indicateurs, tels que les motifs des arrêts, l'évolution de la politique de contrôle ou l'impact des réformes des retraites. En attendant, la Cnam a lancé il y a trois ans un plan pour sensibiliser les médecins : avant de passer aux méthodes coercitives (mise sous autorisation préalable avant de prescrire), elle propose des « entretiens confraternels » aux gros prescripteurs pour faire évoluer leur pratique. Elle leur rappelle les durées recommandées pour une angine, un lumbago, etc.

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Délit statistique et burn-out

Ce « harcèlement » des caisses a le don d'exaspérer Jean-Paul Hamon, le président de la Fédération des médecins de France. « C'est du délit statistique, dénonce-t-il. Et si vos patients sont plus âgés que la moyenne ? » Quant aux référentiels de durée d'arrêt, il en rit : « Si on les appliquait, les dépenses exploseraient ! Pour avoir la paix avec leur caisse primaire d'assurrance-maladie beaucoup de médecins prescrivent trois jours quand il en faudrait cinq. »

Selon lui, il n'y a pas de doute, le principal suspect dans l'affaire de la hausse des indemnités journalières, ce ne sont ni les médecins complaisants ni des patients abusifs, mais des conditions de travail dégradées : « Je les vois, les cadres qui sont pendus à leur téléphone, leur mail, qui ne déconnectent ni le week-end ni en vacances, et qui un jour, épuisés, fondent en larmes devant la porte de leur entreprise, en burn-out. Sans compter ceux qui passent trois heures par jour dans les transports », raconte ce professionnel, qui exerce en Seine-Saint-Denis.

L'envol des arrêts maladie donne en tout cas du grain à moudre aux députés qui demandent que les pathologies psychiques liées à l'épuisement professionnel soient reconnues comme maladies professionnelles. Elles sont en pleine expansion. Leur coût serait alors financé par les seuls employeurs et les plus négligents devraient payer plus cher.

Solveig Godeluck

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