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Le Mouvement 5 étoiles en tête des sondages

Le M5S est le favori des élections législatives italiennes du 4 mars. Mais une nouvelle loi qui avantage les partis classiques pourrait l’empêcher de gouverner

Luigi Di Maio, le nouveau dirigeant du Mouvement 5 étoiles, défend une ligne «réaliste», susceptible de mener à l’exercice du pouvoir. — © Max Rossi/Reuters
Luigi Di Maio, le nouveau dirigeant du Mouvement 5 étoiles, défend une ligne «réaliste», susceptible de mener à l’exercice du pouvoir. — © Max Rossi/Reuters

Le Mouvement 5 étoiles (M5S) s’en est bien sorti. La justice a décidé lundi d’archiver une enquête pour abus de pouvoir visant «sa» maire de Rome, Virginia Raggi. Le comportement de l’élue de la formation populiste créée par l’humoriste Beppe Grillo il y a bientôt dix ans n’est pas différent de celui de ses prédécesseurs de gauche ou de droite, a estimé le tribunal de la capitale. Piètre consolation pour un parti qui entend se démarquer des autres en se prévalant d’une plus grande honnêteté. Mais vif soulagement pour la principale intéressée. A un peu plus d’une semaine des élections législatives du 4 mars, la cour, a-t-elle déclaré, a «effacé plus d’un an d’éclaboussures de boue».

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Pluie de critiques

L’avocate a remporté la mairie de Rome au début de l’été 2016 avec plus de 67% des voix. Elle incarnait alors les espoirs du mouvement d’accéder un jour au sommet de l’Etat et de former un gouvernement. La Ville Eternelle se veut alors sa vitrine. Mais plus d’un an et demi après cette victoire, les critiques pleuvent sur l’élue et son administration. L’opposition et la presse s’en prennent aussi bien à son inefficacité qu’à son inexpérience.

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Et pourtant, selon les sondages, les Romains préfèrent encore Virginia Raggi à leurs anciens maires. Peu importe qu’elle soit au centre d’une autre enquête, concernant la nomination du frère de son ancien bras droit au Capitole. Peu importe que la formation populiste ait dû exclure durant sa campagne des élus candidats à leur succession coupables d’avoir violé le code interne en omettant de verser une partie de leurs revenus à un fonds pour les petites et moyennes entreprises. Peu importe que le parti ait été au centre de scandales, de Palerme, pour une affaire de fausses signatures, à Gênes, où la gagnante d’une primaire interne a été écartée par des dirigeants peu soucieux du vote des inscrits. Peu importe. Le M5S s’apprête à devenir formellement le premier parti d’Italie.

Quand on m’a proposé de me présenter, mes jambes se sont mises à trembler, j’ai été assailli de doutes, me demandant si j’en serais capable ou non

Massimiliano De Toma, candidat M5S à la Chambre des députés

«J’en ai marre de la vieille politique», lâche un commerçant dans un marché couvert de la banlieue romaine. A son côté se tient Massimiliano De Toma, 52 ans, candidat pour le M5S à la Chambre des députés. Lui-même vendeur, à la tête de l’association des commerçants de la quatrième municipalité de Rome, l’homme fait campagne en dehors de sa circonscription ce jeudi matin. «Nous sommes une équipe», argumente-t-il. Les candidats étoilés cherchent des voix pour le mouvement, non pour leur personne. Le vote du commerçant rencontré ne sera donc pas pour lui.

Massimiliano De Toma veut remettre en marche l’économie réelle, développer le tourisme en appuyant la création d’un ministère dédié, lutter contre les abus commerciaux. Il se présente comme citoyen et travailleur, semblable aux électeurs. «Moi aussi j’ouvre et je ferme tous les jours mon magasin», assure-t-il à un maraîcher.

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Le candidat ne balaie pas la critique d’inexpérience et d’incapacité à gouverner faite à son mouvement. «Quand on m’a proposé de me présenter, mes jambes se sont mises à trembler, j’ai été assailli de doutes, me demandant si j’en serais capable ou non», confie-t-il. La réponse sera affirmative, couplée avec «l’envie d’agir». Il n’a pas participé à une primaire, mais a été choisi par le M5S comme représentant de la société civile. Lors des élections législatives de 2013, les candidats étaient choisis sur Internet par les inscrits au mouvement. Un mouvement qui créait alors la surprise en recueillant près d’un quart des voix, juste derrière le Parti démocrate.

Institutionnalisation du parti

En cinq ans, tout en menant une opposition farouche, le parti s’est institutionnalisé pour aspirer à gouverner. Luigi Di Maio, jeune leader et candidat au poste de président du Conseil, représente cette nouvelle ligne. Il a promis de présenter, avant les élections, son futur exécutif. Sa figure tranche radicalement avec celle de Beppe Grillo et ses manifestations révolues du «Vaffa day», «allez vous faire…». En pleine campagne électorale, l’humoriste cofondateur a préféré se séparer de sa créature politique en raison de ce changement… et pour des «raisons personnelles».

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Mais le programme, dont les points cardinaux étaient à l’origine représentés par les cinq étoiles du logo, n’a pas beaucoup changé. Le M5S promet toujours un revenu universel, une politique environnementale pour rendre «l’Italie 100% renouvelable», la «valorisation et la protection du made in Italy», la «protection des épargnants» ou encore la lutte contre «le business de l’immigration». Se voulant ni de gauche ni de droite, son programme en 20 points est imprégné d’idées venant de tous les bords.

Après une législature, le M5S, avec ses courants internes, ressemble toujours davantage à un parti classique. Mais il reste décidé à miser sur une image d’honnêteté et sur la promesse de «renvoyer la caste à la maison». Cette promesse est aussi sa limite cependant. A force de refuser tout accord avec les autres formations alors même que la nouvelle loi électorale favorise les coalitions, il complique considérablement son arrivée au sommet de l’Etat.