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La rupture sociale d'Emmanuel Macron

Sur la réforme de la SNCF comme sur celle de la formation professionnelle, le Président a décidé de passer par-dessus la tête des partenaires sociaux. Un tournant.

Par Daniel Fortin

Publié le 25 févr. 2018 à 13:02

La semaine qui s'ouvre sera déterminante pour le gouvernement. Ce lundi, le Premier ministre, Edouard Philippe, doit détailler les modalités de la future réforme ferroviaire, et notamment l'étendue de la procédure des ordonnances qu'il semble vouloir utiliser pour en venir à bout. Mardi, ce sera au tour de Muriel Penicaud, ministre du Travail, de détailler son « big bang » de la formation professionnelle, en lieu et place de l'accord conclu la semaine dernière entre patronats et syndicats qu'elle a jugé, avec des mots particulièrement cinglants, insuffisant.

Ces deux affaires traduisent la défiance croissante de l'exécutif - Emmanuel Macron en tête - à l'égard de partenaires sociaux jugés incapables de mener à bien la transformation d'un modèle social qu'ils gèrent depuis la seconde guerre mondiale sans avoir su le moderniser.

S'il ne l'a pas théorisé ainsi durant sa campagne électorale, on sent bien depuis son élection que le Président de la république n'attend plus grand-chose d'une gestion paritaire aujourd'hui en échec et incapable de se remettre en question, quand elle ne nourrit pas en son sein un conservatisme sans ressort. Une apathie qui rend aujourd'hui impossible le nécessaire dépassement des vieilles coutumes et des rituels usés, indispensable pour remettre en route un Etat-providence à bout de souffle.

Cette attitude est, en soi, un tournant historique. Même Nicolas Sarkozy, qui n'avait pourtant de cesse d'affirmer sa faible estime pour les corps intermédiaires, avait fait le pari, en 2007, de réformer la France en concertation avec les grandes centrales syndicales, CGT en tête. Ce fut l'une de ses erreurs. Social-démocrate mal assumé, François Hollande, lui, avait tenté de marquer son début de quinquennat du sceau de la concertation permanente, avec le succès que l'on sait.

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Emmanuel Macron tire aujourd'hui le bilan des échecs de ses deux prédécesseurs. Son projet initial d'étatiser l'Unedic et la froideur polaire de ses relations avec Laurent Berger, le leader de la CFDT - un syndicat sur lequel il aurait pu s'appuyer pour mener ses réformes -, étaient déjà des signes avant-coureurs d'une nouvelle façon de gouverner, à distance des partenaires sociaux.

Avec la SNCF, la formation professionnelle et bientôt l'assurance-chômage, sur laquelle le gouvernement devrait aussi reprendre la main, il entérine cette fois de façon plus franche la rupture, non pas avec les syndicats et le patronat, mais avec leurs apparatchiks. Car s'il se méfie des jeux d'appareils, le Président ne rejette pas pour autant le dialogue social. Sa récente réforme du Code du travail montre qu'il souhaite au contraire le déplacer vers les entreprises afin de le mettre davantage en prise avec le réel.

Cette nouvelle gouvernance imposée par le chef de l'Etat repose sur un pari : celui du soutien d'une opinion lassée d'évoluer dans un pays bloqué. On saura avec les premières grèves de cheminots s'il a été gagné.

Daniel Fortin

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