L'une des plus grandes chaînes de magasins de sport des États-Unis a banni la vente de fusils d'assaut, une nouvelle prise de position marquante d'une grande entreprise dans le débat sur les armes relancé par la tuerie dans une école de Floride.

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Au moment où les élèves de Parkland reprenaient le chemin de l'école mercredi, Edward Stack, le PDG de Dick's Sporting Goods, annonçait en direct à la télévision, sur Twitter et dans un communiqué que son entreprise ne vendrait plus de fusils d'assaut semi-automatiques.

«Nous sommes profondément perturbés et attristés par les événements tragiques qui se sont déroulés à Parkland. Nos pensées et nos prières vont aux victimes et à ceux qui les chérissaient», a-t-il réagi.

Le patron a également révélé que sa société avait vendu en novembre 2017 une arme au jeune homme de 19 ans, Nikolas Cruz, responsable de cette tuerie qui a fait 17 morts il y a deux semaines.

«Ce n'était ni l'arme, ni le type d'arme utilisé par le tireur. Mais cela aurait pu être le cas», a reconnu Edward Stack. «Les pensées et les prières ne sauraient suffire», a-t-il insisté tout en exhortant à agir pour qu'une telle tragédie de ne se reproduise pas.

Outre l'interdiction de ces armes légales dans plus de 40 États américains, Dick's ne vendra plus de chargeurs à grande capacité et refusera la vente d'armes aux personnes de moins de 21 ans bien que certaines législations locales l'autorisent.



«Nous vous avons entendus» 


Le patron de Dick's s'est efforcé de ne pas heurter les partisans des armes, soulignant «soutenir et respecter le second amendement» de la Constitution qui autorise détention et port d'armes. Il «reconnaît également que la vaste majorité des détenteurs d'armes du pays sont des citoyens responsables».

Pour autant, dit-il, la violence par armes est «une épidémie» qui ôte la vie aux enfants.

Aux élèves qui se mobilisent depuis la dernière tuerie pour bannir les armes, M. Stack a dit: «Nous vous avons entendus».

L'entreprise «implore» en outre les élus de réformer la législation sur les armes et de mettre en oeuvre des réglementations, à commencer par l'interdiction des armes de types fusils d'assaut semi-automatiques qui font des carnages.

Dick's n'est pas le premier distributeur à cesser de vendre des fusils d'assaut semi-automatiques. Walmart le fait depuis 2015 mais il avait alors invoqué, non pas des considérations politiques et sociétales, mais une baisse de la demande.

Au-delà du symbole, l'annonce d'Edward Stack illustre la pression exercée actuellement sur les entreprises américaines pour se positionner dans le débat sur les armes.

Difficile neutralité 

Certaines ont d'ores et déjà pris leurs distances, ne souhaitant plus être associées à la National Rifle Association (NRA), le puissant lobby américain des armes, au risque de perdre de nombreux clients.

Les loueurs de voitures Hertz et Enterprise, les assureurs Metlife et Chubb, ou encore la société de sécurité informatique Symantec ont officiellement mis fin vendredi aux avantages consentis aux plus de 5 millions de membres de la NRA.

Dans leur sillage, les compagnies aériennes Delta Air Lines et United Airlines ont aussi supprimé les réductions accordées à ces mêmes membres.

La NRA a estimé que ces décisions étaient «un affichage honteux de la lâcheté civique et politique».

Ces annonces n'ont pas été sans conséquence immédiate sur les entreprises: un sondage Consult/Politico montre un doublement des consommateurs insatisfaits de MetLife.

Delta Air Lines s'est, elle, attirée les foudres du gouverneur adjoint de l'État de Géorgie.

«Je vais tuer toute législation fiscale qui bénéficie à Delta à moins que l'entreprise ne modifie sa position et rétablisse pleinement ses relations avec la NRA», a tweeté Casey Cagle. «Les entreprises ne peuvent pas attaquer les conservateurs sans s'attendre à ce que nous ripostions».

AP

Le PDG de Dick's Sporting Goods, Edward Stack.

De son côté, FedEx, dans un difficile exercice d'équilibriste, s'est efforcé de rester neutre dans le débat. Il a argué qu'il ne modifiait pas son activité en fonction des opinions de ses clients tout en soulignant que sa position sur la politique relative aux armes «différait de celle de la NRA». Il estime aussi que les armes représentent «un danger potentiel pour les écoles, les lieux de travail».

Edward Stack s'attend à des conséquences négatives mais a souligné que si des enfants avaient été assez courageux pour se mobiliser, «nous devons être aussi courageux pour extirper les armes» de la société.