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En Suède, sport obligatoire pour les employés

La marque de vêtements Björn Borg, créée par l’ancienne star du tennis, impose à ses collaborateurs une heure d’exercice hebdomadaire au nom de la convivialité et de la productivité. Le cas n’est pas isolé dans le pays

En Suède, des employeurs rendent le sport obligatoire au travail. — © JONATHAN NACKSTRAND/AFP PHOTO
En Suède, des employeurs rendent le sport obligatoire au travail. — © JONATHAN NACKSTRAND/AFP PHOTO

Chaque vendredi, les employés de la marque de vêtements Björn Borg, créée par l’ancienne gloire du tennis suédois, quittent leur siège stockholmois pour un centre sportif du quartier. Depuis plus de deux ans, ils doivent s’astreindre à une heure d’entraînement hebdomadaire obligatoire. «Si on ne veut pas faire de sport et être intégré à la culture de l’entreprise, on s’en va», affirme sans ciller le directeur général Henrik Bunge.

Passer une heure à la piscine sur sa pause déjeuner, rien d’étonnant dans beaucoup de pays occidentaux. Mais en Suède, des employeurs poussent cette pratique à l’extrême en rendant le sport obligatoire au travail. C’est aussi le cas, par exemple, de l’entreprise publique de distribution de l’eau Kalmar Vatten. Objectifs affichés: productivité, rentabilité, convivialité.

En 2014, une étude de l’Université de Stockholm montrait que transpirer pendant sa journée de travail présente des avantages pour l’employé – plus en forme et concentré – et l’employeur, avec à la clé un recul de 22% de l’absentéisme. Pas négligeable dans un pays où les arrêts maladie sont deux fois supérieurs à la moyenne européenne.

Productivité à la hausse

Le sport rendu obligatoire par l’entreprise ne heurte donc pas les Suédois, qui baignent dans un fond de culture luthérienne valorisant l’ascèse, l’effort et l’exercice physique par tous les temps. Ils s’enorgueillissent d’être le peuple le plus actif du Vieux Continent: selon l’Eurobaromètre, en 2014, 70% d’entre eux faisaient de l’exercice de manière hebdomadaire et 51% deux à trois fois par semaine. Chaque membre de la communauté se doit d’être en forme, un impératif qui remonte aux années 1930 lorsque prospérait le culte de la jeunesse, de la vigueur et de l'«hygiène sociale».

Depuis la fin des années 80, la plupart des entreprises subventionnent les activités sportives – du golf à l’aquagym – de leurs salariés, jusqu’à 500 euros annuels, exonérés d’impôts. Certaines organisent aussi des cours de sport sur les heures de travail. Chez Björn Borg, Henrik Bunge affirme avoir créé un lieu de travail où l’on vit et travaille mieux. Depuis que ce projet a été lancé, tous les chiffres clés du groupe sont en hausse, avance-t-il.

Dans ce contexte, être en forme est devenu «un devoir vis-à-vis de son employeur», souligne Carl Cederström, chercheur en économie à l’Université de Stockholm et auteur du Syndrome du bien-être, qui dénonce les dangers du sport et du bien-être à tout prix. «Quand on se met à penser qu’on est une meilleure mère, un meilleur père ou un meilleur ami si on fait du sport, on peut arriver à une situation où l’on conclut que les personnes qui ne vivent pas très sainement, qui sont en surpoids ou qui fument, sont de moins bonnes personnes», prévient-il.