La dette de Paris atteint 5,5 Mds€ : une situation «saine», défend la Ville

Pour un budget total de 9,5 Mds€, la dette de la Ville de Paris s’élève à 5,5 Mds€. Emmanuel Grégoire, adjoint aux finances, se dit très serein… Explications.

Pour Emmanuel Grégoire, adjoint de la maire de Paris aux finances, la situation de la ville est "saine".
Pour Emmanuel Grégoire, adjoint de la maire de Paris aux finances, la situation de la ville est "saine". LP/Eric Le Mitouard.

    Elu conseiller de Paris le 30 mars 2014, Emmanuel Grégoire est nommé adjoint de la maire (PS) de Paris Anne Hidalgo en charge des ressources humaines un mois plus tard. Depuis le 6 octobre dernier, il a pris les fonctions d'adjoint au budget. Il nous explique aujourd'hui la politique de la dette de la Ville de Paris, qui s'élève à 5,5 Mds€ pour un budget total de 9,5 Mds€.

    Le recours à l'emprunt fait tourner les têtes. Est-ce normal pour une Ville comme Paris ?

    Oui, c'est un choix de stratégie budgétaire qui a été annoncé de façon transparente au début de mandature et pendant la campagne. Nous mettons en œuvre une politique, liée à un programme de mandature très ambitieux, de rattrapage en matière d'équipements de proximité, de services publics aux Parisiens, déjà largement engagé par Bertrand Delanoë : construction et rénovation des écoles, engagements pour la petite enfance, équipements sportifs, équipements culturels… Une autre partie importante, c'est le logement social qui est la priorité de la mandature, ainsi que la transition écologique notamment pour le développement des mobilités. Tout cela représente 10 Mds€.

    Et quelle est la stratégie budgétaire attachée à cette politique d'investissements ?

    Le grand principe est la non-augmentation des impôts, ce qui ne nous empêche pas de rechercher d'autres recettes, la gestion rigoureuse du fonctionnement quotidien de la collectivité (les dépenses à caractère général ont ainsi diminué de près de 10 % depuis 2011 alors que le périmètre d'intervention du service public n'a cessé de s'accroître), et le recours maîtrisé à l'emprunt. Paris bénéficie en effet d'un taux d'endettement extrêmement faible au regard des autres collectivités, sans même parler de l'Etat. On en est cette année à 5,5 Mds€ et on sera à environ 6,5 Mds€ à la fin de la mandature.

    C'est quand même une progression impressionnante depuis le début de la mandature ?

    On s'en fiche de savoir si la dette de Paris est de 5 ou 6 milliards. L'important n'est pas de se focaliser sur le montant brut de la dette. Il faut voir combien cela représente dans le budget global et par habitant, et combien cela représente par rapport aux recettes actuelles et à venir. Et la réalité c'est que Paris a un niveau de dette par habitant de moins de 2 300 €, là où Marseille est à plus de 3 700 € par habitant, Bordeaux à plus de 2 600 € ou Lille à près de 3 800 €*. C'est sain et tout à fait soutenable de recourir à l'endettement, et même responsable compte tenu de la faiblesse des taux d'emprunt.

    Vous vous êtes fixé une limite ?

    La Ville a un budget total de 9,5 Mds€ en cumulant fonctionnement et investissement. Notre stock de dette actuel est de 5,5 Mds€. Nous avons une capacité de désendettement de 8,9 années (durée théorique pour supprimer les dettes si Paris arrête d'en contracter de nouvelles), là où l'Etat a fixé un repère de 12 ans pour les collectivités. Aujourd'hui les agences Standard & Poor's et Fitch nous donnent les meilleures notations possibles AA avec perspective stable, c'est un gage de crédibilité et de sérieux.

    Mais plus on crée de nouveaux équipements, plus on crée des dépenses de fonctionnement. Et Paris a déjà un effectif très important…

    Les effectifs sont passés de 40 000 à 55 000 depuis 2001 selon ce que dénonce l'opposition, mais c'est la simple conséquence de l'aménagement du temps de travail, des transferts de compétence de l'Etat vers les collectivités territoriales et du recrutement d'agents pour faire fonctionner les nouveaux équipements. La masse salariale augmente avec des créations nettes uniquement pour les nouveaux équipements et les trois secteurs qui sont prioritaires : la petite enfance, la propreté et le secteur de la sécurité.

    Et quand vous serez à 10 milliards, qu'en penserez-vous ?

    La dette va sans doute continuer d'augmenter dans les années à venir… C'est sain. Nous rembourserons alors des investissements dont nous aurons encore l'usage, c'est logique. En 2020, cependant, il y aura une réflexion politique à mener sur le rythme des investissements. Mais ce sera un débat politique avant d'être un débat budgétaire.

    Et le recours à la fiscalité n'est pas une autre bonne solution ?

    Paris bénéficie de taux extrêmement faibles de la fiscalité pesant sur les ménages parisiens (taxes foncières et taxe d'habitation). Anne Hidalgo considère que, dans un contexte où le logement est beaucoup plus cher qu'ailleurs, cela permet de rééquilibrer un peu le coût du logement. En outre, c'est un engagement de mandature que l'on respecte. Aujourd'hui, ce serait absurde de ponctionner les Parisiens par l'impôt pour réduire un recours à l'endettement alors que les taux sont si favorables.

    Comment vous voyez l'avenir ?

    Je suis un maire adjoint chargé des finances vigilant et confiant : confiant parce que nous faisons ce que nous avons dit et parce que tout va bien. Vigilant parce qu'il faut l'être pour procéder aux ajustements qui sont à chaque moment nécessaire.

    * Paris, ville et département à la fois, compare sa dette avec les autres villes de France, en leur ajoutant la proportion par habitant de la dette des communautés urbaines et des départements.