A quoi bon voter ? Les Tatars de Crimée ont respecté, dimanche 16 mars, l'appel au boycott du référendum sur le rattachement de la région à la Russie lancé par leur principal organe de représentation, le Majlis. A Bakhtchissaraï, cœur historique de l'ancien pouvoir tatar avant la conquête russe au XVIIIe siècle, les rues du centre étaient quasiment désertes dimanche. Quelques voitures pavoisées aux couleurs de la Russie y klaxonnaient bruyamment. Dans les bureaux de vote, on n'a croisé que des Russes.
La participation était élevée : plus de 50 % à la mi-journée, selon les autorités locales. Mais les « observateurs internationaux » recrutés par les autorités de Crimée sont restés invisibles dans trois bureaux visités avant 17 heures. On a bien vu passer un Japonais, mais il travaillait pour la chaîne de télévision NHK.
« Je ne vote pas. Je ne peux pas accepter leur référendum. Je veux être ukrainienne et avoir mes droits. Ça n'est pas imprimé sur leurs bulletins », déclarait une femme tatare qui rentrait prestement chez elle et refusait de donner son nom, par peur d'éventuelles représailles. Le gouvernement régional mis en place par l'armée russe a multiplié les gestes d'ouverture vis-à-vis de cette communauté musulmane, qui représente 12 % de la population. Sans succès pour l'heure. Dimanche, le patron du Majlis, Refat Choubarov, déclarait sur la chaîne de télévision tatare ATR que ce référendum était « un numéro de clown, un cirque ».
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Dans le village d'Eksmi-Sari (3 000 habitants, majoritairement tatars), proche de Simferopol, le bureau de vote n'a même pas ouvert dimanche. Les villageois avaient décidé ce blocage en assemblée plus tôt dans la semaine. Les Russes du village ont été invités à voter par l'administration, mais pas les Tatars. « On ne s'en plaint pas », note Djalil Ibrahimov, représentant local du Majlis. Le bureau du village voisin de Tekhteoljam est également resté fermé. Les autorités n'ont pas cherché à forcer leur ouverture.
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