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Marine Le Pen a fait le ménage dans les instances dirigeantes du FN.
Marine Le Pen a fait le ménage dans les instances dirigeantes du FN.
Yann Castanier / Hans Lucas

"Marine a réglé ses comptes" : au FN, le "rassemblement"... par la purge

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Marine Le Pen a profité du congrès du Front national pour recomposer les instances du parti à sa main et écarter les gêneurs. Qu’ils soient proches de Jean-Marie Le Pen, Marion Maréchal-Le Pen... ou qu’ils aient tout simplement fait entendre une voix dissonante.

Marine Le Pen ne doute pas d’avoir réussi sa grande opération de ravalement de façade du Front national - pardon, « Rassemblement national » - lors du congrès du parti à Lille le week-end dernier. Mais plusieurs cadres frontistes sont repartis dimanche de la capitale nordiste en grimaçant. Car au-delà du changement de nom de son mouvement, Marine Le Pen a aussi profité du renouvellement des instances dirigeantes pour écarter une bonne poignée de gêneurs... Il suffit de consulter la composition du « bureau national » - nouveau nom du bureau politique - pour s’en convaincre. Sur la quarantaine de membres nommés lors du congrès précédent en 2014, plus de la moitié n’en font plus partie ! « Marine a réglé ses comptes », peste un élu frontiste victime de la purge.

Parmi les têtes tombées figurent évidemment les proches de Florian Philippot, partis avec armes et bagages fonder Les Patriotes. Mais pour Marine Le Pen, l’occasion était trop belle de se débarrasser aussi des cadres jugés trop adeptes du FN de papa, comme l’eurodéputée Marie-Christine Arnautu - qui s’était affichée avec Jean-Marie Le Pen en 2016 - ou Catherine Salagnac, une proche de Bruno Gollnisch (qui, lui, a pu sauver sa tête au bureau national).

On a sorti les proches de Marion. Toute personne susceptible de sympathie avec elle a été ciblée.
Jean-Richard Sulzer

Egalement dans le viseur : ces insolents qui se permettent des observations sur le programme mariniste. L’eurodéputé Bernard Monot et le conseiller régional d’Ile-de-France Jean-Richard Sulzer, spécialistes de l’économie, plaidaient ainsi pour renoncer à inscrire la sortie de l’euro dans le programme du FN. Virés tous les deux !

« Ça ne m’a pas surpris outre mesure mais si on ne peut plus exprimer ses réserves sans être sanctionné, où va-t-on ? », réagit Jean-Richard Sulzer auprès de Marianne. Pour celui qui est aussi collaborateur de Gilbert Collard à l’Assemblée, Marine Le Pen voulait clairement écarter ceux qui affichent une trop grande proximité avec Marion Maréchal-Le Pen : « On a sorti les proches de Marion. Toute personne susceptible de sympathie avec elle a été ciblée. » Parmi les autres têtes de cette charette : les eurodéputés Philippe Loiseau et Joëlle Melin, effectivement plus proches de la ligne libérale et conservatrice de la nièce que du souverainisme étatiste de la tante.

"Marine veut des gens à sa botte"

D’autres ont préféré prendre les devants, lassés que toute voix dissonante soit impitoyablement réprimée. Un autre cadre pro-Marion, Pascal Gannat, avait ainsi arrêté de se rendre au bureau politique depuis juin 2017 - et a logiquement été écarté de la nouvelle équipe. L’été dernier, Marine Le Pen l’avait déjà limogé de sa présidence du groupe FN à la région Pays de la Loire après des critiques contre Florian Philippot et la ligne du parti. « Marine veut des gens à sa botte. Elle ne supporte pas qu’on la contredise », soupire-t-il aujourd’hui.

Si Marine Le Pen a fait le ménage, c’était aussi pour placer certains fidèles. Plusieurs frontistes bien en cour auprès de la présidente du FN ont ainsi intégré le bureau national, tels que Sébastien Chenu, député du Nord, Jean Messiha, ex-coordinateur du programme présidentiel, Philippe Olivier, beau-frère et stratège de Marine Le Pen, ou encore Philippe Vardon, conseiller régional et ex-responsable du Bloc identitaire à Nice. On trouve aussi, parmi les groupies récompensés, des permanents du parti comme Jean-Lin Lacapelle, ami de jeunesse de la patronne du FN, Laurent Jacobelli, nouveau délégué national à la communication, et même la secrétaire particulière de Marine Le Pen, Catherine Griset ! Commentaire acide d’un exclu : « Si vous prenez le bureau national et que vous enlevez les salariés, les élus et ceux qui dépendent de la bonne volonté de Marine, il ne reste plus grand monde. »

Liste unique

Les proches de Marine Le Pen auront beau jeu de rétorquer que les instances dirigeantes ont été désignées de façon démocratique. Ce serait faire peu de cas des us et coutumes du FN ! Les adhérents ont élu avant le congrès les 100 membres du « conseil national », sorte de parlement du parti. Dimanche à Lille, ces 100 ont à leur tour voté pour le bureau national. Mais en réalité, c’est Marine Le Pen qui a proposé une liste unique de 41 membres. Selon nos informations, 91 conseillers nationaux ont voté pour, 5 contre et 4 se sont abstenus.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne