Emmaüs, tout le monde connaît. Chacun y a été au moins une fois pour fouiner dans ses bric-à-brac où l’on trouve de tout, des vêtements au mobilier, en passant par les livres anciens et autres vinyles. Derrière ces cavernes d’Ali Baba à bas prix, il y a des hommes et des femmes, les “compagnons”, des personnes souvent marginalisées qui, dans l’une des 117 communautés de l’association créée par l’abbé Pierre, trouvent un moyen de se réinsérer… et de travailler. Dans l’une d’entre elles, la communauté Emmaüs de Cambrai, dans le Nord de la France, il a été décidé de verser un pécule quotidien d’environ 20 euros à chaque compagnon. Mais l’Urssaf ne l’entend pas de cette oreille : elle considère que l’association a organisé un système de travail dissimulé et lui réclame 82.059 euros de cotisations sociales, révèle le think-tank le Cercle Lafay.

Sauf que les compagnons d’Emmaüs ne sont pas des salariés. Depuis 2010, l’association peut faire bénéficier ses communautés du statut d’OACAS (Organisme d’accueil communautaire et d’activités solidaires), qui reconnaît officiellement une qualité de travailleur solidaire aux compagnons, leur donnant accès aux droits à la santé, à la retraite, ainsi qu’à une “allocation communautaire”, le fameux pécule au centre de cette “affaire”. Un statut qui n’entre pas dans le Code du travail, puisqu’il n’y a ni lien de subordination, ni prestation contre rémunération. Mais un statut qui n’a pas été choisi par l’ensemble des communautés, dont celle de Cambrai, qui le refuse toujours.

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Pourquoi ce refus ? “Nous versons un pécule aux plus démunis, mais ce n’est pas de l’insertion professionnelle. C’est de l’insertion sociale. Les gens participent à nos activités s’ils le veulent. Ce ne sont pas des salariés”, se justifie un membre de la communauté cambrésienne, interviewé par La Voix du Nord. Surtout, ce que ne dit pas ce membre de l’association, c’est que ne pas choisir le statut d’OACAS permet d’éviter l’obligation de cotiser à l’Urssaf à hauteur de 40% du Smic. Et c’est sur ce principe, non-appliqué, que l’organisme a donc calculé le montant de la cotisation réclamée.

Une autre communauté déjà condamnée à verser 192.000 euros de cotisations

Le dénouement de cet imbroglio fiscal devrait être connu assez rapidement puisque l’affaire se retrouvera le 28 mars prochain devant le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) de Douai. Si l’on s’en tient à la jurisprudence, Emmaüs a de forte chance de voir la demande de l’Urssaf être confirmée : “Après des années de lutte judiciaire, l’antenne Emmaüs de Saint-Omer a été condamnée en 2013 à verser 192.000 euros de cotisations” pour les mêmes raisons, rappelle La Voix du Nord.