En Suède, journalistes et bots travaillent main dans la main
MittMedia expérimente le recours aux robots journalistiques pour enrichir ses contenus. Résultat : les articles publiés par les machines sont les plus lus.
Par Basile Dekonink
Pour observer le futur du journalisme, il suffit peut-être de lever les yeux. Et de regarder vers le nord de l'Europe, en Suède précisément : là-bas, le groupe de presse MittMedia (qui édite 30 journaux) s'appuie sur des robots journalistes pour produire des articles et enrichir les contenus de ses rédacteurs.
Et l'expérience, démarrée en septembre, est un succès.
« Avec la chute de 25 % des effectifs dans les rédactions suédoises ces dernières années, les machines produisent des contenus que les journalistes ont arrêté de produire, mais que les gens réclament », a assuré le directeur du numérique de Mittmedia, Robin Govik, en marge d'une conférence du festival South by Southwest repérée par « Méta-Média », le blog collectif de France Télévisions dédié à l'avenir des médias.
Les employés les plus efficaces
Ce n'est certes pas la première fois qu'une rédaction a recours aux bots pour étoffer sa production éditoriale. L'agence de presse Associated Press, le magazine « Forbes » ou le « LA Times » figurent parmi les précurseurs de ces nouvelles pratiques. En France, « Le Monde », France Bleu, « Le Parisien » et « L'Express » s'étaient déjà servis d'algorithmes pour produire des textes courts sur les résultats ville par ville lors des élections régionales de 2015.
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Mais les robots de Mittmedia ont cette fois pris une place centrale dans les rédactions. Bulletins météos, compte-rendus de résultats sportifs et surtout informations sur le marché de l'immobilier local : avec 3.000 articles automatiques publiés par mois, les bots sont les « employés les plus efficaces » du groupe de presse, selon Robin Govik.
Les articles de « Homeowner », le bot dédié à l'immobilier, sont même ceux qui génèrent le plus d'audience et qui ont provoqué le plus d'abonnements de la part des internautes (300 depuis septembre).
Présentation de « Homeowner », l'un des bots de Mittmedia
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Mittmedia n'envisage pas pour autant de se passer de ses journalistes humains. De ce point de vue aussi, l'expérience est prometteuse.
Collaboration vertueuse
« Nous pensions jusqu'ici que les journalistes, traditionnellement conservateurs, détestaient les robots et les jugeaient non fiables. En fait, ce n'est pas vrai. En deux semaines, les a priori sont tombés », a commenté Hanna Tuulonen, chercheuse sur l'automatisation de l'information à l'Université d'Helsinki lors de la conférence de South by Southwest.
Le fonctionnement de Mittmedia dessine ainsi un horizon possible pour les rédactions, ou les tâches « ingrates » seraient déléguées aux robots et ou les journalistes pourraient se concentrer sur les tâches à forte valeur ajoutée.
« Le futur du journalisme sera fait de journalistes créatifs, concentrés sur leur style et leur valeur ajoutée, et en travaillant avec des robots efficaces », prédit Robin Govik.
Basile Dekonink