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A Vayres, en Gironde, la « déchetterie » est devenue obsolète et le recyclage une « obligation »

Tandis que s’est tenue la première journée mondiale du recyclage, le 18 mars, une communauté de communes de Gironde expérimente une gestion inédite des déchets.

Par  (Vayres (Gironde), envoyé spéciale)

Publié le 18 mars 2018 à 18h41, modifié le 19 mars 2018 à 12h22

Temps de Lecture 4 min.

A l’entrée du Smicval Market.

A Vayres, 3 700 habitants, en périphérie de Libourne, en Gironde, sur la rive gauche de la Dordogne, on a pleinement conscience que le recyclage « n’est pas une option mais une obligation ». Alors qu’est célébrée, dimanche 18 mars, la première journée mondiale du recyclage, la petite déchetterie de Vayres fait office de structure innovante et inédite depuis son ouverture, le 10 avril 2017.

Dans cette commune girondine, le vocable « déchetterie » est obsolète. L’exutoire local qui dessert 8 000 à 10 000 usagers, géré par le Syndicat mixte de collecte et de valorisation du Libournais et de la Haute-Gironde (Smicval), a été baptisé « Smicval Market » parce qu’il fonctionne comme un supermarché inversé.

Un temple du recyclage

A la croisée des chemins entre les enseignes de distribution dédiées à l’ameublement, au bricolage, à la décoration ou au jardinage, c’est un lieu dont la fréquentation ne relève plus de la corvée. On peut y donner autant qu’y prendre, gratuitement. Tout juste faut-il solliciter une carte d’accès, instituée pour éviter des dérives commerciales.

A l’approche des petits bâtiments pimpants de ce temple du recyclage et de la récupération sis au beau milieu des vignes, des panneaux interrogent l’usager sur sa démarche : « Objet ou matière ? », « En état ou à recycler ? » « Petit ou gros volume ? ».

Une fois dans les murs, accueilli par les « agents-valoristes », le visiteur suit un fléchage multicolore peint au sol qui le mène à la « maison des objets ». Des enfants baguenaudent, leurs parents flânent, les locaux sont clairs et accueillants.

Au fil des rayons, on débarrasse le caddie dont on s’est muni à l’entrée des objets devenus inutiles ou sans attrait : livres, CD, DVD, jouets, petit électroménager, vis, boulons, écrous… Au passage, on peut en récupérer d’autres, déposés là. On trouve également des conteneurs pour recycler ampoules et piles usagées ou… gourdes à compote vides.

On passe ensuite par le « préau des matériaux » : vis, boulons, écrous, parpaings, restes de peinture, meubles usagés ou bois de chauffe… Ici encore, on se déleste ou bien l’on trouve la pièce détachée qui nous manquait. Ce qui ne trouve pas preneur sous quinzaine part alimenter des recycleries.

Il suffit de suivre le fléchage au sol.

« L’idée de base était de changer de regard sur les déchets, de faire comprendre qu’un objet, un produit ou un matériau peut continuer sa vie chez quelqu’un d’autre que soi, ou sous une forme différente, explique Alain Marois, 68 ans, président du Smicval et cheville ouvrière du projet. Cet outil qu’est le Smicval Market plonge nos concitoyens dans une ambiance différente. C’est un lieu d’éducation à l’environnement, d’échange de savoirs et de partage des bonnes pratiques dans lequel ils reconsidèrent leur geste de jeter comme un geste de consommation ».

Unique en France

De fait, ici, point de conducteur excédé qui joue du klaxon, ni d’embouteillages. Pourtant, les usagers s’attardent 20 à 30 minutes, contre une petite dizaine seulement dans une déchetterie classique.

« Le parcours est conçu de matière pédagogique, explique l’une des trois agentes-valoristes. On commence par les articles directement réutilisables et la toute dernière étape est une benne tout-venant pour les objets non-recyclables signalée par un panneau marqué “enfouissement. L’usager fait là le geste ultime, celui qui n’a pu être évité par du réemploi ou du recyclage »

Unique en France, le concept du Smicval Market s’est imposé par nécessité, « en réaction à un risque écologique important ». Au début des années 1990, le site était une décharge à ciel ouvert, avec 200 000 tonnes de déchets qui prenaient feu régulièrement.

Le refus de l’administration d’accorder un permis de construire pour une plus grosse déchetterie classique a finalement inspiré aux élus locaux l’idée du supermarché inversé. L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie s’est enthousiasmée pour l’initiative, soutenant l’investissement à hauteur de 240 000 euros sur un montant total de 1,5 million d’euros. C’est plus cher qu’une déchetterie normale, mais, pour Alain Marois, le jeu en vaut la chandelle.

120 000 tonnes de déchets par an

« Au départ, on avait calculé qu’on rattraperait le surcoût en 6 ou 7 ans, mais cela va beaucoup plus vite que prévu, note-t-il. 120 000 tonnes de déchets par an passent par ce site. On amène nos concitoyens dans l’économie circulaire alors que dans une déchetterie classique, une fois qu’on a trié déchets verts et gravats, on n’a plus d’autre solution que le caisson tout venant à incinérer ou à enfouir. »

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L’enthousiasme que suscite la structure ne grise cependant pas Alain Marois. « Le Smicval Market n’est pas un gadget duplicable à l’infini sur n’importe quel territoire, prévient-il. C’est un outil dont l’utilisation exige un profond travail de base, une éducation sérieuse des populations sur le sens du geste de tri et qui n’est pas aisée à réaliser à grande échelle. »

La situation géographique a également son importance. « Ici, on est au milieu des vignes dans une zone accessible, visible, non génératrice de vandalisme, entourée d’un habitat horizontal et aéré, ce qui facilite les choses », rappelle M. Marois.

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