Le fisc s’intéresse de près aux députés et sénateurs

Les contrôles de revenus et de patrimoine des parlementaires se sont intensifiés en 2017. Transparence oblige !

 Le ministère des Finances reconnaît avoir « contrôlé (l’an dernier) près de deux fois plus de dossiers que sur la période précédente comparable, c’est-à-dire celle de 2012 ».
Le ministère des Finances reconnaît avoir « contrôlé (l’an dernier) près de deux fois plus de dossiers que sur la période précédente comparable, c’est-à-dire celle de 2012 ». LP/Olivier Boitet

    Ils ne le crient pas sur tous les toits. Mais les députés et les sénateurs sont, actuellement, dans le viseur du fisc. Pour des soupçons de fraudes, mais surtout au nom de la transparence, une valeur cardinale dans la vie publique depuis le scandale Cahuzac. « En discutant entre nous, on se rend compte qu'on est plusieurs à faire l'objet d'un contrôle, constate un député. Que l'on soit dans l'opposition ou dans la majorité. »

    Selon nos informations, les services du fisc ont bel et bien intensifié leurs efforts durant l'année 2017. « Nous avons contrôlé près de deux fois plus de dossiers que sur la période précédente comparable, c'est-à-dire celle de 2012, qui, comme en 2017, porte sur la fin d'une législature et le début d'une autre », reconnaît-on à Bercy.

    A l'origine de cette ardeur fiscale ? La création, en septembre 2016, de la Direction nationale des vérifications de situations fiscales (DNVSF), bras armé de l'administration fiscale dont la mission consiste à vérifier la situation patrimoniale et fiscale des personnalités publiques, et notamment celle des députés et des sénateurs. La DNVSF permet plus facilement au fisc d'intervenir, de sa propre initiative, dans l'objectif d'un redressement.

    « Avant que n'éclate le scandale, Jérôme Cahuzac n'avait jamais été contrôlé, car c'était aux services fiscaux locaux qu'incombait ce rôle, quel que soit le contribuable. Or, vis-à-vis de personnalités politiques d'une telle notoriété, cette tâche s'avérait très délicate et de fait impossible, confie-t-on à Bercy. Le caractère centralisé de la DNVSF a désinhibé nos services. »

    Combien de parlementaires ont-ils fait l'objet de redressements ? Silence à Bercy.

    « C'est parfois fastidieux, mais c'est normal »

    Mais, c'est surtout à la demande de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) que le fisc est désormais sollicité. « Il y a bien eu une intensification de nos contrôles en 2017 car deux populations de parlementaires se sont croisées, précise-t-on à la Haute Autorité. Les députés sortants et ceux qui ont été élus en juin. »

    A l'Assemblée nationale, les nouveaux élus ne paniquent pas. « En tant que nouveau député, on doit déclarer notre patrimoine, c'est parfois fastidieux, mais c'est normal. Il faut qu'à la fin de notre mandat en 2022, la Haute Autorité soit en mesure de vérifier si l'on s'est enrichi et si oui, pour quelles raisons », déclare, serein, un jeune député LREM.

    En cas de soupçon d'enrichissement illégal, la Haute Autorité est en droit, cependant, de demander au fisc un complément d'informations sur les revenus du parlementaire. Une démarche qui peut, par ricochet, susciter des vérifications supplémentaires de la part des services fiscaux, seuls habilités à recueillir les données personnelles des particuliers et donc des élus, auprès des notaires ou des banques… Là encore, impossible de savoir combien de fois le fisc a été sollicité…

    « Nous avons un devoir d'exemplarité, estime un député En Marche. Quand on entre en politique, on sait à quoi on s'engage. Tout commerçant peut être contrôlé sur ses revenus ou sur la TVA. Alors, pourquoi pas nous ? »