Grève à la SNCF : le plan secret de la CGT pour paralyser le trafic

Dans un mail interne envoyé à ses militants, la CGT-Cheminots annonce vouloir perturber au maximum la circulation des trains tout en limitant l’impact financier pour les grévistes.

 «La désorganisation du travail devra se faire également sur les jours ouvrés mais je ne vous en dis pas plus sur ce mail, je pense que vous avez compris où l’on veut en venir», écrit le délégué de la CGT-Cheminots dans un mail que nous avons pu consulter.
«La désorganisation du travail devra se faire également sur les jours ouvrés mais je ne vous en dis pas plus sur ce mail, je pense que vous avez compris où l’on veut en venir», écrit le délégué de la CGT-Cheminots dans un mail que nous avons pu consulter. AFP

    Usagers de la SNCF, préparez-vous à une grève très dure. Dès jeudi, jour de la première manifestation des cheminots contre la réforme du gouvernement qui prévoit la suppression du statut des salariés de la compagnie ferroviaire et la transformation de la SNCF en société anonyme à capitaux publics, d'importantes perturbations sont attendues sur les rails. Selon les premières estimations, de très nombreux trains devraient être supprimés dans tout le pays, notamment dans les Hauts-de-France. Une mauvaise surprise quand on sait que seulement deux des quatre organisations représentatives de la SNCF, l'Unsa et SUD Rail ont appelé à faire grève jeudi.

    «Le ton est donné, analyse une source bien informée. Les cheminots sont en colère. Le taux de grévistes devrait avoisiner ce qu'on a connu avec le mouvement de 2014 alors que la CGT, principale organisation syndicale de l'entreprise publique, n'a pas appelé à faire grève». Autant dire que le pire est encore à venir. Car si les syndicats ont annoncé de manière inédite seulement deux jours de grève tous les cinq jours à compter des 3 et 4 avril, il ne faut pas s'attendre à un mouvement moins dur. Au contraire !

    «Nous pouvons tenir trois mois»

    Dans un mail interne à la CGT-Cheminots, envoyé samedi dernier à plusieurs militants de la zone Paris-Sud Est, et que nous avons pu consulter, la stratégie mise en place par la première organisation syndicale de la SNCF est claire : perturber au maximum la circulation des trains tout en limitant l'impact financier pour les grévistes. «Depuis 1995 sur le champ professionnel et 2006 sur le champ interprofessionnel avec la lutte contre le CPE (NDLR : Contrat première embauche) il faut bien admettre que nous avons pris quasiment que des fessées, écrit ce délégué de la CGT-Cheminots.

    À partir de ce constat-là, il a bien fallu se rendre à l'évidence. Aujourd'hui, hormis une poignée d'agents, nous sommes incapables de tenir au-delà de 15 jours de grève et nous savons que face à un gouvernement déterminé comme celui que nous avons actuellement il nous faudra tenir bien plus longtemps». Selon le syndicaliste, grâce à ces grèves perlées : «Nous pouvons tenir trois mois tout en ayant quasiment le même impact qu'une grève reconductible classique».

    Et le cégétiste de s'enthousiasmer : «Cette proposition de grève prend tout le monde de court ! Je vous invite d'ailleurs à voir la tête de Guillaume Pepy (NDLR : Président de la SNCF) sur TF 1 le soir de l'annonce et de la ministre Elisabeth Borne (NDLR : ministre des Transports) sur BFMTV, c'était tout simplement jouissif. La direction avait anticipé et s'est organisée pour une grève dure et reconductible classique. Ils n'ont à aucun moment senti venir le coup».

    «Désorganisation du travail les jours ouvrés»

    Une stratégie d'autant plus préparée minutieusement par la CGT que l'organisation syndicale prévoit également de perturber le trafic ferroviaire les jours sans grève. «La désorganisation du travail devra se faire également sur les jours ouvrés mais je ne vous en dis pas plus sur ce mail, je pense que vous avez compris où l'on veut en venir», écrit le délégué de la CGT-Cheminots.

    Contacté par Le Parisien pour préciser sa pensée, l'auteur du message répond : «Il ne s'agit en aucune manière de préparer des actes de sabotages. Nous ne ferons qu'appliquer scrupuleusement le règlement. Par exemple, si le programme d'un conducteur prévoit un terminus à telle gare pas question d'aller au-delà si la direction le demande». Une sorte de grève du zèle, complètement assumée. «Jamais dans l'Histoire de la SNCF, les cheminots n'ont été aussi violemment attaqués et humiliés, poursuit le syndicaliste. Nous ne faisons que nous défendre».

    Et pour ceux qui douteraient encore de la détermination de la CGT-cheminots à faire fléchir le gouvernement, le syndicaliste précise, dans le mail envoyé aux militants : «Si jamais nous voyons que ces deux jours (NDLR : de grève) ne suffisent pas à désorganiser la production alors nous pourrons toujours durcir le ton».