Taxe européenne sur les GAFA : Macron réussira-t-il son pari ?

Lors d’un Conseil européen à Bruxelles, qui se termine ce vendredi, le chef de l’Etat va tenter de convaincre les Etats-membres d’adopter une taxe à 3% sur les revenus des géants du numérique.

 Les chefs d’État et de gouvernement sont réunis jeudi et vendredi en Conseil européen. Emmanuel Macron veut les convaincre de taxer les GAFA à hauteur de 3 % de leurs revenus.
Les chefs d’État et de gouvernement sont réunis jeudi et vendredi en Conseil européen. Emmanuel Macron veut les convaincre de taxer les GAFA à hauteur de 3 % de leurs revenus. AFP/Ludovic MARIN

    Emmanuel Macron parviendra-t-il à arracher un accord des 27 États membres pour taxer les géants du numérique? Ce jeudi soir, les GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon) ont dû sentir leurs oreilles siffler. Les chefs d'État et de gouvernement, réunis jeudi et vendredi en Conseil européen à Bruxelles, ont consacré leur dîner de travail à la proposition française d'imposer leurs super-profits. Malgré des résistances tenaces, le dossier avance.

    Aujourd'hui, ces géants du web paient en moyenne 9 % d'impôt en Europe, là où les entreprises traditionnelles sont imposées à 23 %. Une situation de plus en plus intolérable pour les États dont les caisses publiques sont vides...

    Mercredi dernier, Pierre Moscovici, le Commissaire européen en charge de la fiscalité, a proposé un scénario à double détente, à charge ensuite aux États-membres de le mettre en oeuvre. À court-terme, il préconise d'instaurer une taxe de 3 % sur les revenus - et non sur les profits, comme le veut l'usage - des groupes qui réalisent au moins 50 millions d'euros de chiffre d'affaires dans l'Union européenne.

    Second temps, il faudra imposer « la présence numérique » des Google, Facebook et autres stars du web, ce qui est impossible aujourd'hui puisque seule la présence physique (sièges sociaux, achats et contrats, salariés, etc.) peut être taxée. Mais ce volet-là est beaucoup plus ambitieux...

    Une taxe loin de faire l'unanimité

    L'Élysée ne s'en cache pas : après avoir arraché un accord sur les travailleurs détachés, il rêve de pouvoir brandir le trophée des GAFA lors des élections européennes de 2019. Autant dire que la France va privilégier le scénario de court-terme.

    Et même cette première étape n'est pas gagnée d'avance pusiqu'en matière fiscale, les décisions sont prises l'unanimité. L'Irlande (où Facebook a élu domicile en Europe) et le Luxembourg (qui abrite le siège d'Amazon) sont ultra-réticents. Emmanuel Macron entend se montrer persuasif, quitte à leur lâcher du lest sur d'autres dossiers.

    «On se doit d'être ambitieux»

    De longues semaines de négociations entre ministres des Finances européens vont donc s'ouvrir. Mais d'ores et déjà, en France, la taxe à 3 % a ses détracteurs qui la jugent « dérisoire », bien trop modeste. « Cela rapporterait cinq milliards d'euros par an à l'UE. Une broutille face aux centaines de milliards générés par les GAFA sur le marché européen ! », s'emporte l'eurodéputé Alain Lamassoure. « Après le scandale des Paradis Papers, on se doit d'être amitieux ! »

    Craignant lui aussi un effet d'affichage, Xavier Bertrand, le patron LR des Hauts de France a écrit à Emmanuel Macron et Angela Merkel pour les exhorter à aller plus loin que les 3 %. Quitte à contourner la règle de l'unanimité en actionnant « l'article 116 » qui permettrai, selon lui, d'organiser un vote à la majorité qualifiée. Et de lancer : « Macron va-t-il succomber aux deals faciles en privilégiant la communication ou vraiment changer la donne en Europe ? »