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Grève à la SNCF : pourquoi la galère durera plus de deux jours par semaine pour les usagers
Une grève du zèle aura également lieu lors des jours ouvrés.

Grève à la SNCF : pourquoi la galère durera plus de deux jours par semaine pour les usagers

Mouvement des cheminots

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A partir du 3 avril et pour une durée de trois mois, le trafic ferroviaire sera perturbé à raison de deux jours par semaine. En cause, la grève "perlée" des cheminots contre la réforme de la SNCF. Une façon inédite de se mobiliser qui pourrait toutefois causer des perturbations même en dehors de ces jours chômés. Explications.

Au lendemain du week-end de Pâques, il sera compliqué de passer entre les mailles du filet. Même si la mobilisation des cheminots, étalée sur trois mois du 3 avril au 28 juin, n'est censée concerner que 36 journées à raison de deux jours sur sept, des trains pourraient être contraints au chômage technique à d'autres moments de la semaine. Et donc causer de plus grandes perturbations que prévu. La faute à cette fameuse "grève perlée" dont la capacité de nuisance, pour l'organisation du réseau ferroviaire, est bien plus importante qu'une grève "carrée" classique sur un seul jour fixe. D'autant qu'une "grève du zèle" du personnel du ferroviaire pourrait également s'y greffer.

Cadences brisées et grève du zèle

Cette forme de grève a un but assumé : briser les cadences et compliquer la production sur une très longue durée. Selon Bruno Cazeau, président de la Fédération nationale des associations d'usagers des transports (Fnaut), l'entreprise publique devrait connaître quelques difficultés pour faire reprendre un service normal à ses trains au lendemain des jours de contestation. "Il faudra plutôt compter sur 3 à 4 jours de perturbations. C'est d'ailleurs le but recherché, organiser une galère maximale. Pour les voyageurs comme pour la SNCF", explique-t-il à Marianne. Quand une partie du réseau est à l'arrêt, il faut du temps pour le remettre en état. On peut s'attendre à ce que la grève soit particulièrement suivie, on peut donc compter sur une journée difficile de plus par semaine, au minimum."

"On peut compter sur une journée difficile de plus par semaine, au minimum"

Mais ce n'est pas la seule raison. Une "grève du zèle" devrait aussi s'organiser en parallèle "sur les temps de travail". "Chaque jour, nous dépassons nos missions, relate Fabien Villedieu, délégué syndical Sud-Rail, pour Marianne. Nous prenons nos services parfois plus tôt qu'on ne le devrait, nous effectuons des tâches qui ne sont pas prévues initialement pour dépanner et ne pas laisser des rames au milieu de nulle part. Ce n'est pas réglementaire mais ça arrange bien la SNCF." A partir du 3 avril, hors jours de grève, de nombreux employés pourraient s'en tenir au "strict minimum", selon lui. Une façon de se mobiliser qui aura des conséquences fâcheuses pour les voyageurs. "Aiguilleurs, agents d'escales, conducteurs de trains… Si on se mobilise tous de cette façon, la circulation des trains pourrait être sérieusement compromise", indique-t-il. Une belle pagaille en perspective sur les chemins de fer français.

Désorganisation sur les jours ouvrés

Des intentions qui semblent s'inscrire dans une stratégie globale des syndicats. Mardi, Le Parisien dévoilait un mail interne de la CGT-Cheminots qui le laissait penser. Son auteur, un délégué syndical parisien, vantait les effets de ces deux façons de protester à venir, sans en dévoiler clairement les détails. "Nous pouvons tenir trois mois tout en ayant quasiment le même impact qu'une grève reconductible, est-il écrit. La désorganisation du travail devra se faire également sur les jours ouvrés." Une stratégie qui a fait bondir le patron de la SNCF,Guillaume Pépy : "Rien ne justifie que pendant trois mois on prévoit une gêne permanente des usagers", a-t-il lancé au micro de RTL mercredi. La ministre des Transports, Elisabeth Borne, a également vivement critiqué ces méthodes, à l'antenne de RMC : "Si l'objectif est de perturber au maximum les voyageurs, de désorganiser le service public, là je pense que ça n'est pas ce qu'on peut attendre de l'action syndicale."

"On se doit de taper fort

Malgré ces réactions, les syndicats semblent décidés à aller jusqu'au bout. "Ce sera trois mois de difficultés difficilement prévisibles. Face à un gouvernement qui tape fort, on se doit de taper fort, rétorque le délégué syndical Sud-Rail. On parle d'une possible privatisation de la SNCF dans les années à venir, c'est un sujet grave. Alors le mouvement doit être dur pour être efficace."

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne