Observez trois planètes et une station spatiale en perdition dans le ciel de l’aube

Dimanche matin, le « Palais céleste » chinois est passée à côté de Jupiter, Mars et Saturne lors de l’un de ses ultimes survols visibles en France avant sa désintégration.


La station spatiale chinoise Tiangong-1 était toujours en orbite dimanche 1er avril à l’aube et elle est bien passée juste à côté des planètes Jupiter, Mars et Saturne entre 6 h 44 min et 6 h 47 min heure de Paris, soit moins d’une heure avant le lever du Soleil. Ce survol a été observé en France métropolitaine. La station était aisément visible sans instrument et elle se déplaçait très vite d’ouest en est, bien plus vite que la Station spatiale internationale qui orbite à plus de 400 km d’altitude alors que Tiangong-1 se trouvait à moins de 170 km d’altitude.
Illustration : Guillaume Cannat

Mise à jour du 3 avril – 7 h
D’après le site SpaceWeather, la rentrée atmosphérique de Tiangong-1 s’est effectuée par 13,6° de latitude sud et 164,3° de longitude ouest, c’est-à-dire à près de 1 660 km au nord-ouest de la Polynésie française. Aucune image ne semble disponible à ce jour ; les images de la désintégration de Tiangong-1 diffusées sur YouTube jusqu’à présent sont des montages réalisés à partir de vidéo de la chute d’autres satellites ou des images de synthèse. 

Mise à jour du 2 avril – 7 h
La station spatiale chinoise Tiangong-1 s’est désintégrée lors de sa rentrée dans l’atmosphère au-dessus de l’océan Pacifique Sud le 2 avril à 2 h 15 min, heure de Paris.


Tiangong-1 s’est désintégrée lors de sa rentrée atmosphérique au-dessus du Sud Pacifique.
Illustration Aerospace.

Il ne semble pas y avoir d’images de sa destruction, mais je vous propose de revenir sur son dernier passage dans le ciel de France, dimanche matin, avec ce film réalisé par l’astrophotographe Thierry Legault.

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D’après les dernières estimations proposées par la société Aerospace et l’Agence spatiale européenne la station spatiale chinoise Tiangong-1 devrait se désintégrer dans l’atmosphère terrestre le 2 avril vers 2 h 30 min, heure de Paris. La marge d’incertitude ne serait plus que de 1,7 heure en plus ou en moins, nous arrivons donc au terme de cette dégringolade annoncée et incontrôlée. D’après l’Agence spatiale européenne, l’activité solaire étant très faible en ce moment, la très haute atmosphère serait plus froide et un peu moins étendue qu’habituellement, le frottement de la station serait donc moins important et cela ralentirait l’érosion de son orbite. Il est encore trop tôt pour savoir où sera précisément la station lors de sa rentrée atmosphérique, mais si elle se produit à l’heure annoncée ci-dessus la station devrait survoler le sud de l’océan Pacifique, non loin des côtes chiliennes.


Si vous voulez suivre Tiangong-1 en temps réel, vous pouvez vous connecter au site Heavens Above ou suivre les rapports de l’Agence spatial européenne ou de la société Aerospace (en anglais).
Illustration Heavens Above.

Le risque d’être touché par un fragment de la station qui aurait résisté à l’échauffement énorme engendré par son frottement contre l’atmosphère étant pratiquement nul, je vous propose plutôt de considérer cette rentrée satellitaire comme une occasion de regarder le ciel. D’autant plus que, lundi à l’aube, si Tiangong-1 tourne toujours autour de la Terre et si ses paramètres orbitaux n’ont pas trop évolué, elle survolera la Méditerranée un peu plus d’une heure avant le lever du Soleil. Elle sera donc visible dans la moitié sud de la France au ras de l’horizon sud. Comme les planètes Jupiter, Mars et Saturne brillent au-dessus de l’horizon sud-sud-est à sud-sud-ouest à l’aube, la station spatiale chinoise devrait passer sous elles. Si elle commençait à se désintégrer à ce moment-là le spectacle pourrait être grandiose, mais j’en demande sûrement un peu trop… et je préférerais qu’aucun fragment ne tombe sur la Corse ou l’Italie !

Le 29 septembre 2008, lors de sa rentrée atmosphérique contrôlée, l’ATV Jules Verne (ESA) a commencé à se briser et à se désintégrer à 75 km d’altitude ; les fragments les plus résistants sont tombés dans l’océan Pacifique.
Crédits : ESA/NASA

Avec ou sans la présence d’un palais céleste égaré par ses bâtisseurs, le couple Mars-Saturne est superbe à observer à l’œil nu ces jours-ci. Ces deux planètes sont en effet à 1,5° d’écart dans le ciel de l’aube. Elles ne sont bien évidemment pas à la même distance de la Terre – Mars est à 165 millions de kilomètres et Saturne à 1 492 millions de kilomètres – mais elles sont dans la même direction et la perspective nous permet de les admirer côte à côte dans le ciel. C’est l’occasion de comparer l’éclat et, surtout, la couleur apparente de ces deux astres. Depuis quelques jours, Mars est plus brillante que Saturne. Ce n’est pas encore flagrant, mais cela va vite le devenir car notre voisine se rapproche rapidement de nous et dans trois mois elle sera plus brillante que Jupiter, que vous pouvez voir en pivotant la tête vers le sud-ouest. La particularité de l’éclat martien est sa coloration orangée perceptible à l’œil nu et absolument magnifique dans des jumelles ou une lunette astronomique. La couleur de Saturne est bien moins marquée. Un coup d’œil rapide pourrait vous faire dire qu’elle est blanche, mais si vous regardez mieux et si vous comparez son éclat à celui de Jupiter qui est d’un blanc très pur, vous constaterez que Saturne semble plutôt jaune pâle, jaune crémeux.

(Ce dernier paragraphe ne semble plus être d’actualité…)
Après son beau passage du dimanche 1er à l’aube, la station pourrait de nouveau être visible lundi 2 avril à l’aube, dans la moitié sud de la France, si elle ne s’est pas déjà désintégrée. Si une éclaircie se présente entre les giboulées, ce qui devrait être le cas sur la moitié sud de la France si j’en crois les prévisions de Météo France, sortez ou ouvrez une fenêtre et regardez vers le sud en direction de ces trois planètes. Si elle est toujours en orbite, le reflet du Soleil sur la station devrait la faire apparaître un peu après 6 h au moment où elle sortira de l’ombre de la Terre à la fin de sa trajectoire sous Jupiter, Saturne et de Mars ; prenez quelques minutes de marge. Le Palais céleste brillera alors encore faiblement, sauf s’il est en train de se désintégrer et de se transformer en un bouquet final éblouissant !

Sources
L’observatoire de Paris propose de multiples cartes des trajectoires de Tiangong-1 autour de la Terre.
L’Agence spatiale européenne consacre de nombreux articles à Tiangong-1 avec des explications détaillées sur les techniques de suivi des rentrées satellitaires.
Les dernières données sur la position de Tiangong-1 et sur l’heure de sa rentrée atmosphérique sont disponibles sur le site de la société Aerospace.
Si vous voulez avoir la trajectoire de Tiangong-1 dans votre ciel lors du passage de dimanche matin ou suivre la position de la station en temps réel, vous pouvez utiliser le site Heavens Above.

 

Les autres rendez-vous astronomiques de la semaine…

Samedi 31 mars
Seconde pleine lune du mois. Elle se lève à l’est juste après la disparition du disque solaire à l’ouest et illumine la voûte céleste toute la nuit.

Lundi 2 avril
À la fin du crépuscule, profitez des dernières soirées en compagnie de la grande figure d’Orion. Elle surplombe l’horizon ouest et se couche rapidement, laissant la voûte céleste aux constellations du printemps. Utilisez les nouvelles cartes du ciel du soir et de l’aube disponibles un peu plus loin dans ce billet pour vous repérer.

Mardi 3 et mercredi 4 avril
À l’orée de l’aube, deux heures avant le lever du Soleil, Jupiter est encadrée par la Lune gibbeuse décroissante quelques jours à peine après la pleine lune. La scène se déroule dans la Balance, à plus de 20° de hauteur au-dessus de l’horizon sud-sud-ouest, elle est donc facile à suivre si vous ne vivez pas dans une vallée trop encaissée. Un mois avant son opposition, Jupiter est éclatante et l’intense luminosité lunaire ne lui fait pas peur.

Samedi 7 avril
Deux heures avant le lever du Soleil, deux planètes et la Lune ont rendez-vous dans le Sagittaire à une quinzaine de degrés au-dessus de l’horizon sud-sud-est. L’éclat orangé de Mars est de plus en plus puissant et il dépassera dans les prochains jours la brillance des étoiles Véga et d’Arcturus, que vous pouvez repérer plus haut dans le ciel en fin de nuit. Seule Jupiter résiste encore à la furia martienne, mais le rapport de force s’inversera en juillet. Même si Saturne semble de plus en plus pâlichonne à moins de 3° de Mars, ne la négligez pas si vous avez accès à un instrument car ses anneaux sont merveilleux à observer.

Les phases de la Lune en avril
La Lune est au dernier quartier le 8 dans le Sagittaire, nouvelle le 16 dans les Poissons, au premier quartier le 22 dans le Cancer et pleine le 30 dans la Balance.

Lire aussi : Toutes les phases et toutes les éclipses de la Lune en 2018

Le ciel en avril
Avril plaque Orion et le Grand Chien contre l’horizon ouest à la fin du crépuscule. Ce sont les derniers éclats de Rigel, Bételgeuse et Sirius, que nous retrouverons à l’aube au fil de l’été. La tête d’affiche est offerte au Lion ce mois-ci. Régulus, Denebola et leurs compagnes brillent à plus de 50° de hauteur au-dessus de l’horizon sud en début de nuit. Elles dominent un vaste désert pour les observateurs urbains, car les figures de l’Hydre femelle, de la Boussole ou de la Coupe qui emplissent cette portion du ciel ne possèdent pas d’étoiles assez éclatantes pour percer le voile nauséeux de la pollution lumineuse. Seul le petit quadrilatère du Corbeau pourra éventuellement attirer votre regard, mais ce n’est pas la figure la plus intéressante qui soit, même si elle abrite quelques nébuleuses et galaxies superbes à voir dans un grand télescope.
La Vierge et le Bouvier, avec leurs brillantes étoiles Spica et Arcturus, sont de bien plus belles créations. Elles s’élèvent à l’est du ciel au début des nuits printanières et vous pouvez utiliser la courbure du manche de la Casserole (Grande Ourse) pour arriver à leur niveau. À propos de la Casserole, remarquez qu’elle se situe au plus haut de sa trajectoire nocturne, il est donc impossible de la manquer, ce qui peut arriver lorsqu’elle flirte avec l’horizon et que des arbres ou des bâtiments la cachent. À l’est-nord-est, Véga et Deneb annoncent l’arrivée du Triangle de l’été, qui est déjà haut sur la voûte céleste et superbe en fin de nuit.


Cartes du ciel visible en avril 2018 vers la fin du crépuscule et à l’orée de l’aube à la latitude de la France métropolitaine. Cliquez sur les cartes pour les afficher en grand et les imprimer pour votre usage personnel. La position des planètes est bonne pour le milieu du mois. Ces cartes peuvent être utilisées en Europe et dans le monde à l’intérieur d’une bande s’étendant de 38° à 52° de latitude nord. Si vous êtes à plus de 45° nord, l’étoile Polaire sera plus haute dans votre ciel et, le soir, la constellation du Lion sera d’autant plus proche de l’horizon sud. Si vous êtes à moins de 45° nord, l’étoile Polaire sera plus proche de l’horizon nord et Régulus sera plus éloignée de l’horizon sud. Attention, ces cartes ne sont pas à l’envers ! Elles représentent simplement les astres qui sont situés au-dessus de nos têtes. Si vous vous allongiez avec la tête vers le nord et les pieds vers le sud, l’est serait bien à votre gauche et l’ouest à votre droite. Utilisez ces cartes en les imprimant et en les faisant tourner de telle sorte que le nom de la direction dans laquelle vous observez soit écrit à l’endroit. Les constellations et les étoiles que vous retrouverez dans la portion du ciel qui vous fait face sont toutes celles dont le nom est lisible sans trop pencher la tête. Les noms des constellations et de leurs principales étoiles sont indiqués, ainsi que le tracé des constellations les plus importantes ; ce tracé est parfois incomplet lorsque la figure est en partie cachée sous l’horizon. La partie la plus dense de la Voie lactée est dessinée, mais vous ne distinguerez cette bande irrégulière et fantomatique que dans un ciel suffisamment protégé de la pollution lumineuse. En ville ou en milieu périurbain, seuls les astres les plus brillants parviendront à s’imposer.
© Guillaume Cannat

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11 réponses sur “Observez trois planètes et une station spatiale en perdition dans le ciel de l’aube”

  1. Si ça pouvait éviter aussi la Nouvelle-Calédonie en même temps que la Corse ou l’Italie, ce serait cool 🙂

  2. Salvador Dali considérait que la gare de Perpignan était le centre du monde et le lieu de création de toutes les mouches de l’univers, une bien belle cible.

    1. Je suppose que vous ne buvez pas d’alcool, ne fumez pas, et ne conduisez pas.
      Parce que si le bout de ferraille là haut vous fait peur, qu’est-ce que ça doit être vis-à-vis de tous ces dangers autrement plus mortels !

  3. Je prévois un atterrissage aux US suite à la volonté de Trump de limiter les importations chinoises. Le protectionnisme ne fonctionne pas 😉

  4. En decouvrant votre blog j’ai vu plein de choses très interessantes, merci pour ce partage

  5. J’ai vu tomber ce qui était probablement un satellite ou un étage de lanceur en rentrant sur Paris un dimanche soir il y a très longtemps. D’après le gros titre de France Soir le lendemain j’étais loin d’être le seul (malheureusement aucune explication précise dans l’article.)

    J’ai le souvenir de quelque chose de bien plus visible qu’une étoile, qui tournait sur lui même, le plus surprenant c’est que c’était accompagné de petites explosions colorées. Durée: plusieurs secondes, moins d’une dizaine.

  6. Ce matin il n’y avait pas de vidéos, mais cet aprem on en trouve plein sur youtube… Par contre impossible de savoir si ce sont des images réelles de tiangong ou d’anciennes concernant d’autres appareils :-/
    Merci pour les liens et le blog.

    1. à ma connaissance, il n’y a pas d’images disponibles à l’heure actuelle de la rentrée atmosphérique de Tiangong-1. Les différentes vidéo que je viens de regarder sur YT ne montrent pas la désintégration de cette station, ce sont des montages.

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