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Milliers d'emplois supprimés et prime rachitique : les salariés de Carrefour se rebiffent
Des manifestants devant le Carrefour de Venissieux, près de Lyon, ce 31 mars.
NICOLAS LIPONNE / NURPHOTO

Milliers d'emplois supprimés et prime rachitique : les salariés de Carrefour se rebiffent

"J'optimisme !"

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Près de 300 magasins du groupe Carrefour ont été touchés samedi 31 mars par la grève décidée par les syndicats. En cause, la suppression prévue de nombreux emplois ainsi que la baisse de la participation pour les salariés.

La colère gronde dans les magasins Carrefour. Et dans la journée du samedi 31 mars, nombre de clients sur l'ensemble du territoire ont découvert le mouvement de grève lancé par les syndicats pour défendre les emplois au sein du groupe ainsi que le pouvoir d'achat des salariés. Un mouvement qui a impacté près de 300 supermarchés et hypermarchés selon l'intersyndicale CFDT-FO. Marianne fait le point sur les raisons du malaise des salariés du groupe de grande distribution.

La prime de participation en forte baisse

C'est ce "qui a mis le feu aux poudres", raconte au Figaro, Michel Enguelz de Force Ouvrière, pour qui les grévistes ont deux revendications : "le pouvoir d'achat et l'emploi". La participation proposée pour cette année, soit le dispositif prévoyant la redistribution d'une partie des bénéfices de l'entreprise au profit des salariés, était en forte baisse, avec seulement 57 euros en moyenne contre 610 euros l'an dernier. Devant la contestation interne, la direction a réagi mi-mars, en proposant de relever ce montant à 407 euros, via un complément forfaitaire d'intéressement. Mais le mal était fait, et la hausse annoncée n'a pas convaincu les salariés, qui réclamaient 600 euros, toujours selon Le Figaro. Dans Le Parisien, Boussad, employé au magasin d'Epinal-sur-Orge dans l'Essonne, explique : "L'an dernier les primes m'ont rapporté l'équivalent d'un salaire. Cette année, ça me rapporte 88 centimes par jour. Il m'en manque deux pour acheter une baguette de pain".

Cette baisse de la participation passe d'autant plus mal que dans le même temps, les syndicats fustigent les profits à venir pour les actionnaires, qui devraient toucher, selon eux, 356 millions d'euros de dividendes. "Cela fait plusieurs années que nos dirigeants favorisent la capitalisation boursière du groupe et les dividendes des actionnaires. Mais notre richesse se trouve dans nos magasins, pas à la Bourse", insiste Jean-Marc Robin, délégué syndical FO, dans Le Parisien.

Près de 5000 suppressions de poste

Le 23 janvier dernier, le PDG du groupe Alexandre Bompard a provoqué l'inquiétude des organisations syndicales et des salariés en annoncant un "plan de transformation" comprenant notamment la suppression de 2400 emplois (par un plan de départs volontaires) pour pouvoir financer de nouveaux investissements de 2,8 milliards d'euros devant permettre au groupe de prendre "le virage du digital".

Comme le note Le Figaro, les suppressions de postes concernent "tout le monde ou presque", des petits magasins aux hypermarchés en passant par les stations-service et les services administratifs.

Par ailleurs, Carrefour prévoit également la suppression de 2300 postes via un plan social visant 273 anciens magasins Dia.

Enfin, les syndicats protestent contre le passage prévu en location-gérance d'hypermarchés. Officiellement cinq sont concernés, mais selon les syndicats, une quarantaine seraient en réalité visés.

Auprès de l'AFP, Pascal Clouzard, directeur exécutif de Carrefour France dit comprendre "l'inquiétude" chez les salariés. Mais, précise-t-il, "si nous souhaitons pérenniser et développer notre activité économique, et donc nos emplois, nous devons impérativement nous transformer".

Un taux de grévistes avoisinant les 50%

Aussi, la journée de samedi a-t-elle été rythmée par l'important mouvement de grève à l'initiative de l'intersyndicale CFDT-FO. Un mouvement d'une ampleur inédite note Challenges, qui rappelle que le dernier front commun de plusieurs syndicats de Carrefour remontait à 2011.

Partout, le mouvement s'est traduit par des rassemblements, du "filtrage" aux entrées des magasins ou carrément des blocages. Parmi les hypermarchés complètement bloqués, ont été cités ceux d'Antibes, Ollioules, Toulon Grand Var, Nice Lingostière ou Port-de-Bouc dans le Sud, Vénissieux, Chambéry, Toulouse-Labège ou encore Mérignac, note l'AFP.

Selon la CFDT, le taux de grévistes a avoisiné les 50% tandis qu'au moins 300 hypermarchés et supermarchés ont été impactés. Selon la direction de Carrefour, une trentaine de magasins ont été fermés. Concernant la suite éventuelle du mouvement, si d'autres actions ne sont "pas exclues", "l'objectif" est un "retour à la négociation", souligne Michel Enguelz de FO.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne