Quand le pain est d'or

Le chef italien Massimo Bottura lors de l'inauguration du "réfectoire" à Paris ©AFP - PATRICK KOVARIK
Le chef italien Massimo Bottura lors de l'inauguration du "réfectoire" à Paris ©AFP - PATRICK KOVARIK
Le chef italien Massimo Bottura lors de l'inauguration du "réfectoire" à Paris ©AFP - PATRICK KOVARIK
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On refait le monde ce matin avec un grand chef italien qui se met aux fourneaux pour nourrir les plus démunis

Avec
  • Jacky Durand Journaliste culinaire à Libération et chroniqueur le samedi sur les Matins de France Culture

Ce matin, on parle d'un coup de foudre..

Pour un livre bien sûr. Rien que le titre est déjà magnifique : il s'intitule « Le pain est d'or », c'est publié aux éditions Phaidon. Il est signé par le chef Italien Massimo Bottura et une pléiade d'autres toques. Le sous-titre est appétissant comme un pain perdu au sortir du four : « Ingrédients ordinaires pour repas extraordinaires ».

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Au départ de ce livre, il y a un constat aussi banal qu'affligeant : nous jetons à chaque seconde des tonnes de bouffe alors que d'autres crèvent la dalle. Songez que rien qu'en France, chaque année, 10 millions de tonnes de produits alimentaires sont perdus ou gaspillés. Ramené à votre assiette, cela représente 29 kg de nourriture par an et par consommateur.

On peut refaire le monde sur un coin de table après un bon gueuleton. Mais c'est beaucoup plus utile de se mettre aux fourneaux pour nourrir les plus démunis, comme le fait Massimo Bottura. En 2015, il a lancé son premier « refettorio » à Milan à l'occasion de l'exposition universelle. Il raconte cette aventure dans « Le pain est d'or ». Le principe est simple comme une soupe de légumes : nourrir les autres à partir d'invendus et de surplus alimentaires. 

Massimo Bottura dit : « Je suis un chef italien et j'ai appris à tirer profit de tout et à ne rien jeter, pas même les miettes, les os ou les croûtes de fromage. Un ragoût (au sens italien du terme) n'est jamais qu'une sauce préparée avec des restes de viande, de poisson ou des épluchures de légumes ».

Après Milan, Rio et Londres, cette star de la gastronomie mondiale a installé en mars son « réfectoire » à Paris au Foyer de la Madeleine, dans les cryptes de l'église. Tous les soirs, du lundi au vendredi, cent repas sont servis aux plus démunis envoyées par des associations. Massimo Bottura dit « Nourrir la planète, ce n'est pas produire plus, c'est combattre le gaspillage. Comment le combattre? Avec la beauté de l'imagination des chefs, des artistes. Avec la beauté, on va reconstruire la dignité de ceux qui viennent manger ici ».

Un chef italien qui fait appel des chefs célèbres pour cuisiner dans ses réfectoires ?

Oui, il y a du beau linge, Alain Ducasse, Anne-Sophie Pic, Michel Troisgros, Alain Passard : plus de cinquante chefs français et étrangers sont invités à préparer les frichtis du Refettorio. Pour les recruter Massimo Bottura leur a posé une question simple mais tellement évidente : « Ne serait-il pas passionnant de cuisiner pour des gens qui ne savent pas qui nous sommes ? »

Dans « Le pain est d'or », on trouve ainsi les recettes imaginées par les chefs pour les réfectoires avec des ingrédients « beaux ou laids ». Massimo Bottura avoue qu'il a lui-même été surpris par la qualité des plats servis : « Travailler hors de nos cuisines, avec des ingrédients que l'on ne choisissait pas, nous a obligés à aller au-delà de nos limites et de nos compétences, et à repenser le cycle de la nourriture ».

Et c'est vrai que l'on salive quand découvre ces journées particulières avec des chefs archiétoilés au cul des camions des invendus alimentaires. Prenez Alain Ducasse, on le découvre dans un chambre froide en train de façonner des boulettes car, ce jour-là, il faisait si chaud à Milan que la chaleur empêchait les boulettes de garder leur forme en cuisine. Ces boulettes ont été servies avec de l'aubergine fumée et des pois chiches. En dessert, Ducasse avait imaginé une tarte au pain aux fruits caramélisés. 

Allez pour la bonne bouche du week-end voici sa recette :

Pour la tarte au pain : il vous faut quatre blancs d'oeufs ; conservez les jaunes pour réaliser un Sabayon ou de la glace ; 150 g de sucre en poudre ; 100 g de poudre d'amandes ; 50 cl de lait ; 4 œufs ; 200 g de fruits secs (pignons de pain, noisettes...) concassés ; 15 cl de lait d'amande ; 300 g de pain rassis coupé en tranches.

Dans un petit saladier, montez les blancs en neige. Dans un grand saladier, mélangez le sucre, la poudre d'amande et le lait. Ajoutez les œufs entiers, les fruits secs et le lait d'amande puis incorporez les blancs d'oeufs. Faites tremper le pain dans ce mélange pendant une à deux heures. Préchauffez votre four à 200 degrés. Beurrez un plat à four de 20 sur 26 cm. Vous y déposez les tranches de pain. Enfournez pour vingt minutes, ou jusque ce que la pointe d'un couteau en ressorte sèche.

Vous pouvez accompagner cette tarte de fruits caramélisés. Pourquoi pas des pommes ou des fraises, des fruits moches. Il vous en faut un kilo coupé en dés ; 90 g de sucre en poudre ; 1 gousse de vanille fendue dans la longueur. Vous mélangez les fruits et le sucre dans une grande casserole. Grattez les graines de vanille et ajoutez-les avec la gousse Laissez frémir à feu doux, en remuant régulièrement jusqu'à ce que les fruits soient réduits en compote. Comptez environ quinze minutes. Otez la gousse de vanille. Laissez refroidir.

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