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Société

Pourquoi tout le monde se met au vélo électrique

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- - LOIC VENANCE/AFP

Les ventes de vélo à assistance électrique (VAE) ont presque doublé en 2017, confirmant une tendance lourde dans le secteur du deux-roues.

Un jour, ce voisin de bureau qui arrive au travail à vélo tout en sueur et à bout de souffle ne sera plus qu’un mauvais souvenir. Il se pourrait bien qu’il débarque encore plus frais que vous, qui venez à peine de quitter les transports en commun. Pourquoi? Parce que l’usage du vélo électrique, ou plus précisément du vélo à assistance électrique (VAE) est en train d’exploser en France. Il s’en est vendu 254.870 en 2017, contre 107.322 l’année précédente. + 90% de ventes sur un an: ce n’est pas une tendance, c’est un raz-de-marée.

Les VAE représentent désormais près de 10% du marché total du vélo en France. "C’est extraordinaire et très impressionnant", se réjouit Virgile Caillet, délégué général de l’Union Sport et Cycle. "Il y a une prise de conscience des Français. On est à un virage, c’est presque une révolution dans la mobilité active et le déplacement. En plus, même si les moteurs sont souvent asiatiques, il y a beaucoup de technologies européennes et françaises. C’est enfin, à travers la distribution de ces produits, des emplois qui ne sont pas délocalisables. C’est le relais de croissance du marché du cycle".

"Ce n’est plus un objet de loisir, mais de déplacement"

Pour Frédéric Héran, économiste spécialiste des déplacements urbains, ce phénomène est directement lié "à l’essor du vélo dans les grandes villes de tout le monde occidental". Mais aussi à l’objet en tant que tel, devenu une sorte de super-vélo.

"Le cycliste moyen produit à peu près 100 watts. Avec les 250 watts d'un VAE, tout en continuant à pédaler, il est le roi du monde. Il peut aller plus loin. Il peut démarrer plus facilement, ce qui donne de la sûreté au démarrage. Il peut transporter des charges, comme des courses ou un enfant. On peut monter une côte et faire face au vent. Et quand vous avez un coup de mou, c’est quand même bien pratique", détaille-t-il. 

Désormais, "les gens considèrent que ce n’est plus un objet de loisir, mais un objet de déplacement", fait remarquer Nicolas Mercat, consultant sur les questions de mobilité au cabinet Inddigo. Selon lui, 70% des acheteurs d’un vélo à assistance électrique ont d’ailleurs abandonné leur voiture pour les trajets domicile-travail. "Là où un déplacement moyen domicile-travail est de quatre kilomètres avec un vélo classique, il est de huit kilomètres avec un VAE. Avec cette distance, on couvre 80% à 90% des déplacements domicile-travail en France".

"C’est loin d’être un vélo de fainéant"

L’impact sur la santé est d’ailleurs aussi bon avec une aide électrique que si vous continuez à pousser comme un dératé avec votre vélo à l’ancienne. "C’est loin d’être un vélo de fainéant", reprend Nicolas Mercat. "En fait, les gens compensent le fait que le VAE écrête le niveau d’effort. Là où un vélo parcourt entre 300 et 400 kilomètres par an, un VAE parcourt plus de 2000 kilomètres par an. L’échelle d’usage est beaucoup plus large. Du coup l’impact santé du VAE est supérieur à celle du vélo classique". Selon des études d’Inddigo, l’achat d’un VAE est d’ailleurs l’apanage des 50-70 ans, "des gens qui ne faisaient aucune activité physique".

En outre, beaucoup d’usagers de deux-roues motorisés sont également séduits par le VAE. "Parce que c’est très dangereux: à Paris, il est 40 fois plus dangereux de circuler en deux-roues motorisé qu’en voiture", reprend Frédéric Héran. "Pour ces gens, le VAE est un bon compromis: vous allez relativement vite sans les risques inhérents aux deux-roues motorisés".

Il faudra faire sans l'effet bonus VAE de 200 euros

Mais les chiffres de vente de l’année prochaine devraient tout de même se tasser, puisque l’aide versée par l’Etat de 200 euros pour l’achat d’un VAE est désormais beaucoup plus difficile à obtenir.

"Ce qui est assez incroyable, c’est qu’alors qu’on est sur un marché qui se développe fortement, sur lequel on a des entreprises françaises très bien positionnées, on arrête cette aide", regrette Nicolas Mercat. "C’est le seul objet de mobilité électrique sur lequel on n’a plus d’aide. C’est paradoxal".

Pour autant, le secteur, qui était sur une croissance de 30% par an avant la prime, n'est pas forcément très inquiet. "Le prix moyen d’un VAE c’est presque 1600 euros, donc cette prime avait un effet plus psychologique que financier. Ça a été le petit déclencheur qui a fait passer à l’acte", reprend Virgile Caillet. "Les Allemands sont à plus de 700.000 VAE, donc il y a une marge de progression considérable. On pense qu’on peut arriver aux alentours de 30% du marché pour les vélos à assistance électrique. Ça veut dire tripler le marché dans les trois ou quatre ans qui viennent".

Antoine Maes