Macron et Trump : comment les deux hommes se sont trouvés
ANALYSE - Tous deux outsiders, les présidents français et américain ont développé une relation aussi improbable qu'inattendue.
Par Elsa Conesa
Leurs poignées de main ont fait l'objet de pages de commentaires des deux côtés de l'Atlantique. « Nous avons une relation très privilégiée», dit Macron. « C'est un type super », dit Trump, qui lui donne du « Emmanuel ».
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Difficile pourtant d'imaginer combinaison plus improbable : l'un est un littéraire, incarnation de ces élites mondialisées que dénonce l'autre, un patron de casino qui doit sa notoriété à un show de téléréalité. Trump et Macron ne sont d'ailleurs d'accord sur à peu près rien : ni sur le commerce, ni sur l'Iran, ni sur le climat, ni sur le futur de l'Europe. Pourtant, ils ont choisi de cultiver une forme de proximité aussi surprenante qu'opportune.
Davantage en commun qu'ils ne voudraient l'admettre
Les deux hommes sont les premiers à pointer leurs similitudes. L'un pourrait être le fils de l'autre, mais son expérience politique est presque aussi longue. Ce sont tous deux des accidents de l'histoire, des outsiders dont personne n'avait anticipé la percée. «Nous ne faisons pas partie du système politique classique », a admis Macron sur Fox News dimanche, se qualifiant, ainsi que Trump, de «franc-tireur ».
Elus par une même vague de « dégagisme » qui a soufflé les partis traditionnels, ils partagent en outre une certaine idée de la puissance, derrière des convictions fort différentes. La presse américaine, moins convaincue que Trump par le défilé du 14 juillet, s'amuse ainsi du goût du président français pour le faste du Louvre ou de Versailles. Et ce dernier s'est amusé dimanche sur Fox News à paraphraser le slogan du candidat Trump: « Make (France) great again ».
Casser les codes
Les deux leaders aiment aussi surjouer leur proximité. La Maison blanche rapporte qu'ils se parlent souvent, assure que Trump garde un oeil sur les réformes de Macron et n'hésite pas à le féliciter. Le milliardaire voit son cadet comme un « disrupter » capable de casser les codes, à son image.
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Pragmatique, le président français a de son côté toujours été convaincu de la nécessité de s'allier Trump plutôt que de l'isoler sur la scène internationale. Il est aujourd'hui son plus proche partenaire en Europe, alors que la relation du milliardaire avec Theresa May s'est dégradée et qu'il a peu d'affinités avec Angela Merkel. Macron se targue même d'un certain pouvoir de conviction, affirmant l'avoir convaincu de rester en Syrie, avant de faire machine arrière.
Mais pas de terrain d'entente sur le fond
Réelle ou feinte, leur amité n'a toutefois pas permis, à ce stade, de trouver de terrain d'entente sur le fond - en dehors de l'épisode des frappes en Syrie. Donald Trump a quitté l'accord de Paris, il a déplacé son ambassade à Jérusalem, n'a accordé qu'un sursis à l'Europe sur l'acier et ne semble pas vouloir s'entendre avec l'Iran.
La percée des néoconservateurs au sein de son administration, avec la nomination imminente du ministre des Affaires étrangères Mike Pompeo et du conseiller à la sécurité John Bolton, va encore compliquer la tâche. Il va falloir beaucoup de talent à Emmanuel Macron pour faire bouger les lignes.
Elsa Conesa (Bureau de New York)