• Voir toute la rubrique
  • Voir toute la rubrique

Sigmund Freud, le père de la psychanalyse

Margaux Rambert
Publié le 03/12/2010 à 16:43 Modifié le 01/12/2023 à 10:00
Sigmund Freud, père de la psychanalyse

Il a inventé la psychanalyse. Théorisé les notions de conscient, d’inconscient, de rêve, de refoulement, de transfert ou encore de complexe d’Œdipe. Retour sur la vie de Sigmund Freud, cet analyste qui a révolutionné la conception du psychisme humain.

Docteur Sigmund Freud : sa biographie

Pour mieux comprendre la pensée de Sigmund Freud, commençons par retracer l’histoire de sa vie.

Freud jeune : de Vienne à Paris

Sigmund Freud naît le 6 mai 1856 à Freiberg, en Moravie, en actuelle République Tchèque, dans une famille juive. Alors qu’il n’a que trois ans, son père, Jacob Freud, fait faillite. En 1860, la famille part tenter sa chance à Vienne, fuyant par là-même une ville rongée par l’antisémitisme.

Freud, qui lit Shakespeare, Homère, Schiller et Goethe dès l’âge de 8 ans, y fait de brillantes études scientifiques. En 1876, il entre à l’institut de physiologie d’Ernst Brücke, où il fera la connaissance de Josef Breuer. En 1881, il obtient son diplôme de médecin et se tourne d’abord vers la neurologie.

Quatre ans plus tard, bénéficiant d’une bourse d’études, le jeune médecin part en France et suit, à l’hôpital de la Salpêtrière à Paris, les cours du professeur Jean-Martin Charcot, l’un des neurologues les plus renommés de l’époque, notamment pour ses travaux sur l’hystérie et l’hypnose.

Retour à Vienne et premiers travaux controversés

De retour à Vienne où il s’établit comme médecin, Freud s’attaque au traitement des maladies nerveuses. Défenseur des théories du professeur Charcot, il prononce un discours décrivant l’hystérie masculine, en 1886, devant la Société des Médecins de Vienne. Battant en brèche l’idée, répandue à l’époque, qu’il s’agissait d’une maladie typiquement féminine. Ses études sur l’hystérie suscitent un tollé de ses confrères qui le mettent au ban de leur société.

La même année, Freud épouse Martha Bernays, à qui il est fiancé depuis longtemps. Le couple aura six enfants, dont Anna Freud, qui deviendra psychanalyste.

séance d'hypnose chez un psychanalyste
crédit photo : @Shutterstock

L’hypnose, les prémices de la psychanalytique selon Freud

A cette époque, le neurologue soigne ses patients en ayant recours à l’électrothérapie et à l’hypnose, mais abandonne rapidement cette voie, aux résultats spectaculaires mais peu durables.

En 1895, il publie, avec son ami, Josef Breuer, médecin et physiologiste autrichien, Etudes sur l’hystérie. L’ouvrage rassemble les cas traités par les deux médecins depuis 1893, dont celui d’Anna O. Une femme supposée hystérique, patiente de Josef Breuer, qui la considère comme l’exemple type d’un nouveau type de cure, qu’il nomme cathartique. Le principe : faire raconter au patient, placé sous hypnose, des événements traumatiques et enfouis de son passé et l’en libérer par l’expression de cette parole.

Naissance de la psychanalyse : les premières théories freudiennes

Freud passe de longues heures à étudier ce cas. Et à partir de là, il développe une nouvelle approche basée sur une exploration de la vie psychique consciente et inconsciente. Sur une étude de la part visible de la conscience humaine, et de celle, cachée, qui affleure par les lapsus, les rêves, les mots d’esprit et les actes manqués.
En 1896, il lui donne le nom de « psychanalyse ». Son objectif : dénouer des troubles psychiques médicalement inexplicables.

Dès lors, Freud développe sa théorie du conscient, du pré-conscient et de l’inconscient. Une première révolution dans la représentation du psychisme.

Le complexe d’Œdipe, théorisé par Freud après un deuil

Quelques années plus tard, son père meurt, et Freud entreprend de « s’auto-analyser » grâce à la correspondance soutenue qu’il entretient avec son ami, le docteur Fliess. Dans sa correspondance avec Wilhelm Fliess, figure son texte Esquisse d’une psychologie scientifique, qu’il a écrit entre 1895 et 1896, et dans lequel se trouvent les fondements de sa pensée. A cette époque, il s’intéresse également aux cas de paranoïa, sujet sur lequel il échange avec Fliess.

Au cours de son auto-analyse, il met progressivement en évidence, à partir de ses propres souvenirs et de ses propres rêves, le principe de refoulement, le complexe d’Œdipe, la théorie du transfert, puis, celle de l’interprétation des rêves avec un ouvrage éponyme, qui paraît en 1900.

Il y décrit pour la première fois le concept d’association libre, l’un des principes fondamentaux de la psychanalyse. L’idée : le patient doit exprimer spontanément tout ce qui lui passe par l’esprit.

En 1902, Freud est nommé professeur titulaire à l’université de Vienne. Trois ans plus tard, il publie le Cas Dora, la première narration d’une analyse, ainsi que Trois essais sur la théorie sexuelle, dans lesquels il expose sa théorie sur la place de la sexualité dans le développement de la personnalité.

La théorie freudienne s’exporte

Autour de lui, se forme un groupe de sympathisants, dont Carl Gustav Jung, psychiatre et essayiste suisse, fondateur de la psychologie analytique. Les deux hommes se rencontrent en 1907 et entretiennent une correspondance.

En 1910, lors du premier Congrès international de psychanalyse, est créée l’Association psychanalytique internationale, présidée par Carl Gustav Jung, qui fait suite à la Société psychologique du Mercredi.

Très vite, des divergences apparaissent entre Jung et Freud. Jung remet en cause l’approche analytique et l’élaboration freudienne de la structure de l’inconscient. En 1913, ils se séparent.

Cette séparation ne sera pas la seule. Sándor Ferenczi est un neurologue hongrois, dont la pensée se fonde sur le déni des traumatismes infantiles et les blessures de l’enfance. Il rencontre Freud en 1908, à Vienne. Ils deviennent très vite amis, bien que leur relation ne soit pas équilibrée : Freud a l’ascendant sur Sándor Ferenczi. La volonté de ce dernier de remonter aux origines du trauma, alors que Freud à délaisser la réalité pour s’intéresser au fantasme, va les éloigner. La création du concept va marquer la rupture définitive entre Sándor Ferenczi et les autres membres du mouvement psychanalytique.

A la même époque, la psychanalyse s’exporte outre-Atlantique, quand Freud est invité par le professeur Stanley Hall, philosophe et psychologue à la Clarck University, aux Etats-Unis. Et fait de nombreux adeptes.

En 1920, Freud écrit Au-delà du principe de plaisir. Un autre ouvrage majeur qui théorise les pulsions de mort (Thanatos) et de vie (eros) qui cohabitent dans chaque être, défini par le Moi, le Ca, et le Surmoi.

Dates clés

6 mai 1856 : naissance à Freiberg, en Moravie, dans l’Empire d’Autriche-Hongrie (aujourd’hui Pribor, en République tchèque), de Sigismund Schlomo Freud. 1860 : la famille Freud emménage à Vienne, en Autriche.

1876-1882 : suit des études de biologie et de physiologie.

1885-1886 : séjour à Paris dans le service du professeur Jean Martin Charcot, à l’hôpital de la Salpêtrière.

1886 : épouse Martha Bernays et s’installe comme médecin à Vienne.

1895 : naissance d’Anna Freud.

1897 : commence son autoanalyse et invente le complexe d’Œdipe.

1910 : création de l’Association psychanalytique internationale.

1913 : rupture avec Carl Gustav Jung.

1923 : découverte de son cancer.

1938 : exil en Grande-Bretagne.

23 septembre 1939 : meurt à Londres d’un cancer de la mâchoire.

<p>illustration de la conceptualisation de l'inconscient par Freud avec une femme face à une serrure donnant sur son inconscient</p>
crédit photo : @Shutterstock

Qu’est-ce que Freud a découvert ?

Le nom de Freud est associé à de nombreux concepts : la psychanalyse, l’inconscient, le complexe d’Œdipe, le transfert, la pulsion de mort, la sexualité infantile… Faisons le point sur les découvertes les plus marquantes de Freud.

Pourquoi Freud est-il célèbre ?

La plus grande découverte de Freud, c’est l’inconscient. Ou plutôt, il n’a pas découvert l’inconscient mais l’a conceptualisé. En d’autres termes, il a rendu ce concept plus facile à appréhender. C’est à cette notion de la psychanalyse que l’on associe aujourd’hui le nom de Freud.

L’inconscient selon Freud est le lieu des représentations refoulées. C’est le lieu où sont refoulées nos pulsions, nos souvenirs, nos désirs, tout ce qui nous fait honte ou qui nous angoisse. C’est cette « autre scène » de notre appareil psychique où se joue notre existence, et qui détermine la direction de notre vie avant même notre volonté. L’inconscient est aussi bien issu de l’histoire humaine et de notre bagage génétique que de notre histoire personnelle.

Les sentiments refoulés tentent de sortir de notre subconscient pour revenir à l’état de la conscience. Ils se manifestent dans les lapsus, les rêves, ou encore les actes manqués. Comme la partie submergée d’un iceberg, l’inconscient est bien plus grand que le conscient. Il est donc incontrôlable par l’homme.

Sexualité infantile et sublimation : les autres concepts de Freud

Une autre découverte importante de Sigmund Freud est la sexualité infantile. Ce serait, pour le médecin, la clé de la compréhension de la sexualité adulte et des névroses. Dès les premiers âges, des pulsions sexuelles seraient présentes chez l’enfant. Cette théorie a été beaucoup critiquée, surtout dans les années de Freud, dans un contexte ultra-puritain.

De ses travaux sur l’inconscient et sur la sexualité ont découlé d’autres concepts dont on parle encore aujourd’hui, comme la sublimation, définie dans son ouvrage Trois essais sur la théorie sexuelle. C’est la transformation de la pulsion sexuelle en une activité artistique.

Quel est le courant de pensée de Freud ?

Le courant philosophique de Freud, c’est encore une fois l’inconscient, qu’il a placé au cœur de ses recherches et de ses théorie sur l’appareil psychique. C’est en se basant sur le concept d’inconscient que Freud a mis au point ses méthodes thérapeutiques, dont la cure psychanalytique.

Quelle est la théorie de Freud ?

La théorie psychanalytique  de Freud tente de cartographier l’appareil psychique de l’homme. Pour cela, il a proposé deux modèles ou topiques.

Dans sa première topique, le psychanalyste différencie trois systèmes :

  • L’inconscient
  • Le préconscient
  • Le conscient

Dans sa seconde topique, il décrit trois instances qui peuvent se superposer à ces systèmes :

  • Le ça : c’est la partie chaotique de l’appareil psychique, où les pulsions font la loi. Cette instance est complètement inconsciente.
  • Le moi : c’est le siège de la personnalité. Avec une partie consciente et une partie inconsciente, le moi est un peu un entre-deux. Il cherche à trouver un compromis entre les pulsions du ça (le principe de plaisir) et les interdictions du surmoi (le principe de réalité).
  • Le surmoi : issue du Complexe d’Œdipe, cette instance a intériorisé les interdits comme l’inceste, ainsi que les lois et normes sociales. Il est protecteur mais peut aussi se montrer cruel et sadique. C’est cette instance qui fait des hommes des êtes sociaux car elle s’assure que les pulsions du ça ne soient pas immédiatement assouvies.

Qu’est-ce que la théorie des pulsions ?

Au cœur de la théorie freudienne, on trouve un concept fondamental qui est celui des pulsions. Sigmund Freud a d’abord différencié deux types de pulsions :

  • Les pulsions d’auto conservation, qui répondent au principe de réalité et soutiennent la survie de l’individu
  • Les pulsions sexuelles, qui sont, elles, au service de la survie de l’homme en tant qu’espèce. Liées au principe de plaisir, elles soutiennent la procréation.

Plus tard, Freud a réuni ces deux pulsions sous le concept de pulsion de vie, et a distingué une troisième pulsion, qui s’y oppose : la pulsion de mort. La pulsion de mort se manifeste par des penchants agressifs et une volonté de puissance. Elle est tournée vers la destruction et l’autodestruction. La pulsion de mort nous maintient dans un état antérieur à la civilisation, celui de la barbarie.

illustration de l'interprétation des rêves par Freud avec une échelle menant à un nuage
crédit photo : @Shutterstock

Que dit Freud sur les rêves ?

Après avoir reçu son diplôme de médecin en 1881, Sigmund Freud a procédé à une analyse approfondie de la signification des rêves. Selon lui, le rêve a pour principal but d’assurer la poursuite du sommeil. Pour ce faire, l’être humain va simuler la concrétisation de ses désirs.

Dans son ouvrage intitulé « Sur le rêve », le neurologue autrichien affirme que le rêve ne procure aucune conclusion sur la réalité. Nos rêves, mêmes les plus cauchemardesques, sont simplement un moyen de résoudre les événements qui nous traumatisent au quotidien.

Le psychanalyste assure également qu’il s’agit d’une forme de maîtrise psychique approfondie. Freud associe de ce fait les rêves à deux symptômes.

  • d’un côté, l’aspect primitif est en rapport avec la tendance à la répétition ;

  • de l’autre, la forme de gardien qui accorde une domination au principe de plaisir.

Dans tous les cas, il est clair que pour Freud, les rêves n’ont aucun lien avec l’expérience de la vie réelle.

Malaise dans la civilisation : l’un des écrits les plus importants de Freud

Parmi les ouvrages les plus célèbres de Sigmund Freud figure « Malaise dans la civilisation ». Dans ce livre paru en 1929, le psychanalyste partage ses idées concernant les liens entre l’Homme et la mort. Selon lui, la mort est une proposition qui vise à réaliser un aspect de notre existence, nous poussant à réaliser un objectif précis.

Parmi les questions formulées figurent celles liées à la foi. Toujours selon l’auteur, la mort amène l’individu à se remettre en question au sujet de ses croyances religieuses liées à la vie éternelle.

Comment Freud définit la psychanalyse ?

En 1923, Freud a donné la définition suivante de la psychanalyse :

« Psychanalyse est le nom :

  1. d’un procédé pour l’investigation de processus animiques, qui sont à peine accessibles autrement ;
  2. d’une méthode de traitement des troubles névrotiques, qui se fonde sur cette investigation ;
  3. d’une série de vues psychologiques, acquises par cette voie, qui croissent progressivement pour se rejoindre en discipline scientifique nouvelle. »

La psychanalyse, selon Freud, c’est donc explorer l’inconscient pour élucider des symptômes. Toutes les idées qui se présentent à l’esprit ont un sens, et c’est le rôle de la psychanalyse de trouver le sens caché et refoulé pour soigner les problèmes psychiques.

Freud a-t-il influencé Lacan ?

Jacques Lacan est un psychiatre français qui a décroché son diplôme de médecin après avoir réalisé sa thèse de doctorat dans les années 30. Il a notamment réalisé des études sur les cas de paranoïa. C’est dans ce contexte qu’il a été influencé par Sigmund Freud. En effet, Freud estime que les patients schizophrènes développent des symptômes de délire dans le but de se rétablir plus vite de la maladie. Selon le psychanalyste autrichien, il s’agit d’un procédé de guérison après le chaos. Il l’évoque notamment dans son ouvrage « Le président Schreber ».

De son côté, Lacan s’est penché sur le préconscient freudien pour mieux cerner ces cas de paranoïa. Il a ainsi retravaillé la dialectique du discours paranoïaque utilisé par Freud pour explorer les mécanismes de base de la psychose. C’est ainsi que Lacan a conclu qu’en prenant conscience de leurs délires, les paranoïaques ont appris à s’aimer eux-mêmes. Il a également apporté une autre interprétation au cas du Président Schreber, et s’est ainsi éloigné de celle proposée par Freud.

D’Anna Freud à aujourd’hui : l’héritage de Freud continue à vivre

Aussi critiqué qu’il a été, Freud a apporté beaucoup à la psychanalytique. Il a pavé la voie à toute une discipline psychiatrique et psychologique. Ses travaux ont servi de base à de nombreux médecins après lui, à commencer par sa fille Anna Freud. Aujourd’hui, l’Association psychanalytique internationale qu’il a fondée en 1910 rassemble des professionnels du monde entier, avec plus de 12 700 membres.

Bibliographie sélective de Freud :

  • Sur le rêve, 1901
  • Psychopathologie de la vie quotidienne, 1901
  • Cinq leçons sur la psychanalyse, 1910
  • Le Président Schreber, 1911
  • Malaise dans la civilisation, 1929