Iran-Israël : pour Netanyahou, Téhéran a franchi une «ligne rouge»

Après une escalade militaire sans précédent en Syrie entre Israël et l’Iran, nombre de pays appellent à la retenue. En contact avec toutes les parties, la Russie pourrait jouer un rôle majeur.

 Sur cette photo fournie par une agence du pouvoir syrien, des systèmes de défense aérienne syriens interceptent des missiles israéliens sur l’espace aérien de Damas.
Sur cette photo fournie par une agence du pouvoir syrien, des systèmes de défense aérienne syriens interceptent des missiles israéliens sur l’espace aérien de Damas. AFP/O/HO/CENTRAL WAR MEDIA

    Alors que la région est plus que jamais sous tension après le retrait américain de l'accord sur le nucléaire iranien, Israël a mené des raids aériens meurtriers contre des cibles présentées comme iraniennes en Syrie dans la nuit de mercredi à jeudi. Des représailles à des tirs de roquettes sur des positions israéliennes au Golan, a affirmé l'Etat hébreu.

    Si leur paternité iranienne de ces tirs était confirmée, ce serait une première contre des positions israéliennes depuis plusieurs décennies. La riposte israélienne est, elle, d'une vigueur exceptionnelle sur le sol syrien depuis le début de la guerre civile en 2011. Nombre de pays dont la France, l'Allemagne le Royaume-Uni et la Russie appellent à la retenue. L'Union européenne invite aussi à « éviter toute escalade ».

    • Netanyahou : l’Iran a franchi une « ligne rouge »

    Jeudi en fin de journée, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a accusé l'Iran d'avoir franchi une « ligne rouge », en tirant des roquettes vers Israël. « Notre réaction a été en conséquence. Tsahal (l'armée israélienne, ndlr) a mené une attaque de grande envergure contre des objectifs iraniens en Syrie », a déclaré dans une vidéo sur son compte Twitter en soulignant qu' « aucune » des roquettes n'avait atterri en Israël.

    « Nous ne laisserons pas l'Iran s'établir militairement en Syrie », a réaffirmé le Premier ministre dont c'était la première réaction publique après les dizaines de raids menés à l'aube par Israël. « Nous frapperons au centuple tous ceux qui nous attaqueront. Et nous agirons contre ceux qui se préparent à nous attaquer avant qu'ils passent à l'acte. C'est ce que nous avons fait et ce que nous continuerons à faire », a-t-il également prévenu. L'armée israélienne a elle assuré ne pas chercher l'embrasement, tout en se disant prête à tous les scénarios.

    • Rohani : «L’Iran n'est pas favorable à de nouvelles tensions»

    Dans un entretien téléphonique avec la chancelière allemande Angela Merkel, le président iranien Hassan Rohani a déclaré que «l'Iran n'est pas favorable à de nouvelles tensions dans la région». Sur la présence de « conseillers militaires iraniens en Syrie », il a ajouté que «le résultat du combat de l'Iran aux côtés des peuples syrien et irakien contre les terroristes de Daech, c'est qu'on a obtenu une relative stabilité en Syrie et une bonne stabilité en Irak, ce qui est dans l'intérêt de la région, du monde et de l'Europe». De son côté, le président de la Commission des Affaires étrangères du Parlement iranien Allaeddine Boroujerdi a condamné l'attaque israélienne. Selon lui, «Israël est entré dans un jeu dangereux».

    • Paris demande à Téhéran de « s’abstenir de toute provocation »

    La France « demande à l'Iran de s'abstenir de toute provocation militaire et le met en garde contre toute tentation d'hégémonie régionale », a indiqué la porte-parole du Quai d'Orsay. Elle a rappelé son « attachement indéfectible à la sécurité d'Israël ». Paris « souligne la nécessité que toutes les parties fassent preuve de retenue afin d'éviter une escalade dangereuse des tensions au Moyen-Orient », selon le communiqué. « C'est la raison pour laquelle, comme le président de la République l'a annoncé, elle souhaite notamment que s'ouvre une négociation avec l'Iran dans un cadre plus large incluant ses activités nucléaires et son programme balistique ainsi que la solution des crises dans la région », poursuit le communiqué. D'Aix-la-Chapelle (Allemagne), Emmanuel Macron et Angela Merkel ont en parallèle appelé à la « pondération » et à la « désescalade dans la région ».

    • La Russie en médiatrice

    Intervenant majeur en Syrie en soutien au régime de Damas, Moscou a pris contact avec toutes les parties. Mercredi, avant les frappes, Vladimir Poutine avait évoqué la situation avec le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, alors qu'existe un mécanisme d'échange entre les deux états-majors. Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov avait mis en garde contre « toute action qui pourrait se révéler provocatrice de part et d'autre ». Le ministre britannique des Affaires étrangères, Boris Johnson a ainsi appelé la Russie à « user de son influence » sur les combattants présents en Syrie pour faire cesser ces actions « déstabilisatrices » et pour « travailler à un règlement politique » de la situation. Membre du Conseil de sécurité de l'ONU donc signataire de l'accord sur le nucléaire iranien, la Russie a annoncé jeudi son « étroite collaboration » avec l'Iran pour la sauvegarde du texte signé en 2015.

    • L’UE: « Des informations extrêmement préoccupantes »

    « Les informations sur les attaques iraniennes contre des positions de l'armée israélienne à partir de la Syrie auxquelles Israël a répondu par des frappes contre des cibles iraniennes en Syrie sont extrêmement préoccupantes », affirme un porte-parole des services de la cheffe de la diplomatie européenne Federica Mogherini. «Comme l'UE l'a dit à plusieurs reprises, Israël a le droit de se défendre. Dans le même temps, nous appelons tous les acteurs de la région à faire preuve de retenue et à éviter toute escalade, qui pourrait saper un peu plus la stabilité de la région », poursuit-il

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    / AFP/O/HO/CENTRAL WAR MEDIA
    • Damas : une « nouvelle phase » de la guerre en Syrie ?

    Ce pourrait être une « nouvelle phase » dans la guerre ravageant la Syrie depuis sept ans a estimé Damas. « Cette attitude belliqueuse de l'entité sioniste ne fera qu'exacerber les tensions dans la région et menacer, par conséquent, la paix et la sécurité internationales », a poursuivi le ministère syrien des Affaires étrangères.

    • Washington soutient « le droit d’Israël à agir pour se défendre »

    Sans surprise, les Etats-Unis ont dénoncé jeudi les tirs de roquettes iraniens sur des positions israéliennes, en soutenant « le droit d'Israël à agir pour se défendre ». Ils jugent le déploiement par le régime iranien de systèmes de missiles et de roquettes offensives en Syrie « inacceptable et très dangereux pour tout le Moyen-Orient ». « Nous appelons les Gardiens de la révolution iraniens, ainsi que leurs milices par procuration, y compris le Hezbollah, à ne pas aller plus loin dans la provocation », a ajouté la Maison Blanche, faisant allusion au mouvement chiite libanais qui a été renforcé lors des toutes récentes législatives. Washington a annoncé des sanctions contre un réseau de financement des Gardiens de la révolution, à travers des transferts de devises entre les Emirats arabes unis et l'Iran.

    • L’ONU appelle à l'arrêt immédiat des « actes hostiles »

    Le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres, a appelé jeudi à « un arrêt immédiat de tous les actes hostiles et provocations afin d'éviter une nouvelle conflagration » au Moyen-Orient. Il a demandé également au « Conseil de sécurité de rester activement saisi » du dossier syrien, qui doit aboutir à « une solution politique », et « à assumer ses responsabilités » en vertu de la Charte des Nations unies, alors qu'aucun des 15 pays membres du Conseil de sécurité ne semblait en voie de demander une réunion d'urgence.