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Hubert Boukobza, le dernier tenancier des nuits parisiennes

Hubert Boukobza sur le plateau de Salut Les Terriens de Canal+ Hubert Boukobza sur le plateau de Salut Les Terriens de Canal+

DISPARITION - L'ancien patron de la mythique boîte de nuit parisienne Les Bains Douches est décédé dans la nuit du 7 au 8 mai.

Dans la nuit du 7 au 8 mai, Hubert Boukobza, l'un des rois de la nuit parisienne des années 1980, est mort. L'ancien patron de l'historique boîte de nuit Les Bains Douches et plus tard du Palace s'est éteint à 67 ans. Son frère, Félix Boukobza, a précisé: «Il est mort dans la nuit à son domicile parisien.»

Avec sa voix d'outre-tombe et son charisme incontestable, Hubert Boukobza faisait partie des figures de la nuit parisienne. C'était l'époque des tenanciers-stars. Ils incarnaient leur lieu. On allait voir Jean-Marie Rivière à l'Alcazar, Fabrice Emaer au Palace et Hubert Boukobza aux Bains.

Dans une première vie, ce Tunisien séfarade avait possédé des restaurants dans le quartier Saint-Michel de Paris. «Il rachetait des pizzerias et les transformait en restaurants grecs. Il peignait les murs en bleu, changeait la carte et le tour était joué», nous confie son ami de l'époque Thierry Ardisson.

Il prend la direction des Bains Douches au début des années 1980 et vit alors ses trente glorieuses. Décorée par Philippe Starck, la discothèque de la rue du Bourg l'Abbé qui compte pour attraction une petite piscine est l'endroit incontournable pour s'y montrer. «C'était un véritable lieu de perdition avec un cérémonial digne de la cour de Louis XIV ou des salons mondains de Proust», rappelle Thierry Ardisson. Les clients sont souvent déguisés et les thèmes de soirée hauts en couleurs. La journaliste Marie Ottavi décrit avec justesse ce club, métonymie de l'époque, dans la biographie de celui qui fut la muse de Karl Lagerfeld et grand noceur, Jacques de Bascher : «Le son y est rock et new wave, et la porte autrement plus complexe à franchir. À l'aube des années 1980, Paris est l'un des meilleurs spots du monde pour s'amuser et une ville encore abordable. Son esprit bohème et son effervescence attirent de nombreux artistes et créatifs venus de l'étranger.»

La discothèque accueille alors la jet-set et le show-biz: d'Andy Warhol à Mel Gibson, en passant par Basquiat, Prince, Mick Jagger, Madonna, Jack Nicholson, Robert De Niro, Leonardo DiCaprio, sans oublier les mannequins stars. Comme toujours dans ces endroits interlopes, les lieux les moins vus, sont les plus prisés. Thierry Ardisson se souvient surtout du bureau du patron Boukobza où les personnalités défilaient. Et des stupéfiants que l'on pouvait y consommer. L'animateur aime alors tellement Les Bains qu'il y installe une de ses émissions mythiques, Bains de minuit. C'est d'ailleurs après une nuit blanche aux Bains que Thierry Ardisson se mariera avec comme témoin… Hubert Boukobza. Apeuré par l'héroïne et les excès, Ardisson s'éloigne de celui qui se rapproche alors de Jean-Luc Delarue. Tous deux ouvriront un restaurant branché rue Marbeuf dans le quartier des Champs-Elysées: le Korova. On y servait du poulet au Coca-Cola et l'animateur vedette y laissera des plumes.

Les trente glorieuses Boukobza s'arrêtent à la fin des années 2000. Au cours de sa vie, il aura tout de même fait un passage en prison et perdu beaucoup d'amis - clients fauchés par le sida et la drogue. La fête est finie. Le monde de la nuit est un monde brutal, une bulle qui flotte. Mais quand elle éclate, certains retombent sur leurs économies et d'autres, plus cigales comme lui, refusent d'atterrir tant la chute serait dure. «Il allait toujours jusqu'au bout et se comportait comme une rock star! Mais quand on a vu autant de lumières, tout devient fade ensuite!», ajoute Thierry Ardisson.

Hubert Boukobza était en proie à des ennuis de santé et financiers depuis qu'il avait été débarqué des Bains en 2010. C'était trop dur. Sa boîte est même devenue un hôtel. Certes, on y trouve toujours une piscine et une piste de dance mais «l'esprit bohème et son effervescence» ont disparu. Ce qui faisait dire à un Hubert Boukobza ironique dans Libération: «Avant, on venait aux Bains pour vivre sa nuit. Maintenant, on viendra pour y dormir».

(avec AFP)

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