La croix, l'étoile de David et le croissant, symboles des trois religions monothéistes, le christianisme, le judaïsme et l'islam

"La loi de 1905 est d'abord une loi protectrice de la liberté absolue de conscience."

afp.com/THOMAS COEX

Une hystérisation inquiétante du débat menace la laïcité dans notre pays qui en est pourtant le berceau.

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D'aucuns voudraient nous faire croire que ce phénomène provient d'une radicalisation des militants laïques, dont je suis. Or à ce stade, aucune manifestation n'est organisée dans notre pays pour restreindre les libertés religieuses (ce qui, par parenthèse, ne serait pas conforme à la loi de 1905) et, a fortiori, aucun laïque ne s'est jamais fait sauter aux abords d'un lieu de culte en psalmodiant un discours de Clemenceau. Chacun pourra en convenir aisément.

En réalité, ce qui est hélas à l'oeuvre est un double mouvement.

D'une part, un mouvement de sécularisation. Il concerne toutes les religions et provoque un raidissement des franges les plus extrémistes de chacune d'entre elles.

Ce phénomène s'incarne en France, certes sur des plans très différents, à la fois par les manifestations des traditionalistes catholiques contre la loi sur le mariage pour tous, à la fois par les attentats commandités par Daech.

Le coup double du FN

Dans un cas comme dans l'autre, et même si les modalités ne peuvent être comparées, c'est la démocratie qui est visée, la liberté du peuple souverain de vivre selon des lois qu'il se donne à lui-même à travers les délibérations de représentants démocratiquement élus sur la base de programmes politiques et non sur la foi de dogmes issus d'une vérité révélée.

D'autre part, le terme de laïcité a été dévoyé par le Front national depuis le moment où l'ancien numéro 2 de ce parti tentait de "républicaniser" le discours de sa présidente, laquelle s'est accommodé de cela : il était habile de dissimuler sous le vocable valorisant de "laïcité" des visées pourtant diamétralement opposées à ce principe. Ce faisant, le FN faisait coup-double : ce parti d'extrême-droite maquillait son rejet de l'Islam tout en décrédibilisant aux yeux de nombre de nos concitoyens un principe républicain essentiel.

Force est de constater, au moment d'écrire ces quelques lignes, que ce double mouvement connait hélas une forme de succès qui, je l'espère, ne sera pas durable.

Les partisans de la loi de 1905 se trouvent en effet pris en étau par les discours et les actes de ceux qui veulent mettre en avant leurs identités particulières, religieuses en l'occurrence, contre ceux qui recherchent chez leurs concitoyens ce qui forge le commun, dans une démarche républicaine.

Je suis de ceux-là et ce que je constate est à la fois affligeant et inquiétant.

Cette pratique religieuse est faite d'intolérance

Le simple fait de rappeler les règles qui nous permettent de vivre en bonne intelligence en France depuis plus de cent ans nous vaut insultes et quolibets.

Les uns nous qualifient de "laïcards" et de "laïcistes", reprenant -volontairement ou non- des vocables forgés par l'extrême-droite cléricale opposée à la loi de 1905. Leur discours prend d'ailleurs de plus en plus une coloration concordataire pour le moins surprenante...

D'autres tentent de faire porter sur nous l'accusation infamante d'islamophobie. Ce faisant, non seulement ils tombent, à dessein ou non, dans le piège identitaire tendu par le FN, mais ils démontrent en outre, à mon sens, à quel point leur pratique religieuse est faite d'intolérance, refusant tout débat sur la religion même, ce qui est le signe de la radicalisation.

Un universitaire spécialiste des idées politiques peut même être inquiété, menacé, voué aux gémonies pour le seul fait de rappeler l'esprit et la lettre de la loi de 1905. Ceci évidemment inadmissible.

Un rapport apaisé chez l'immense majorité

Dans la responsabilité que me confère mon mandat de député, dans ce contexte où notre pays est régulièrement frappé par des actes terroristes, je veux en appeler au calme sur cette question.

L'immense majorité de nos concitoyens ont un rapport apaisé à la religion, qu'ils en pratiquent une ou qu'ils n'en pratiquent aucune, ce qui est le cas de la grande majorité d'entre nous.

La loi de 1905 est d'abord une loi protectrice de la liberté absolue de conscience, laquelle, je le rappelle, englobe la liberté de ne pas croire, celle de croire comme celle de changer librement de religion ou de s'émanciper d'une religion sans en être inquiété pour autant.

Cette liberté de conscience est notre bien le plus précieux en ce qu'elle conditionne toutes les autres libertés.

Député, c'est elle qui me permet de légiférer en ayant en tête la recherche de l'intérêt général, sans être soumis aux intérêts particuliers divers et variés.

C'est pourquoi je compte continuer à défendre et à faire vivre la liberté absolue de conscience et la laïcité qui la protège, avec calme, sérénité et fermeté.

François Cormier-Bouligeon, député du Cher, membre du groupe La République en Marche

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