[Mis à jour le 5 juillet 2018] Plusieurs associations environnementales ont déposé, ce jeudi 5 juillet, un recours devant le tribunal administratif de Marseille contre l'autorisation préfectorale de la bioraffinerie de Total à la Mède, dans les Bouches-du-Rhône. En mai dernier, le ministre de la Transition écologique et solidaire avait autorisé le lancement du projet qui fait polémique car il prévoit de s'approvisionner largement en huile de palme, responsable de déforestation.

[Mis à jour le 5 juillet 2018] Les Amis de la Terre, Greenpeace France, France Nature Environnement et la Ligue de Protection des Oiseaux PACA ont déposé ce jeudi 5 juillet un recours au tribunal administratif de Marseille contre l’autorisation préfectorale de la raffinerie de Total à La Mède.
"Total a réussi à enfumer le gouvernement avec une étude d’impact environnemental tronquée et la promesse de certifications controversées. Loin de réduire les émissions de gaz à effet de serre, ce projet va au contraire accélérer la déforestation et donc les changements climatiques. Cette réalité ne peut pas être ignorée par le juge administratif" estime Sylvain Angerand des Amis de la Terre.   

Feu vert de Nicolas Hulot
Le ministre de la Transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, avait autorisé mercredi 16 mai la reconversion de la raffinerie pétrolière de la Mède, dans les Bouches-du-Rhône. Elle deviendra une usine de production de biocarburant, à partir d’huiles végétales telle que l’huile de palme et d’huiles alimentaires usagées. Une alternative aux carburants fossiles émetteurs de CO2, mais aussi un facteur de déforestation. 
"Je demande à Total de réduire la part d’huile de palme et d’augmenter la part d’huiles usagées", avait alors déclaré le ministre de la Transition écologique. "Mais on ne peut pas avoir tout du jour au lendemain". "Je ne peux pas leur demander, alors qu’ils ont fait ces efforts et ces investissements (275 millions d’euros, NDLR), de renoncer", a ajouté le ministre, indiquant que Total avait fait ces transformations à la demande du gouvernement précédent, alors que le secteur du raffinage a souffert de nombreuses fermetures de sites dans l’Hexagone. 
Renoncement
Cette autorisation était apparue comme un renoncement de la part du ministre de la Transition écologique. Il avait inscrit dans son plan climat la volonté de mettre fin à l’importation de produits contribuant à la déforestation d’ici 2030. Or, pour fonctionner, la bioraffinerie de la Mède s’approvisionnera à 50 % en huile de palme, soit environ 300 000 tonnes par an. Total a reçu une autorisation d’importer jusqu’à 450 000 tonnes d’huiles végétales brutes. 
La production de cette huile participe à la déforestation et fragilise les écosystèmes dans les pays producteurs, en particuliers la Malaisie et l’Indonésie. Les graisses animales, huiles alimentaires usagées et huiles résiduelles compteraient pour 30 à 40 % de l’approvisionnement et les autres huiles végétales (colza, tournesol, soja) pour 10 à 20 %, selon un communiqué publié par le pétrolier.
"En ce qui concerne les critères de durabilité de l’huile de palme brute, Total s’est engagé à promouvoir un label de certification durable de hautes qualités auprès de l’Union Européenne. (L’entreprise) a mis en place une équipe dédiée qui s’assurera du respect par l’ensemble de la chaîne logistique des critères de durabilité, et en particulier que l’approvisionnement soit issu de producteurs certifiés RSPO (Roundtable on Sustainable Palm Oil)", indique la major.
Un problème de certification en Europe
Cela ne convainc pas Sylvain Angerand, coordinateur des campagnes pour les Amis de la Terre France. "Total évoque maintenant un plafonnement à 300 000 tonnes d’huile de palme brut, ce qui est colossal", s’indigne-t-il. "Total deviendrait le premier importateur français. Or, aucune certification ne peut garantir que ce projet n’entraînera pas de déforestation comme l’a reconnu la Cour des Comptes Européennes. Il y a d’autant plus de risques que Total refuse de rendre public son plan d’approvisionnement détaillé."  
Dans un rapport publié en 2016, la Cour des Comptes européenne a en effet estimé que "le système de certification de la durabilité des biocarburants de l’Union européenne n’est pas totalement fiable en raison de faiblesses dans la procédure de reconnaissance de la Commission, et dans la supervision des régimes volontaires reconnus."   
"Le sens de l’Histoire, c’est que l’on va, au niveau européen, arrêter d’importer de l’huile de palme dans les années qui viennent", a toutefois déclaré Nicolas Hulot sur BFMTV/RMC. Une façon implicite pour le ministre de marquer son désaccord avec le projet porté par Total.
Concepcion Alvarez, @conce1

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