« Nous allons devoir réécrire les manuels d’astrophysique. » C’est avec ces mots que Claude Catala, directeur de l’Observatoire de Paris a présenté la deuxième tranche des résultats du satellite Gaia, dévoilée mercredi 25 avril 2018. En effet, c’est un inestimable trésor que livre le satellite à toute la communauté des astrophysiciens : jamais auparavant elle n’avait disposé d’une telle masse de données concernant notre galaxie, la Voie lactée : la position de 1,7 milliard d’étoiles avec leur brillance et le mouvement propre de 1,3 milliard d’entre elles, de 160 millions avec la température de surface, et une foule d’autres types d’informations, concernant par exemple 14.000 astéroïdes appartenant à notre propre système solaire. Cette gigantesque recension a servi à élaborer la carte 3D du ciel la plus précise à ce jour.
Là où le satellite Hipparcos était capable de voir un petit pois, Gaia parvient à distinguer un cheveu
Comme le précise François Mignard, de l'observatoire de la Côte d'Azur, "jusque-là les astrophysiciens s’appuyaient sur le catalogue du satellite européen Hipparcos, l’ancêtre de Gaia, qui avait déterminé le mouvement propre de 550.000 étoiles." Gaia vient de leur offrir près de 3000 fois plus, soit 1,3 milliard de mouvements stellaires. La précision des mesures a aussi fait un bond gigantesque : là où Hipparcos était capable de voir un petit pois parisien depuis Marseille, Gaia parvient à distinguer un cheveu.
D’ores et déjà à partir de ces données, la mission Gaia annonce que la Voie lactée comporte 120.000 étoiles comparables au Soleil, et que, au vu des mouvements des étoiles, "le disque de notre galaxie n’est pas à l’équilibre" comme l’a précisé David Katz, astronome à l’observatoire de Paris. Autre surprise : en mesurant la température et la luminosité des étoiles, le satellite vient de révéler, selon Carine Barbusiaux, de l’observatoire de Grenoble, "qu’il existe en réalité deux types d’étoiles naines blanches", ces étoiles petites et denses qui correspondent à un stade d’évolution ultime des étoiles ayant 8 à 10 fois la masse du Soleil. De quoi susciter une foule de questions en physique stellaire.
La collecte de Gaia continue
Depuis ce 25 avril à midi, heure à laquelle les données ont été rendues publiques, des équipes d’astrophysiciens sont à l’œuvre pour réécrire de larges pans de l’histoire du ciel à la lumière de ces mesures. Une série d'articles est déjà publiée et bien d'autres vont suivre. Mais sur son orbite, Gaia ne connaît pas de trêve : le temps de lire cet article et admirer sa carte, c’est à dire 5 mn à peine, le satellite a déjà envoyé 2 millions de pixels, correspondant aux coordonnées de 200.000 étoiles.. Son prochain bilan, sous forme d’un troisième catalogue, est attendu en 2020.