Afrique du SudZuma prié de rembourser ses caprices onéreux
Le président a été prié mercredi de rembourser l'amphithéâtre et la piscine que les contribuables sud-africains ont payés en même temps que les travaux de sécurité de sa résidence privée.

Ces dépenses étaient censées améliorer la sécurité de sa résidence personnelle.
Un sérieux revers à sept semaines des élections générales.
«Les dépenses engagées par l'Etat (...) vont au-delà de ce qui était raisonnablement nécessaire pour la sécurité du président», a sobrement résumé la médiatrice Thuli Madonsela, chargée de veiller à la bonne gestion des fonds publics. Son rapport, rendu public mercredi, était d'autant plus attendu en Afrique du Sud que le gouvernement avait tout fait pour en empêcher la publication.
Très dure, elle a relevé qu'un certain nombre d'aménagements réalisés chez M. Zuma n'avaient rien à voir avec sa sécurité, citant un centre d'accueil des visiteurs, un amphithéâtre, un enclos pour le bétail, un poulailler, une piscine...
Plus généralement, elle a jugé «exorbitants» ces travaux de 246 millions de rands (16,5 millions d'euros) qui ont également concerné l'aménagement d'un héliport, d'un dispensaire, de maisons pour les gardes... sans parler du déménagement manu militari --inconstitutionnel, car sans décision de justice-- de voisins. Une dépense sans commune mesure avec ce à quoi avaient eu droit les précédents présidents sud-africains, Nelson Mandela compris.
«La mise en oeuvre du projet Nkandla donne l'impression d'une sécurité excessive et déraisonnable, Rolls Royce , constituant un îlot dans un océan de pauvreté où les infrastructures publiques sont rares», a-t-elle sèchement jugé dans son volumineux rapport titré «En sécurité en tout confort».
«Le président a excessivement bénéficié de cet énorme investissement», a souligné la médiatrice, qui avait été appelée à ouvrir une enquête en 2012 après que Jacob Zuma eut dit devant le Parlement que sa famille avait payé les installations personnelles.
Somme à déterminer
Conclusion: Jacob Zuma doit «rembourser un pourcentage raisonnable des coûts», la somme devant être déterminée avec le Trésor.
«La façon dont le projet a été mené m'a donné l'impression d'une concoction toxique de manque de leadership, de manque de contrôle et de concentration sur ses propres intérêts», a-t-elle encore asséné.
Mme Madonsela a également demandé à Jacob Zuma de «réprimander les ministères pour la manière épouvantable avec laquelle le projet Nkandla a été géré», parlant d'«abus de fonds publics» et s'inquiétant de l'impressionnante escalade des coûts du chantier présidentiel.
Les travaux ont été en partie financés par des fonds du ministère des Travaux publics initialement destinés à réhabiliter le centre historique de Durban (est).
Elle a relevé au passage que l'architecte de M. Zuma, Minenhle Makhanya, payé au pourcentage, a empoché 16,5 millions de rands (1,1 million d'euros), contre 400'000 initialement prévus.
Thuli Madonsela a donné au président Zuma quatorze jours pour rendre des comptes au Parlement.
Des chiffres embarrassants
Le gouvernement avait tout fait pour l'empêcher de rendre public son rapport, au motif notamment que la sécurité du chef de l'Etat pourrait être mise en danger, Nkandla ayant été déclaré «site stratégique». Il n'avait pas réagi mercredi après-midi.
L'opposition n'a en revanche pas attendu que Mme Madonsela termine la lecture de son interminable déclaration --elle n'avait pas fini au bout de trois heures-- pour appeler à la destitution de Jacob Zuma.
Son initiative n'a de toute façon aucune chance d'aboutir, l'ANC --le parti du président, au pouvoir depuis vingt ans--, disposant d'une confortable majorité dans un Parlement qui sera renouvelé le 7 mai.
Malgré Nkandla, Jacob Zuma devrait se succéder à lui-même sans problème à la tête de l'Etat, une majorité des Sud-Africains considérant encore avant tout que l'ANC les a libérés du régime raciste de l'apartheid. (ats)