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Stérilité, dépression, cancer… cinq idées reçues sur l’avortement

Stérilité, dépression, cancer… Les partisans de l’interdiction de l’IVG mettent en avant le risque de séquelles à vie, le plus souvent sans fondement.

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Publié le 24 mai 2018 à 16h30, modifié le 24 mai 2018 à 16h30
Des militantes en faveur de l’abrogation de l’amendement interdisant l’IVG manifestent à Dublin, le 23 mai, déguisées en personnages de la série « La Servante écarlate ».

« J’ai avorté, je pleure tous les soirs et je suis désormais stérile », « mon IVG m’a rendue dépressive », « je refuse d’avorter car je crains le cancer »… les témoignages – anonymes et négatifs – relayés par la page Facebook « IVG : vous hésitez ? Venez en parler » se suivent et se ressemblent. Cette page Facebook tenue par des militants contre l’interruption volontaire de grossesse (IVG), à laquelle nous avions consacré une enquête, propage nombre d’idées reçues et de fausses informations sur l’avortement. Alors que l’Irlande se prononce par référendum, vendredi 25 mai, sur l’abrogation d’un amendement à la Constitution interdisant l’IVG, nous avons recensé les plus répandues de ces idées reçues.

Idée reçue n° 1 : « L’avortement génère des troubles psychiques »

Faux

Le « syndrome post-avortement », fréquemment relayé dans l’argumentaire des anti-IVG, est une pure invention d’un militant pro-life américain dépourvu de toute qualification médicales, Vincent Rue. Selon ce dernier, les femmes ayant recours à l’interruption volontaire de grossesse seraient plus à même de développer dépressions, troubles anxieux et comportements à risque. Un argumentaire repris en écho par les sites opposés à l’avortement, qui avancent que cette intervention génère systématiquement « un sentiment profond de culpabilité, de honte et de ressentiment de la femme ».

Ces affirmations sont mises à mal par les études scientifiques sérieuses menées sur le sujet. Dans un rapport documenté sur le sujet, le docteur Laurence Esterle, directrice de recherche du CNRS, montre que les études établissant un lien entre avortement et troubles psychiques sont d’une qualité méthodologique « le plus souvent médiocre ». Des études sérieuses, comme celle publiée dans la revue Social Science & Medicine en 2008, qui prend notamment en compte les antécédents de dépression au sein de la cohorte des femmes suivies, ne démontrent aucune différence significative en matière de troubles psychiatriques entre les femmes ayant subi une IVG et celles n’en ayant jamais fait l’expérience.

Cet article fait partie d’une série d’idées reçues sur l’avortement

Idée reçue n° 2 : « L’avortement met en péril la fertilité des femmes »

FAUX

Selon les militants anti-avortement, l’IVG serait néfaste pour la santé reproductive des femmes et, dans de nombreux cas, les empêcherait de mener à terme une grossesse désirée. « L’IVG par aspiration peut endommager les organes de reproduction et provoquer des problèmes à long terme qui mettent en jeu de futures grossesses. Les femmes qui se font avorter sont plus susceptibles d’avoir des grossesses extra-utérines, des problèmes de stérilité, de faire des fausses couches ou des accouchements prématurés, que les femmes qui n’ont pas subi d’avortement », lit-on ainsi sur le site partisan IVG.net.

Des assertions contredites par un document émanant du Collège national des gynécologues et obstétriciens français, paru en 2016. Il est ainsi relevé que l’IVG instrumentale n’est pas associée à une augmentation du risque d’infertilité ultérieure. Les maux associés par les militants anti-IVG à l’avortement sont, eux aussi, écartés par la science. Le risque de décès est, en France, de l’ordre de moins de 1 femme pour 100 000, soit un chiffre largement inférieur au risque de décès lors d’un accouchement.

Cet article fait partie d’une série d’idées reçues sur l’avortement

Idée reçue n° 3 : « L’IVG augmente le risque de cancer du sein »

FAUX

Selon le site anti-avortement IVG. net, l’interruption volontaire de grossesse exposerait les femmes à des cancers du sein et… des poumons. « Probablement dû à une plus grande consommation de tabac en post-IVG », avance le site.

Pourtant, une étude de l’American College of Obstetricians and Gynecologists, publiée en 2009 et réaffirmée en 2018, met en évidence le fait que cette conséquence supposée de l’IVG relève de la légende urbaine. « Les études antérieures démontrant un lien entre avortement et cancer du sein étaient méthodologiquement biaisées », conclut le rapport, avant de rappeler que les études les plus récentes et rigoureuses n’avaient montré aucune relation causale entre avortement et augmentation du risque de contracter un cancer du sein.

En revanche, une étude de l’Organisation mondiale de la santé relayée sur le journal Lancet en septembre 2017 met en évidence la dangerosité de l’avortement pour les femmes dans les pays où ce dernier n’est pas autorisé. Si le pourcentage d’avortements considérés comme « sûrs » pour la santé de la femme s’élève à 97,9 % en Europe du Nord, il n’est que de 11,8 % en Afrique subsaharienne et de 18,4 % dans les pays d’Amérique centrale, farouchement opposés à l’avortement pour des raisons religieuses.

Les causes de ces disparités s’expliquent par le manque d’hygiène des avortements clandestins dans les pays où cette intervention n’est pas légale. Une étude du CEPED (centre population et développement, rattaché à l’INED) rapportait l’insertion dans le vagin d’objets tels que des rayons de vélo, des cathéters, du verre pillé ou des racines de plantes.

Cet article fait partie d’une série d’idées reçues sur l’avortement.

Idée reçue n° 4 : « L’IVG est pratiquée par des femmes qui n’utilisaient pas de moyens de contraception »

FAUX

Une idée répandue avance que les femmes ayant recours à l’interruption volontaire de grossesse le pratiquent comme « un moyen de contraception à part entière ». Cette idée va de pair avec la rhétorique de « l’avortement de confort », évoquée par la présidente du Front national, Marine Le Pen, lors de la campagne présidentielle de 2012.

Or, comme le relève l’Insee dans un rapport sur la contraception, paru en 2017, seules 3 % des femmes de 15 à 49 ans, ni enceintes ni stériles, ayant des rapports hétérosexuels et ne voulant pas d’enfants n’utilisaient pas de moyens de contraception. Un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) publié en 2009 relève que 72 % des IVG sont réalisés sur des femmes qui étaient sous contraception, et dans 42 % des cas, « cette contraception reposait sur une méthode médicale théoriquement très efficace », telle que la pilule ou le stérilet.

Cet article fait partie d’une série d’idées reçues sur l’avortement.

Idée reçue n° 5 : « L’IVG est avant tout pratiquée par de très jeunes femmes »

FAUX

Une idée tenace attribue l’interruption volontaire de grossesse à de très jeunes femmes, réputées « irresponsables » quant à leurs pratiques contraceptives. Une réalité mise à mal par les statistiques disponibles sur l’avortement, rendues publiques par la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) en juin 2017. Dans ce rapport, il est mis en évidence que seules 7 % des femmes ayant recours à l’IVG étaient âgées de 15 à 17 ans au moment de la procédure, quand 42 % étaient âgées de 25 à 40 ans.

Cet article fait partie d’une série d’idées reçues sur l’avortement.

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