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Vivre avec la céphalée de Horton, l'une des pires douleurs existantes

Une femme dans le noir avec sa main sur son oeil.

La céphalée de Horton cause des douleurs abominables aux personnes atteintes.

Photo : iStock

Radio-Canada

Un pieu qui s'enfonce dans l'oeil. Les mots utilisés pour décrire la céphalée vasculaire de Horton frappent l'imaginaire. Ce mal de tête, qui peut durer jusqu'à trois heures, est si douloureux qu'on le surnomme tristement « la migraine du suicide » en raison des personnes qui se sont enlevé la vie, incapables de vivre avec cette souffrance. Portrait d'une maladie méconnue.

Un texte d’Alix Villeneuve

« C’est extrêmement douloureux. [...] Personne ne peut imaginer une douleur comme ça. » Claude Poliseno est atteint de la forme chronique de céphalée vasculaire de Horton. Depuis deux ans, il doit endurer des crises toutes les semaines. Une douleur fulgurante qui attaque toujours une moitié du visage.

Celui qui travaillait dans un entrepôt a dû prendre une pause professionnelle, sur les conseils de ses médecins. Car après une crise, son corps est complètement épuisé. La douleur l’empêche de vivre normalement.

Avec cette maladie-là, la vie amoureuse, la vie sociale, c’est impossible pour moi. [...] Tu ne sais pas quand tu vas avoir une attaque. Juste sortir de la maison, c’est un risque. C'est l'enfer.

Une citation de Claude Poliseno

« C'est une douleur tellement horrible », témoigne Rémi Beaumier, qui souffre lui aussi de la forme chronique de la maladie depuis 5 ans. « Je faisais des crises toutes les semaines et je pouvais en faire deux dans la même journée. [...] Tu essaies de prendre des antidouleurs, tu essaies de prendre n'importe quoi, tu deviens anxieux. »

Pire qu’un accouchement

Si la maladie dont les deux hommes souffrent est rare, elle n’est pas inusitée. Une personne sur 1000 connaîtra au moins un épisode de crise au cours de sa vie. Trois fois plus d’hommes que de femmes en seront atteints.

« C’est réputé pour être une des douleurs les plus sévères que l’on peut rencontrer, du moins, en neurologie », explique Luc Marchand, neurologue au Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM). La douleur serait supérieure à celles d’un accouchement ou de pierres aux reins.

Il est fréquent que les personnes gémissent, se prennent la tête et se la frappe sur les murs pour atténuer leur souffrance. Sans médication, chaque crise peut durer plus d’une heure.

Ces épisodes sont si éprouvants qu’ils ont déjà poussé des individus à s'enlever la vie. Il s’agit toutefois d’un comportement de plus en plus rare, juge le neurologue du CHUM. De plus en plus, la médication réussit à aider les malades.

Un homme au visage crispé de douleur dans le noir.

Les médicaments pour contenir la douleur des maux de tête conventionnels sont sans effet dans le cas de ce type de céphalée.

Photo : iStock / Evgeniy Anikeev

Les crises surviennent dans la grande majorité des cas par épisodes. Une personne atteinte pourra vivre normalement pendant des mois, voire des années. Cependant, lorsque la céphalée de Horton se manifestera, les malades connaîtront des crises régulièrement pour une période allant de quelques semaines à quelques mois.

« Les chanceux auront des crises tous les deux jours. Mais ce n’est pas inhabituel que, quand les crises s’installent, ça aille jusqu’à huit par jours », explique Luc Marchand.

Une fois l’épisode de crise terminé, le patient peut généralement retourner à une vie normale… jusqu’au prochain épisode. Certains vont avoir la paix pendant quelques mois, d’autres, pendant des années. D’autres ne connaîtront qu’un seul épisode de crise au cours de leur vie.

La forme chronique, pour sa part, touche 1 patient sur 10.

Une maladie méconnue

De nombreuses personnes ignorent l’existence de la céphalée de Horton, ou encore banalisent la souffrance des maux de tête. Claude Poliseno peut en témoigner. En racontant son histoire, il s’est souvent fait prendre pour un charlatan ou quelqu’un en manque d’attention.

Si tu en parles à des gens, ils te regardent et ils disent : va donc raconter ta bullshit ailleurs.

Une citation de Claude Poliseno

Afin de sensibiliser les gens et de faire connaître leur condition, certaines personnes se filment en période de crise et mettent leurs vidéos sur YouTube. C'est le cas du Britannique Tim Mavers-Chance, qui a enregistré une de ses crises en 2015. Attention, ces images sont difficiles à regarder.

Une maladie souvent mal diagnostiquée

Comme il s’agit de crises sporadiques, le diagnostic est souvent difficile à établir. Des patients doivent parfois frapper à plusieurs portes avant de trouver la source de leur douleur, confirme le neurologue Luc Marchand.

« Vous commencez à faire des crises aujourd’hui et votre médecin vous recommande un spécialiste pour les maux de tête. Si le rendez-vous prend trois mois [à obtenir] et que votre bloc de crises dure deux mois, il y a des chances que vous n’alliez pas à votre rendez-vous si c’est la première fois que vous vivez un tel épisode », affirme-t-il.

Lors de sa première visite à l’hôpital, Claude Poliseno a été rapidement renvoyé chez lui. Lorsqu’il a finalement réussi à rencontrer un médecin, sa crise était alors terminée. Sans symptôme, son cas a été traité comme une migraine ordinaire.

« Le médecin m’a dit : "Écoutez Monsieur, ce n’est pas nécessaire de venir pour des maux de tête." »

On a supposé qu'il avait une infection dans le nez, un problème de nerfs ou même une douleur causée par ses dents. Sans réussir à le soulager.

C’est finalement en consultant le site Internet de Migraine Québec qu’il a appris l’existence de cette maladie. Un diagnostic qui a été confirmé ensuite en allant voir des médecins spécialistes.

Une maladie incomprise par la médecine

Les médecins s’expliquent mal pourquoi de tels maux de tête surviennent. Il pourrait s’agir d’un dysfonctionnement du rythme biologique dans l’hypothalamus, une partie du cerveau.

« On ne sait pas pourquoi l’hypothalamus permet le déclenchement des crises. On ne sait pas non plus pourquoi elles arrêtent », explique Luc Marchand.

Garder espoir

Rémi Beaumier, de Trois-Rivières, a eu rapidement le bon diagnostic après son passage à l’urgence de son hôpital, mais il a dû attendre un an avant de pouvoir rencontrer un neurologiste et obtenir les médicaments qu’il lui fallait.

Une photo de Remi Beaumier. é

Remi Beaumier de Trois-Rivières doit vivre avec la céphalée vasculaire de Horton. Heureusement pour lui, il réagit bien à la médication.

Photo : Facebook

Pour gérer ses crises, il raconte qu'il devait se déplacer à l’hôpital pour recevoir des traitements, notamment de l’oxygène. Lorsque consommé au début de la crise, l’oxygène pur permet d'en réduire considérablement la durée à une quinzaine de minutes environ.

Rémi Baumier conseille à tous ceux qui vivent une épreuve similaire de garder espoir, puisque des solutions existent une fois qu'on est pris en charge par un neurologue.

Il faut garder espoir parce qu’il y a des traitements qui fonctionnent, et quand on est pris en charge, il y a toute une panoplie de traitements qui vient diminuer le nombre de crises et leur intensité. C’est le jour et la nuit.

Une citation de Rémi Beaumier

Des médicaments pour soulager

Des médicaments, comme le sumatriptan ou le vérapamil, aident entre autres à atténuer la douleur et à faire cesser les crises. Certains peuvent même empêcher l’apparition d'attaques lorsqu’une période commence où la personne est plus à risque. Cette prévention est efficace pour la majorité des patients, affirment les médecins.

Malheureusement, des exceptions existent. Claude Poliseno a développé pendant un temps une résistance à la médication préventive. Il devait donc endurer ses crises quotidiennes équipées de son masque à oxygène et de sa bonbonne.

Une lueur d'espoir vient justement d'apparaître pour lui. Une nouvelle médication, récente de quelques jours, semble porter fruit; l'intensité de ses crises a diminué.

« Ça va de mieux en mieux », affirme-t-il avec soulagement, en espérant que cela dure.

L’organisme Migraine Québec tient des événements où plusieurs personnes atteintes de migraines et de céphalées peuvent se regrouper pour discuter et briser l’isolement.

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