Promotion du livre de Marlène Schiappa : la Cnil saisie par Anticor

    Une invitation à une dédicace pour la sortie du livre de la secrétaire d’Etat chargé de l’Egalité entre les femmes et les hommes a été envoyée à tous les journalistes par son cabinet.

     Marlène Schiappa publie les lettres qu’elle a écrites à ses filles au cours de ses déplacements.
    Marlène Schiappa publie les lettres qu’elle a écrites à ses filles au cours de ses déplacements. LP/Philippe Lavieille

      L'invitation a fait tiquer de nombreux journalistes, car il n'est pas courant qu'un cabinet fasse la promotion d'un livre d'un ministre. La semaine dernière, le cabinet du secrétariat d'État chargé de l'Égalité entre les femmes et les hommes a en effet envoyé aux médias une invitation à une dédicace à l'occasion de la sortie d'un livre de Marlène Schiappa.

      Le communiqué envoyé au journaliste par le cabinet de Marlène Sciappa.
      Le communiqué envoyé au journaliste par le cabinet de Marlène Sciappa. LP/Philippe Lavieille

      Dimanche soir, Anticor a réagi et décidé de « saisir le Premier ministre et la Commission nationale de l'informatique et des libertés ». L'association qui lutte contre la corruption publie sur son site les lettres qu'elle a adressées à Edouard Philippe et à la présidente de la Cnil Isabelle Falque-Pierrotin.

      « Le cabinet du secrétariat d'État chargé de l'Égalité entre les femmes et les hommes a envoyé, le 22 mai 2018, aux journalistes figurant dans son fichier presse, une invitation à une dédicace à l'occasion de la sortie d'un livre de Marlène Schiappa. Dans cet ouvrage, il est pourtant précisé que ce livre n'est ni une communication gouvernementale ni un bilan d'action politique, mais un récit purement personnel, partiel et parfois romancé. Les propos tenus ici n'engagent que leur auteure. »

      «Une maladresse qui ne se reproduira plus »

      « On a utilisé le fichier et les moyens de l'Etat. Cela pose un problème pénal, de détournement de finalité de fichier (délit passible de cinq ans d'emprisonnement et 300 000 euros d'amende), mais aussi un problème déontologique », explique Jean-Christophe Picard, président d'Anticor. Selon lui, le chef du gouvernement « doit a minima, rappeler à l'ordre et refixer les règles » pour que les ministres « n'utilisent pas leur fonction ou les moyens de l'Etat à des fins personnelles ».

      Le cabinet de Marlène Schiappa a reconnu lundi « une maladresse dans le transfert de l'invitation de l'éditeur à ses contacts », qui « ne se reproduira plus » et n'a eu « aucun impact sur les deniers publics ». « Cet événement s'inscrivait, malgré tout, dans la lutte pour l'Égalité entre les femmes et les hommes », a-t-il plaidé.

      Hommage appuyé à Emmanuel et Brigitte Macron

      Le livre de Marlène Schiappa fait décidément parler, mais peut-être pas dans le sens qu'aurait souhaité la secrétaire d'Etat. L'Obs a ainsi publié des extraits de l'ouvrage, ajoutant qu'ils mettent « mal à l'aise ».

      Dans « Si souvent éloignée de vous », la secrétaire d'Etat compile des lettres écrites à ses filles de 11 ans et 6 ans au cours de ses déplacements. Elle y écrit son admiration pour Emmanuel Macron mais également pour Brigitte Macron. Elle décrit ainsi l'épouse du chef de l'Etat : « bienveillance, la gentillesse, l'engagement et la classe naturelle, ses allusions artistiques, son humour ravageur et son sourire irrésistible de 'l'éternel féminin ».

      Mais surtout, l'hebdomadaire relève des phrases qui sonnent peu féministes. « Moi, j'ai pris la forme de manucure de ma tante Martine […], le parfum de ma grand-mère Andrée, les gestes tendres de mon arrière-grand-mère Mina […], la brosse pour se laver le visage de ma première belle-mère, la façon de ma mère de préparer le dîner […], et sans doute beaucoup trop de choses de mon père pour une femme. »

      Ces extraits sont beaucoup commentés sur les réseaux sociaux. Ils n'ont pas plu notamment à l'ancienne ministre Cécile Duflot. « On peut se dire qu'il y a encore du chemin pour que l'égalité femmes hommes progresse vraiment dans les têtes », écrit-elle sur Twitter.