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Bruxelles veut bannir les plastiques jetables

Gobelets, assiettes, pailles… La Commission européenne s’attaque aux produits à usage unique, responsables de près de 70 % des déchets marins.

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Publié le 29 mai 2018 à 06h41, modifié le 29 mai 2018 à 11h02

Temps de Lecture 4 min.

Les produits à usage unique en plastique représentent plus de 70 % de la pollution sur les plages européennes.

Pour la Commission européenne, plastique ne rime plus avec fantastique, et ce changement de paradigme devrait modifier sensiblement les habitudes de consommation des citoyens de l’Union européenne. Lundi 28 mai, dans le cadre de sa politique de réduction des émissions de carbone et de lutte contre l’invasion des mers et des océans par les déchets plastique, l’exécutif européen a rendu publique une proposition de directive visant à réduire « drastiquement » l’utilisation des produits en plastique à usage unique.

Coton-Tige, couverts et assiettes, pailles et mélangeurs de cocktails, tiges de ballons de baudruche… Ces produits du quotidien, qui, additionnés aux équipements de pêche abandonnés, représentent plus de 70 % des déchets marins en Europe, seraient ainsi interdits sous leur forme actuelle, et leurs fabricants contraints de les produire à l’aide de matériaux plus durables. Les récipients pour boisson à usage unique, eux, ne seraient plus autorisés que si leur couvercle ou leur bouchon y est attaché.

Alternatives durables

« Le plastique peut être fantastique, mais nous devons l’utiliser de manière plus responsable, a déclaré lundi Jyrki Katainen, un des vice-présidents de la Commission, dans un communiqué. Les propositions faites aujourd’hui aideront le commerce et les consommateurs à opter pour des alternatives durables. »

Dans cette série de mesures législatives figure également l’obligation pour les 28 Etats membres de réduire de façon « significative » la consommation de récipients alimentaires ou de boisson en plastique, dans un délai de six ans après la transposition de la directive, grâce à des objectifs nationaux de diminution de consommation, atteignables en utilisant des produits alternatifs ou en faisant payer les contenants actuels. D’ici à 2025, les pays membres devraient, par ailleurs, obligatoirement assurer la collecte de 90 % de leurs bouteilles en plastique à usage unique, grâce à un système de consigne par exemple.

Selon le principe du pollueur-payeur, les fabricants d’emballages de chips ou de bonbons, de gobelets, de filtres de cigarettes, de sacs plastique légers, devraient de leur côté contribuer à financer les coûts du traitement des déchets qu’ils génèrent. Et les fabricants de lingettes, de protections hygiéniques et de ballons de baudruche seraient tenus de détailler, sur les étiquettes de leurs produits, « le mode d’élimination des déchets, les effets néfastes du produit sur l’environnement et la présence de matières plastique ».

Enfin, les Etats membres auraient l’obligation de sensibiliser le public à l’impact négatif des plastiques à usage unique et du matériel de pêche, ainsi qu’aux dispositifs de réemploi et de gestion des déchets de ces produits.

Réduction des déchets à la source

La Commission, dont l’objectif est de rendre l’industrie du plastique circulaire et tous les emballages plastique recyclables à l’horizon 2030, estime que l’adoption et la mise en œuvre de la directive permettraient de réaliser, d’ici à cette date, une économie de 223 milliards d’euros sur les dommages environnementaux et d’éviter l’émission de 3,4 millions de tonnes d’équivalent CO2.

Selon Laura Châtel, chargée de campagne pour l’ONG Zero Waste France, la proposition de directive représente une « avancée à saluer ». « C’est la première fois qu’on présente une réglementation avec pour objectif la réduction des déchets à la source, et qu’on n’aborde pas la question du plastique sous le seul angle du recyclage qui ne sera pas suffisant », souligne la militante, qui appelle Paris à afficher une position « ambitieuse » dans les négociations à venir. « L’interdiction des boîtes de polystyrène pour la vente à emporter est inscrite dans la feuille de route sur l’économie circulaire présentée le mois dernier par le ministère de la transition écologique et solidaire, rappelle-t-elle. C’est le moment de la mettre en œuvre. »

Se félicitant de l’initiative de la Commission, Rethink Plastic, une coalition d’ONG en faveur d’un avenir sans plastique, dont Zero Waste est membre, regrette néanmoins que la proposition de directive ne fixe aucun objectif spécifique chiffré pour la réduction des emballages alimentaires et gobelets dans les Etats membres, risquant ainsi de les inciter à se contenter de faibles améliorations.

Pour sa part, l’industrie européenne du plastique estime que la Commission a raisonné par « raccourcis ». Dans un communiqué, PlasticsEurope a affirmé, lundi, que les déchets marins résultent plus particulièrement du « manque d’application de la législation liée à la gestion des déchets au niveau national et régional » et préconisé la mise en place d’infrastructures appropriées et l’interdiction des décharges.

Dossier prioritaire

La proposition de directive doit maintenant être discutée et amendée par les deux législateurs de l’UE – le Parlement européen et le conseil des ministres des Etats membres – dans les mois qui viennent. La Commission, qui souhaite la faire adopter avant le terme de son mandat en mai 2019, a enjoint ces instances de la traiter en « dossier prioritaire ». Une fois adoptées, ces règles entreraient en vigueur au plus tôt en 2022.

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« Les déchets plastique constituent indéniablement un dossier de premier ordre, a déclaré le premier vice-président de la Commission, Frans Timmermans, lundi. Les Européens doivent s’y attaquer de concert, car les déchets plastique finissent dans l’air que nous respirons, dans notre sol, dans nos océans et dans nos aliments. »

Chaque année, huit millions de tonnes de plastique finissent dans l’océan, décimant les espèces marines et les oiseaux, et affectant la chaîne alimentaire de l’homme, selon le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE).

Après l’entrée en vigueur d’une législation restrictive sur les sacs en plastique en mai 2015, près de trois Européens sur quatre indiquent une chute de 50 % dans leur consommation, selon l’Eurobaromètre. « Je crois que le changement de comportement chez nos citoyens est l’un des principaux facteurs pour nous emmener vers l’économie circulaire », a déclaré M. Timmermans.

L’île grecque de Sikinos a pris une longueur d’avance sur l’UE. Le 1er juin, cette destination touristique connaîtra son premier été sans pailles en plastique. La Fondation Laskaridis, qui promeut entre autres la recherche maritime, fournira gratuitement et jusqu’à fin 2019 des pailles biodégradables de substitution à la vingtaine d’entreprises qu’abrite ce morceau de Cyclades de 300 âmes en mer Egée.

Au Royaume-Uni, les pailles, mélangeurs de cocktail et Coton-Tige en plastique seront également interdits à la fin de l’année, tandis que gobelets et assiettes en plastique seront bannis en France au 1er janvier 2020.

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