Jean-Luc Mélenchon en campagne le 8 janvier 2017 à Tourcoing

Le tribun Mélenchon en campagne le 8 janvier 2017 à Tourcoing.

afp.com/François LO PRESTI

Le chef de file emblématique de la France insoumise n'en a pas fini avec la justice. Alors qu'une plainte en diffamation vient d'aboutir à une demande de levée de son immunité parlementaire, ses comptes de campagne relatifs à l'élection présidentielle de 2017 vont être passés à la moulinette de la police judiciaire. L'Express peut révéler qu'une enquête préliminaire a été ouverte par le parquet de Paris, compétent en matière de financement politique, contrairement au parquet national financier. Le procureur a saisi l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF), le service chargé des dossiers les plus sensibles du moment. Objectif: procéder à des vérifications sur une "éventuelle violation des prescriptions du code électoral relatives au financement des campagnes électorales", selon une source judiciaire.

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Ce sont les constatations de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) qui ont déclenché la machine judiciaire. Souvenez-vous : en janvier dernier, le contrôleur au sein de la commission chargé d'ausculter les comptes du candidat Mélenchon, un ancien inspecteur général de l'administration recruté pour l'occasion, claquait la porte avec fracas. Jean-Guy de Chalvron avait épluché pendant des mois quelque 5000 factures remises par Jean-Luc Mélenchon à la commission dans 52 cartons. Découvrant un certain de nombre de dépenses litigieuses, considérées comme ne relevant pas de la campagne électorale - pour un montant de près de 1,5 million sur un total de 10,7 millions d'euros -, il avait proposé à la CNCCFP qu'elles soient retirées du compte de campagne de manière, au moins, à ce qu'elles ne soient pas remboursées par l'Etat.

Saisine de la commission des comptes de campagne

Mais le montant de ces dépenses litigieuses avait été fortement réduit, contrairement à la volonté de l'intéressé, à lire sa lettre de démission adressée en novembre 2017 à François Logerot, le président de la CNCCFP, et publiée par Le Parisien. Au final, seuls 430 000 euros de factures avaient été retoqués, notamment parmi celles présentées par une association, L'Ere du peuple, qui salariait plusieurs personnes de l'entourage du candidat et refacturait salaires et prestations à l'association de financement de Jean-Luc Mélenchon (AFCP JLM 2017), avec de très grosses marges à la clé. Pour finir, le compte de campagne avait été validé par la Commission le 13 février 2018, les neuf membres de la commission n'étant nullement tenus par les avis des rapporteurs. Fin de l'histoire ? Non.

La publicité autour de la démission du rapporteur de Chalvron aurait, selon nos informations, conduit la CNCCFP à se décider d'effectuer un signalement le 16 mars 2018 au procureur de la République de Paris, parallèlement à sa décision de valider le compte de campagne. Sollicitée par L'Express, la Commission n'a pas souhaité apporter de commentaires. Ce n'est pas la première fois en tout cas que des juges et des policiers se penchent sur le financement d'une campagne présidentielle alors que le compte correspondant avait été validé par l'instance de contrôle. Nicolas Sarkozy a ainsi été mis en examen notamment pour "financement illégal de campagne électorale", concernant son élection à l'Elysée en 2007, après que des paiements de primes en liquide ont été découverts dans l'équipe de campagne.

Le leader de la France insoumise a réagi en fin de journée pour nier tout fait délictueux. "Je garantis que je n'ai jamais agit autrement qu'honnêtement et scrupuleusement dans la conduite financière de ma campagne", explique-t-il dans un communiqué. " Je garantis que je ne comprends pas comment la Commission nationale des comptes de campagne a pu à la fois valider mes comptes et faire un signalement.(...) Ni pourquoi elle l'a fait alors qu'elle a au contraire fait un communiqué pour défendre les rabais dont a bénéficié le candidat Macron. Un communiqué pour lui, un signalement judiciaire pour moi !", développe-t-il, expliquant que ce serait son seul commentaire sur l'affaire.

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