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14 organisations de jeunesse s'opposent à un service national universel obligatoire

Alors qu'un groupe de travail a recommandé la mise en place d'un service national d'un mois obligatoire pour tous les jeunes, 14 organisations de jeunesse mitraillent "les incohérences et les décalages" de cette proposition.

Rédaction JDD , Mis à jour le
Emmanuel Macron veut relancer l'idée de service national, sans revenir au service militaire d'avant 1997.
Emmanuel Macron veut relancer l'idée de service national, sans revenir au service militaire d'avant 1997. © Sipa

"S'engager, c'est surtout choisir. Faire le choix de s'engager, de donner du temps à une cause ou à un projet, c'est aussi faire le choix de se trouver et de se construire, en s'assumant en tant qu'individu et en tant que citoyen. Choisir l'engagement est tout aussi important, si ce n'est plus, que l'engagement lui-même. C'est ce choix qui donne tout son sens à l'expérience citoyenne qu'est l'engagement, car il matérialise le libre arbitre, la liberté d'action citoyenne et conduit au développement de l'individu et par conséquent à celui de la société. Nous, organisations de jeunes, sommes les exemples concrets de cette expérience d'engagement. Dans notre diversité, de l'école au monde du travail en passant par l'université, dans les grandes métropoles comme dans les communes rurales, notre dénominateur commun est cette volonté d'engagement au service de la construction d'une société plus juste et solidaire. Nous sommes des citoyens engagés, et nous le sommes parce que cette citoyenneté active s'est construite par nos choix.

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Il est de notre responsabilité de mettre en évidence les incohérences et les décalages de la proposition d'établir un service national universel obligatoire

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De par l'expérience quotidienne de leurs membres, les organisations de jeunes ont une expertise de l'engagement. Aussi, étant donné les conséquences pour la jeunesse qu'aurait un tel dispositif, il est de notre responsabilité de mettre en évidence les incohérences et les décalages de la proposition formulée par l'exécutif d'établir un service national universel (SNU) obligatoire.

Lire aussi : Service national universel. Macron veut consulter les jeunes

Ce projet souffre d'un premier décalage majeur entre d'un côté la volonté des jeunes qui, comme nous l'observons au quotidien, font le choix de s'engager de façon souple et diverse dans une recherche de sens comme d'épanouissement et, de l'autre, le cadre obligatoire, rigide et contraignant que le projet semble faire émerger. Rappelons que les principales formes d'engagement, militaires comme la garde nationale, ou civiles tels que le service civique et le bénévolat associatif, ne s'appuient pas sur un principe d'obligation. Au contraire, ils se caractérisent par leur flexibilité tout en s'inscrivant dans un cadre promouvant la diversité des formes d'engagement.

Le SNU, tel qu'il semble se dessiner, souffre d'un second décalage entre l'objectif affiché de mixité sociale et ses effets présagés. Il n'est pas question pour nous d'ignorer ou de minimiser les enjeux d'une plus grande mixité sociale en France. Cependant, il nous semble utopique voire dangereux de la faire reposer sur un tel dispositif.

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La France ne doit pas mettre les jeunes face à une dette, mais les encourager dans leurs contributions futures

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La mixité sociale ne se décrète pas, elle se construit en même temps que le citoyen en devenir, à l'école de la République. C'est au sein de celle-ci que tout peut être fait pour offrir à tous la possibilité de s'engager, sans distinction d'aucune sorte. Si la mixité sociale est une préoccupation majeure, ce ne doit pas être simplement un aveu d'échec de l'école publique et laïque : elle doit être prise en compte par toutes les politiques publiques. Ce décalage nous interpelle d'autant plus que, au regard des moyens financiers importants nécessaires à la mise en place d'une telle mesure, il serait regrettable que les objectifs ne soient pas atteints alors que de nombreuses initiatives portées par l'Éducation nationale et les associations offrent des solutions adaptées aux réalités. Mais il est à craindre, au vu des annonces récentes, que le dispositif réponde davantage à une logique démagogique qu'à celle de la coconstruction fondée sur l'expertise des acteurs.

La France ne doit pas mettre les jeunes face à une dette, mais les encourager dans leurs contributions futures. Nous refusons de penser un dispositif d'engagement pour la jeunesse comme un devoir, un service que les jeunes auraient à rendre à la nation dans le but d'obtenir un statut de "bon citoyen". À nos yeux, si un tel investissement doit être fait, il doit s'orienter vers l'application et le renforcement des politiques publiques à l'adresse des jeunes. Cet investissement pourrait par exemple être consacré à l'accompagnement des jeunes en difficulté, à la prévention des risques, au passage du code de la route, à des formations sur l'égalité femmes-hommes, sur les enjeux climatiques, sur la découverte d'autres cultures, etc.

La jeunesse est vécue de façon très différente selon que l'on est étudiant, jeune travailleur, en recherche d'emploi, parent, en situation de handicap, selon notre origine sociale, en territoire urbain ou en territoire rural. La présentation des enjeux et de la diversité des instances militaires de la République doit être enseignée au même titre que les instances civiles : par l'école publique et laïque, incubateur de savoir et de mixité.

Les politiques publiques de jeunesse doivent changer de logiciel. La jeunesse ne peut plus être tenue à l'écart des projets qui la concernent par des politiques paternalistes, soupçonneuses et systématiquement pensées dans la défiance. Pour cela, renforçons d'abord la confiance des jeunes envers une nation capable d'orienter sans imposer et de conseiller sans contraindre."

Correctif : Contrairement à ce qui est paru dans le Journal du dimanche et à ce qui était mentionné dans une précédente version de cet article, l'UDI Jeunes indique n'avoir jamais été sollicitée pour signer cette tribune et ne souhaite pas y être associée.

* Animafac, Coexister, Fédération des associations générales étudiantes (Fage), Jets d'encre, Les Jeunes Écologistes, Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC), La Mutuelle des étudiants (LMDE), MAG Jeunes LGBT, Mouvement rural de jeunesse chrétienne (MRJC), Promotion et défense des étudiants (PDE), Syndicat général des lycéens (SGL), Union nationale des étudiants de France (Unef), Union nationale lycéenne (UNL), Union nationale lycéenne – syndicale et démocratique (UNL-SD)

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