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CHU de Nice : un médecin écarté après avoir dénoncé des conditions déplorables

CHU de Nice : un médecin écarté après avoir dénoncé des conditions déplorables

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Locaux délabrés, patients entassés et chambres sans fenêtre, le CHU de Nice a installé son service de "réanimation médico-chirurgicale, transplantations d'organes et surveillance continue" dans des locaux prévus… pour les archives. Une situation dénoncée par un médecin qui a depuis été écarté.

Le tableau est surréaliste. Au sous-sol du site de L'Archet 2 du CHU de Nice se trouve le service de réanimation médico-chirurgicale, transplantations d'organes et surveillance continue. Depuis 22 ans, cette minuscule salle sans aucune fenêtre, initialement prévue pour abriter des archives, accueille des patients qui viennent de subir une opération chirurgicale, d'autres qui sortent du coma ou encore des femmes qui connaissent un accouchement difficile. Des cas sensibles qui nécessiteraient une attention toute particulière. Pourtant, tous sont entassés dans une salle délabrée, séparés par de simples paravents. Le docteur Pierre-Eric Danin, anesthésiste réanimateur appelé à prendre la tête du service, a haussé la voix pour dénoncer ces conditions déplorables. Son contrat n'a pas été renouvelé. Le personnel dénonce un "départ forcé".

"C'est un service horrible"

Nice-Matin qui rapporte cette situation ce lundi 4 juin, décrit des murs où la peinture tombe en lambeaux et un plafond qui prend l'eau chaque jour de pluie, jusqu'à dégouliner sur les patients. "C'est un service horrible. Un de mes proches y est décédé. Je suis allé le voir plusieurs fois et je n'avais qu'une envie : le sortir de là", confie anonymement au quotidien un professeur du CHU de Nice.

Le personnel décrit un "enfer pour les patients et pour l'équipe". Auprès du journal, une soignante raconte le sort d'une dame "consciente" qui n'a "pas vu la lumière du jour depuis trois mois". Face à son lit de fortune, "un patient qui perd la tête et hurle sans cesse". "Dans la même chambre, on a des gens porteurs d'une poche de colostomie [une poche de recueil de matières fécales], des porteurs de bactéries hautement résistantes, tout est mélangé", déplore-t-elle. "C'est particulièrement difficile quand on accueille des familles endeuillées qui viennent se recueillir sur le corps d'un fils, d'un père, et qu'un autre patient demande la chaise pot. La douleur d'un côté du paravent, l'odeur et les bruits de l'autre, c'est indécent", raconte un autre salarié.

La direction promet des travaux

Un médecin a décidé de parler pour alerter sur ces conditions de soins et de travail auprès de sa hiérarchie. Anesthésiste réanimateur, le docteur Pierre-Eric Danin devait prendre la tête du service. Mais après son coup de gueule, son contrat n'a pas été renouvelé. "J'ai un bel idéal pour l'hôpital public. Je ne pouvais pas me taire. On ne pouvait pas continuer à soigner des gens dans une cave ! Mais c'est plus facile de virer celui qui soulève le lièvre", regrette le praticien auprès de Nice-Matin.

Ce "départ forcé" a provoqué le mécontentement d'une centaine de soignants de l'établissement. Dans une lettre commune, ils s'insurgent de "l'éviction d'un médecin dont le seul tort aura été d'alerter activement sur les mauvaises conditions de travail et de soins". Et de dénoncer une "décision arbitraire, injuste et intolérable".

En retour, le directeur de l'hôpital, Charles Guepratte, a reconnu que les locaux "ne sont plus adaptés" et propose des "travaux de réfection" en attendant le schéma immobilier du CHU de Nice 2018. "Ce que propose la direction, c'est de mettre une couche de peinture, de changer les paravents, c'est du cache-misère, rejette responsable syndical CGT Laurent Gleizes. Ce qu'on demande, c'est d'étudier une relocalisation en urgence du service. On travaille sur de l'humain, pas sur du boulon ! Ce service est un service de haut vol que l'on ne peut laisser en souffrance".

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne