Pourquoi ce procès est-il si important ?

Le procès de Beate Zschäpe, 43 ans, aura duré plus de cinq ans, et coûté 60 millions d’euros. Elle est la seule survivante du trio néo-nazi qui aurait commis 10 assassinats, 15 braquages et 3 attentats à l’explosif entre 1999 et 2011 en Allemagne.

Le groupe s’attaquait en particulier aux petits commerces comme les kebabs ou les cybercafés, et visait la communauté turque. Alors que la police perquisitionnait en 2011 le logement du groupe pour un braquage, elle découvrait par hasard l’existence de cette cellule terroriste. L’Allemagne, bouleversée et abasourdie, redécouvrait ainsi la violence d’extrême droite sur son territoire.

Ce procès n’a donc pas seulement pour mission de condamner Beate Zschäpe. Empreint d’une forte dimension politique et symbolique, il doit rejeter les accusations de racisme institutionnel dans un contexte de relations germano-turques déjà tendues, et rétablir l’état de droit dans une Allemagne où l’extrême-droite ne cesse de monter.

Pourquoi les renseignements sont-ils pointés du doigt ?

La police, avant de découvrir les preuves accablantes en 2011, n’avait jamais réellement considéré l’hypothèse d’une cellule terroriste d’extrême-droite.

Ignorant toute dimension politique, les forces de l’ordre, tout comme la société, avaient suspecté de simples règlements de compte au sein de la communauté turque. Preuve affligeante de ce phénomène, la presse allemande avait diffusé l’expression « Döner-Morde » les « meurtres Döner ».

Encore plus gênant : alors que la chancelière avait promis de faire toute la lumière sur cette affaire, de nombreuses zones d’ombre subsistent, notamment sur les liens entre les services de renseignement et le groupuscule néo-nazi.

Les « indics », infiltrés dans les mouvances d’extrême droite, prétendent n’avoir rien vu. Même l’« indic » Andreas Temme, pourtant présent sur une scène de crime. Aux renseignements généraux, des documents sensibles ont été broyés. Par la suite, le président des renseignements a été contraint de démissionner, mais rien n’a pu être entrepris devant la justice.

Quels arguments à la barre ?

Elle était faible, entraînée par ses deux camarades défunts. Elle ne savait pas. Elle n’apprenait les faits qu’après coup. Telle est la défense mise en place par Beate Zschäpe et ses deux nouveaux avocats, qui ont plaidé en mai dernier.

Pour le procureur en revanche, elle était parfaitement consciente de ses actes et doit être emprisonnée à perpétuité. C’est après ces deux réquisitoires que se sont exprimés, le mardi 5 juin, les 3 avocats initiaux de Beate Zschäpe, dont elle avait exigé sans succès de se séparer en 2015.

Obligés de la défendre contre sa volonté, ils ont encore une fois clamé son innocence et plaidé pour sa libération. Mais aussi nombreux soient-ils, les cinq avocats ne devraient pas réussir à convaincre les juges de la cour d’appel de Bavière, qui devraient trancher d’ici à la fin de la semaine.