Chronique. Il fallait y penser ! La Corée du Nord a des plages magnifiques. Idéalement situées, à proximité du marché chinois. Un potentiel d’enfer. « Vue imprenable » : imaginez seulement les copropriétés que l’on peut construire le long de ces plages ! « Vous pourriez avoir les meilleurs hôtels du monde… Pensez-y, en termes d’immobilier. »
C’est le président des Etats-Unis qui vous parle. L’espace d’un instant, emporté par son enthousiasme devant la presse à Singapour, le promoteur immobilier qu’il fut a repris le dessus. Heureux comme un enfant qui vient de lâcher les roulettes de son vélo, si fier d’avoir un exploit à présenter qu’il en a oublié d’insulter les journalistes, Donald Trump a raconté, mardi 12 juin, comment il avait vendu le deal à son nouvel ami, Kim Jong-un, quelques heures plus tôt. En lui montrant sur un iPad, pendant leurs entretiens, une vidéo de 4 minutes 12 secondes pour faire miroiter à quoi ressemblerait la Corée du Nord si elle renonçait à son arsenal nucléaire pour rejoindre le monde civilisé.
L’appartement témoin, en quelque sorte. Un monde de gratte-ciel et de grues, de voies ferrées, de technologies futuristes et de têtes de gondole débordant d’opulence. On n’est pas obligé de tout prendre : le modèle existe aussi avec moins d’options, a précisé M. Trump. « Un nouveau monde peut commencer aujourd’hui, conclut sur un ton prophétique la voix off de cette mini-production hollywoodienne, commandée par la Maison Blanche à « Destiny Pictures ». Faites partie de ce monde ! »
Le président Trump a aussi fait admirer au « Chairman Kim » son énorme limousine blindée, « The Beast », histoire de faire fantasmer les gardes du corps sprinteurs du dictateur nord-coréen.
Méthodes diamétralement opposées
Peut-être, après tout, Donald Trump a-t-il trouvé là les bons arguments pour convaincre le maître de Pyongyang de tenir ses promesses. En tout cas, « il a adoré », a assuré le président à propos de la vidéo. Qui sait ? Dans le nouveau monde trumpien, rien n’est plus comme avant. L’analyse diplomatique classique impose inévitablement un regard sceptique sur les chances de réussite d’un sommet aussi historique que spectaculaire, bouclé en un temps record et préparé à la va-vite. La déclaration finale signée par Donald Trump et Kim Jong-un n’est pas un accord mais une déclaration d’intention, qui pose un engagement de principe en vue de la dénucléarisation de la Corée du Nord, sans dicter ni calendrier, ni procédures de vérification, ni critères d’irréversibilité.
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