Utilisé massivement dans l’industrie électronique, le plastique noir contenant des substances toxiques se retrouve mélangé à d’autres plastiques lors du recyclage, utilisé pour des biens de consommation alimentaire ou des jouets.

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    Le plastiqueplastique est partout. Chaque année, les humains en produisent environ 400 millions de tonnes. Mais tous les plastiques ne sont pas équivalents. Selon leur usage, on leur ajoute parfois des additifs pour les colorer, les rendre résistants à la chaleurchaleur, plus solidessolides ou plus souples, etc. Certains résidus chimiques proviennent même du processus de polymérisationpolymérisation lui-même.

    Parmi tous ces plastiques, celui de couleurcouleur noire pose un problème majeur, met en avant une étude publiée dans la revue Environment International. Car ce plastique provient principalement de produits électroniques, qui contiennent de nombreux additifs chimiques : antimoineantimoine, cadmiumcadmium, chrome, mercuremercure, plombplomb, ou retardateurs de flammes. Or, ce plastique est mélangé à tous les autres lors du processus de recyclage et se retrouve donc dans une multitude d'objets, dont certains potentiellement en contact avec la bouche comme les emballages alimentaires, les ustensiles de cuisine ou les jouets.

    La moitié des objets en plastique noir contaminés

    15 % du plastique arrivant dans les centres de recyclage est du plastique noir, d'après Andrew Turner, qui a mené l'étude. Car outre ses qualités esthétiques, le plastique noir est plus facile à fabriquer à partir de matériaux recyclés, puisqu'on peut mélanger différentes couleurs, contrairement aux bouteilles transparentes par exemple, qui ne peuvent pas être fabriquées à partir de bouteilles rouges, vertes ou opaques.

    Image du site Futura Sciences
    Les objets en plastique noir contiennent de nombreuses traces de produits toxiques. © Andrew Turner, Environment International

    Après avoir analysé plus de 600 échantillons de plastique de différents objets noirs (pinces à cheveux, écouteur, tournevis, capuchons de feutre, mugs thermosthermos, clés USBUSB, boîtiers de CDCD, piques à cocktail...), le chercheur a détecté une présence plus ou moins élevée de substances toxiques dans ces objets. La moitié contient du bromebrome, un quart du plomb et de l'antimoine et 7 % de cadmium. Si les concentrations ne posent pas de véritable danger pour les produits électroniques, il n'en n'est pas de même pour ceux prévus pour un contact alimentaire.

    Le cercle vicieux de la contamination

    Mais pourquoi utilise-t-on ce plastique noir issu de déchets électroniques plutôt que de recycler celui provenant d'autres sources (emballages alimentaires, boîtiers de CD...) ? Tout simplement parce que celui-ci est jeté à la poubelle. La plupart des centres de tri utilisent la spectrométriespectrométrie infrarougeinfrarouge, incapable de détecter le noir de carbonecarbone, le pigment utilisé pour colorer le plastique noir. Les emballages de couleur noire sont donc systématiquement écartés et les fabricants sont obligés de se rabattre sur des vieux plastiques noirs déjà recyclés.

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    Le plastique noir utilisé dans les objets courants est lui-même issu d’autres plastiques recyclés et déjà contaminés. © Andrew Turner, Environment International

    Un cercle vicieux, puisque ces derniers ont déjà été fabriqués eux-mêmes à partir de déchets électroniques. Il contient jusqu'à 15 polymèrespolymères différents, issus de recyclages successifs. « On entretient ainsi une sorte d'économie circulaire de la pollution », observe Andrew Turner. Deux échantillons de plastique noir contenant des taux élevés de brome suffisent à contaminer 32 autres produits qui n'en contenaient pas du tout !

    Des trous dans la règlementation

    Plusieurs directives européennes ont pourtant imposé des restrictions sur les substances toxiques dans les produits électroniques. Une filière spécifique de recyclage a été mise en place en 2006 pour les déchets d'équipements électriques et électroniquesdéchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE). La directive 2011/65/UE du 8 juin 2011 (dite directive RoHS II) renforce les exigences de la réglementation sur les limitations en substances dangereuses.

    Contacté, l'organisme Éco-systèmes chargé de la filière du recyclage des DEEE en France nous a confirmé séparer le plastique issu de ces appareils des autres déchets plastiques. Néanmoins, pour les produits importés, « nous ne pouvons garantir qu'ils ne contiennent pas de plastique bromé recyclé car nous ne maîtrisons que les processus de recyclage sur notre territoire ». Autrement dit, il est parfaitement possible que du plastique noir contaminé se retrouve dans nos barquettes alimentaires via le recyclage comme le montre l'étude d'Andrew Turner. Et ce d'autant plus que des failles existent dans la législation : l'importation de déchets électroniques provenant d'Asie, en principe interdite, est contournée en qualifiant les déchets de « produits réparables » ou « produits d'occasion ».

    Face à ce constat, plusieurs entreprises ont déjà pris les devants. En Angleterre, les distributeurs Iceland et Waitrose ont annoncé la suppression du plastique noir de tous leurs emballages alimentaires. L'association Waste and Resources Action Programme (WRAP) plaide, elle, pour l'utilisation de pigments noirs détectables aux infrarouges afin de pouvoir recycler le plastique noir.