Zinédine Zidane, le milieu offensif de l'équipe de France 1998, brandisssant le trophée de la Coupe du monde, au Stade de France, le 12 juillet 2018

Après la victoire de la France, le nombre de bébés prénommés Zinedine et Bixente a explosé, mais pas celui des Marcel.

afp.com/DANIEL GARCIA

Une ribambelle de petits Kylian verra-t-elle le jour dans les maternités françaises en 2019 ? Peut-être. A condition, bien sûr, que l'équipe de France remporte le Mondial en Russie et que Mbappé brille pendant la compétition. Car l'époque le veut ainsi : le foot, sport le plus populaire de l'Hexagone, a une influence sur les appellations des nouveau-nés.

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La preuve par la... Coupe du monde 1998. Pendant la décennie qui l'a précédée, l'Insee, le très sérieux institut de la statistique et des études économiques, avait recensé en tout et pour tout 146 bébés prénommés Zinedine. Un chiffre passé à 1074, soit une hausse de... 636 %, pendant les dix années suivantes.

© / L'Express

L'engouement pour le génial numéro 10 avait d'ailleurs commencé dès la première apparition du magicien sous le maillot tricolore, en 1994. Alors que son prénom n'avait été donné qu'à 7 enfants en 1993, on en comptait 18 l'année suivante, puis 20 en 1995, 37 en 1996, 47 en 1997 et... 184 en 1998. Et encore : pour être complet, il faut aussi signaler que "Zidane" - qui est aussi un prénom - a connu la même vogue, avec une envolée de 275 % dans la décennie qui a suivi la victoire du 12 juillet 1998.

L'effet Coupe du monde 98 sur le prénom Zinedine

L'effet Coupe du monde 98 sur le prénom Zinedine

© / MF

Zizou n'est d'ailleurs pas le seul à avoir marqué les esprits. Lilian Thuram, l'arrière droit de l'équipe de France, auteur d'un retentissant doublé en demi-finale contre la Croatie (2-1), a lui aussi suscité un effet de mode chez les jeunes parents. On comptabilisait 218 petits Lilian par an en France entre 1988 et 1997 ? On en a recensé... 882 en 1998 et même 1222 en 1999 ! Une augmentation moyenne d'environ 400 % d'une décennie à l'autre. Spectaculaire.

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Phénomène comparable avec Bixente Lizarazu. Tout en restant à niveau modeste, les porteurs de ce prénom ont tout de même crû de 275% entre les deux décennies, avec un effet plus marqué dans son département des Pyrénées-Atlantiques. Une belle revanche pour le natif de Saint-Jean-de-Luz, qui avait dû se battre jusqu'en 1996 contre l'administration pour faire accepter la forme basquaise de son état-civil. Jusqu'alors, l'Etat refusait de l'appeler autrement que " Vincent".

Bixente Lizarazu à la lutte avec le Brésilien Cafu lors de la finale de la Coupe du monde 1998, au Stade de France, le 12 juillet

Bixente Lizarazu à la lutte avec le Brésilien Cafu lors de la finale de la Coupe du monde 1998, au Stade de France, le 12 juillet.

© / afp.com/DANIEL GARCIA

Pas d'effet Marcel

Mais attention : il ne suffit pas de jouer dans l'équipe qui remporte la coupe du Monde pour que du jour au lendemain des milliers de bambins portent votre prénom. Deux autres conditions au moins doivent être réunies. D'abord, sortir du lot. De "simples" lieutenants, comme Vincent Candela, Bernard Diomède, Christian Karembeu ou Frank Leboeuf n'ont provoqué aucun emballement statistique.

Il faut ensuite ne pas porter un prénom perçu comme ringard pour l'époque. "Les tendances de long terme sont trop fortes pour redonner vie à des dénominations déjà perçues comme dépassées" note Baptiste Coulmont, auteur d'une étonnante Sociologie des prénoms [éd. La Découverte] et d'un blog passionnant sur le sujet.

Un exemple ? "Malgré le talent de Desailly, on n'a observé aucun engouement pour les "Marcel" à la suite de la compétition. Et si, aujourd'hui, ce prénom connaît un net regain d'intérêt, c'est uniquement parce qu'il redevient tendance chez les 'bobos' depuis les années 2010."

Marcel Dessailly

Marcel Desailly, lors du match contre l'Arabie Saoudite, le 18 juin 1998 au Stade de France.

© / Pedro Ugarte/AFP

Même indifférence après le Mondial pour les Laurent (Blanc), Fabien (Barthez), Emmanuel (Petit) ou Youri (Djorkaeff), dont le déclin n'a pas été enrayé par le triomphe du 11 tricolore. Autant dire que si Zidane s'était appelé Maurice, il n'y aurait pas eu d'effet Maurice, pas plus d'ailleurs qu'il n'y avait eu d'effet "Michel" (Platini) dans les années 1980.

Les conséquences de la Coupe du monde 1998 sur le choix des parents ne doit donc pas être surestimé. "L'impact est réel, mais temporaire et limité en nombre. Il n'a pas modifié significativement la hiérarchie des prénoms les plus donnés", résume Baptiste Coulmont. Comme quoi, même quand on s'appelle Zidane, on ne marque pas à tous les coups.

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