Rendre la finance aux citoyens et la remettre au service de l’intérêt général. Dans un nouveau rapport, publié ce jeudi 21 juin, le Secours Catholique-Caritas fait quatorze propositions. Parmi les mesures envisagées, la séparation bancaire entre d’un côté l’activité de détail et de l’autre celle de marché. Autre piste, la mise en place d’une taxe sur les transactions financières, d’un prix carbone suffisamment élevé et d’une instance de supervision mondiale.

"Les marchés financiers tels qu’ils fonctionnent actuellement génèrent des profits privés, mais sont finalement très peu au service de l’intérêt général. Cela renforce la pauvreté et les inégalités et détourne les flux financiers des enjeux d’intérêt général", constate le Secours Catholique/Caritas dans un rapport publié ce jeudi 21 juin. L’ONG y dresse une liste de mesures permettant de rendre la finance aux citoyens et de la remettre au service de l’intérêt général. Et elle lance pour l’occasion une plateforme en ligne de mobilisation citoyenne
Aujourd’hui, moins de 10 % des montants investis dans les produits dérivés sont en lien avec l’économie réelle. En cause, une dérégulation progressive depuis la signature des accords de Bretton Wood en 1973 et la mise en place du système de changes flottants. La finance a petit à petit pris une place démesurée dans l’économie au détriment des politiques publiques, aggravant ainsi les inégalités et la pauvreté, dénonce le Secours Catholique.
Impact sur la croissance économique
Dans 18 pays de l’OCDE, le niveau des inégalités a ainsi plus fortement augmenté. Dans le même temps, la croissance du crédit a été plus rapide que celle de la production et des salaires, entraînant des situations de surendettement de plus en plus fréquentes. Sans compter que la crise de 2008 qui a fragilisé l’ensemble de l’économie mondiale.
En accroissant les inégalités, la financiarisation de l’économie a été nuisible à l’activité économique. Comme l’indique une étude de l’OCDE, citée dans le rapport, "une aggravation des inégalités de trois points ferait perdre 0,35 point de croissance par an sur vingt-cinq ans, soit une perte cumulée de PIB de 8,5 % à terme." 
Séparation bancaire
Face à ce constat, le Secours catholique/Caritas fait quatorze propositions autour de quatre axes. Le premier consiste à stabiliser le secteur financier afin de réduire les risques de faillite et les activités spéculatives au profit de l’économie réelle. Pour cela, les auteurs appellent à une limitation de l’activité des banques aux services de détail (dépôts, crédits, moyens de paiement), ou au moins pour commencer à une séparation entre l’activité de détail et celle de marché. C’était une promesse du candidat Hollande en 2012… Mais le texte avait été vidé de sa substance avant d’arriver à l’Assemblée.
L’ONG estime par ailleurs que pour les fonds d’investissement, le ratio de levier devrait être maximum de 5, soit 20 % de fonds propres sur le total du bilan, contre 3 % aujourd’hui dans la plupart des banques. Elle remet aussi sur la table la TTF (taxe sur les transactions financières) vieux serpent de mer au niveau européen. Afin de canaliser l’épargne vers des activités utiles à la société, le ratio de solvabilité pourrait être calculé sur des critères écologiques sous la forme d’un bonus/malus.
La complexité n’est pas une fatalité
Les réserves obligataires pourraient également être mobilisées pour moduler la destination du crédit et un prix du carbone satisfaisant pourrait être mis en place (entre 40 et 80 dollars d’ici 2020). Enfin, le Secours catholique propose d’instaurer un organe de supervision bancaire au niveau mondial incluant les pays les moins avancés ainsi que l’utilisation des outils monétaires et fiscaux pour la relance économique en faveur de politiques publiques luttant contre les inégalités.
"Nos économies sont devenues illisibles en grande partie sous l’influence des marchés financiers, mais il ne tient qu’à nous de réformer les sources institutionnelles du ‘bruit’ qui les rend indéchiffrables", lance dans la postface Gaël Giraud, directeur de recherche au CNRS et économiste en chef de l’Agence française de développement (AFD).
Concepcion Alvarez, @conce1

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