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J’attends un enfant, et mon nombril se retrouve au centre du monde

OPINION. C’est fou ce que les comportements des autres peuvent changer lorsque vous êtes enceinte. Notre chroniqueuse est bien placée pour s’en rendre compte

None — © Loïc Venance/AFP
None — © Loïc Venance/AFP

Je ne veux pas donner l’impression de tout ramener à moi, mais on ne s’attend pas, lorsqu’on est enceinte pour la première fois, à ce que le monde autour de soi change à ce point, au fur et à mesure que son ventre s’arrondit. Le monde, oui. Parce qu’une nouvelle communauté, invisible jusque-là, vient vous tendre les bras, celle des mères, celle des pères, pour qui vous faites désormais partie de la bande. Ils ne vous parlaient pas, ils vous racontent désormais leurs plus intimes secrets. Ils sont contents, vous allez rejoindre leur mode de vie organisé, c’est comme une victoire. A chaque femme enceinte, la confirmation qu’ils ne se sont pas trompés, en choisissant cette vie-là plutôt qu’une autre.

Tous les granules

C’est l’occasion pour eux de replonger dans cette période qu’ils ont vite oubliée, captivés par l’envahissement du jeune bébé. Les mères vous donnent en vrac des noms de granules homéopathiques, de pédiatres, d’huiles pour le corps, de profs de yoga prénatal ou de prénoms d’enfants qu’elles n’ont pas utilisés. Vous notez. Les pères vous racontent, eux, l’accouchement de leur femme. A ce point-là de l’histoire, je n’ai pas encore vraiment compris pourquoi, pourtant cela m’est arrivé une bonne dizaine de fois. Les récits d’horreur, le médecin absent, le bébé coincé, les hurlements hystériques de leur douce moitié, à croire qu’ils en rajoutent. Leur manière sans doute d’être enceints et de vous raconter qu’ils ont vécu une aventure. On remarque qu’ils se sentent mieux après.

Une nouvelle alliée

Les hommes, justement, se scindent en deux. Grossièrement. Il y a ceux qui n’osaient pas venir vous parler – ou n’avaient simplement rien à vous dire – pour qui vous êtes une nouvelle alliée. Les jeunes papas vous saluent, sourire fatigué, vous parlent de sièges bébé à la machine à café. Il y a surtout ceux pour qui vous êtes devenue invisible. Ceux pour qui le rapport passait par un brin de séduction ne savent plus par quel bout vous aborder et préfèrent se réfugier vers d’autres filles dont le corps n’affiche pas ostensiblement des amours à un autre. Car vous vivez une période très animale. Dans la rondeur de votre ventre, il y a un signal «too late» qui renvoie les papillons vers d’autres fleurs à explorer.

Des robes à fraises, non merci

Vous ressentez une sorte d’apaisement chez les femmes aussi, qui ne vous considèrent plus comme une de leurs rivales potentielles. Avec cela, je n’ai même pas pu dire du mal des designers de vêtements de grossesse. Eux n’ont pas compris ceci: ce n’est pas parce que vous attendez un enfant que vous avez envie d’en être un, avec des pulls à marinière (qui accentuent votre ballon), des robes à fraises et à bonbons. Un nouveau monde, c’est toujours fascinant.

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