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Retailleau : "S'il ne parvient pas à se montrer aussi intelligent qu'il l'est, Wauquiez n'y arrivera pas"

PORTRAIT - L'ancien numéro deux de Villiers puis de Fillon, Bruno Retailleau, se pose en potentiel rassembleur de la droite et en possible concurrent de Laurent Wauquiez.

Anna Cabana , Mis à jour le
Bruno Retailleau dans son bureau au Sénat.
Bruno Retailleau dans son bureau au Sénat. © Gilles Bassignac/Divergence pour le JDD

Ne vous fiez ni à ses airs de moine sans âge ni à son nœud de cravate. Sauf à aller au bout de l'observation : alors que ledit nœud est impeccable, Bruno Retailleau l'ajuste et le réajuste. Il en va du nœud comme de ses ambitions : le patron du groupe Les Républicains au Sénat les affûte l'air de rien. Mais ça trompe de moins en moins de monde. "Il veut être président de la République", nous assure un conseiller d'Emmanuel Macron, relayé par un proche de Laurent Wauquiez : "Bruno a une stratégie concurrente à la nôtre. Il aimerait récupérer cette droite qui trouve Laurent sans conviction, qui a toujours jugé Nicolas Sarkozy vulgaire et qui estime que Valérie Pécresse est trop modérée."

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Retailleau se retrouve pas dans la ligne de Wauquiez, et encore moins dans celle de Pécresse

L'intéressé ne le dit pas ainsi, mais il est ravi de raconter qu'Annegret Kramp-Karrenbauer, la nouvelle secrétaire générale de la CDU, avait prévu de voir trois dirigeants de la droite française jeudi lors de sa venue à Paris – finalement annulée : Wauquiez, Pécresse et… lui. "Ce qu'elle cherche, c'est une expertise sur deux sujets : où va la droite et où va Emmanuel Macron", précise le sénateur de la Vendée. Il croise les jambes, glisse ses doigts entre sa chaussure et sa chaussette.

Lire aussi - Valérie Pécresse en "opération commando" face à Laurent Wauquiez

Il a rompu la gangue de l'éternel premier lieutenant – de Philippe de Villiers puis de François Fillon - pour exister désormais par et pour lui-même. Force républicaine, le micro-parti fondé par Fillon dont il a repris la présidence en novembre, est devenue sa boutique. Il a dégainé ses propositions sur l'Europe avant tout le monde, le 4 avril : il a plaidé contre "l'Europe des cercles" et le traité chers à Wauquiez - "deux impasses", assène Retailleau. Il organise mercredi une convention sur l'islam et la République. "C'est parce que la famille ne fait pas le travail que j'ai décidé d'apporter ma contribution. Je veux changer le logiciel de la droite. Je souhaite redonner une espérance aux Français de droite et du centre."

Du centre, il a dit. Un mot que Wauquiez n'emploie plus. "Oui, du centre, persiste le Vendéen. Je ne me résous pas à l'amputation de la droite. Ici, au Sénat, on sait faire tenir ensemble des tempéraments et des sensibilités différents." Ce n'est pas comme Wauquiez et Pécresse… "Entre eux, c'est répulsif", s'amuse Retailleau.

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Le problème de Wauquiez et de Pécresse, c'est qu'ils se définissent par rapport aux autres

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Ça lui laisse un espace, croit-il. Celui de rassembleur d'une droite fière de l'être. "Plus on a des convictions fortes et fermes, plus on a le devoir de les exprimer de façon ronde et douce. Porter un discours de radicalité permet tout au plus de rassembler la pointe de crayon de sa propre famille politique. Cela ne permet pas d'aller loin." Il veut donc aller loin ? "Les gens n'attendent pas de moi que je me tortille pour être dans les starting-blocks en vue de 2022." Peut-être. Mais a-t-il envie du combat suprême? "C'est beaucoup trop tôt." Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il n'a pas répondu non.

En petit comité, Wauquiez loue sa "pensée très construite"

Lorsque des élus déboussolés s'en viennent le voir pour lui demander s'il ne pourrait pas être leur homme, l'intello catho-conservateur réplique : "Ayez d'abord une ligne doctrinale." Il ne se retrouve pas dans celle de Wauquiez, et encore moins dans celle de Pécresse. Le premier est trop "social-étatiste" à ses yeux. "La droite qui s'empare de la question civilisationnelle croit bon de s'excuser en étant anti-libéral. Ce n'est pas parce que Macron est libéral que nous devons être étatistes!" La seconde parce qu'elle "abandonne les questions identitaires pour ne pas avoir l'air de dire la même chose que Marine Le Pen, alors même que l'angle mort du macronisme, c'est l'identité. Laurent l'a senti. Le problème de Wauquiez et de Pécresse, c'est qu'ils se définissent par rapport aux autres." Retailleau, lui, serait un pur esprit. Souvent, du reste, en petit comité, Wauquiez loue sa "pensée très construite."

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Il faudrait que Retailleau ait du charisme

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De là à le tenir pour un rival dont il faudrait se méfier… "­N'exagérons rien. Il faudrait qu'il ait du charisme", brocarde un ami du président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes. "S'il ne parvient pas à se montrer aussi intelligent qu'il l'est, Laurent n'y arrivera pas", réplique Retailleau. Avant de souligner : "Attention, c'est trop facile de mettre sur le dos de Wauquiez tous les problèmes de la droite. Valérie et moi n'avons pas du tout le même point de départ dans notre relation avec Laurent. Elle, elle part de l'opposition. Moi, j'ai fait le choix de ne pas me présenter à la présidence du parti." Elle aussi, lui rappelle-t-on. Il rit de toutes ses dents. Mais ça ne fait pas de bruit. Aucun. Est-ce pour cela qu'on ne l'entend pas venir

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