La curcumine, composé naturellement présent dans le curcuma, souvent présent dans ce mélange d'épices qui constitue le curry, est connue pour ses nombreux bénéfices sur la santé. La cristallographie aux rayons X a révélé un de ses mécanismes d’action, expliquant un effet anticancer.

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    La curcumine est l'ingrédient actif de Curcuma longa, le curcuma, l'une des épices souvent présente dans le curry. Utilisée dans la médecine traditionnelle depuis des siècles, la curcumine existe aussi sous forme de compléments alimentaires. Des milliers de publications scientifiques décrivent ses bénéfices dans différents domaines : cancer, troubles neurologiques, infections... Mais le mécanisme expliquant ces bienfaits reste peu clair.

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    Certains chercheurs ont émis l'hypothèse que la curcumine soit un inhibiteur du protéasome, un ensemble de protéines qui détruisent les protéines usagées ou inutiles de la cellule.

    Le saviez-vous ?

    Le protéasome 26S est un complexe protéique de 33 sous-unités qui catalyse 80 % de la dégradation des protéines eucaryotes. Des inhibiteurs du protéasome ont déjà été autorisés pour le traitement du cancer : bortézomib, ixazomib et carfilzomib.

    Dans un article paru dans Pnas, des chercheurs de l'université de Californie à San Diego, en collaboration avec des chercheurs chinois, décrivent comment la curcumine se lie à une enzymeenzyme appelée DYRK2, ce qui affecte le fonctionnement du protéasome. La cristallographiecristallographie révèle que la curcumine se lie fortement au site actifsite actif de DYRK2, grâce à des liaisons hydrogènesliaisons hydrogènes et hydrophobeshydrophobes.

    La curcumine inhibe la kinasekinase DYRK2, ce qui diminue la phosphorylationphosphorylation réalisée par le protéasome dans les cellules. Cette activité réduite du protéasome gêne la prolifération cellulaire, ce qui devrait réduire la progression du cancer. In vivoIn vivo, un traitement à la curcumine réduit de manière significative le volumevolume d'une tumeurtumeur greffée chez la souris.

    La curcumine se place dans la poche de liaison à l’ATP de DYRK2. Les atomes de curcumine sont présentés en jaune et rouge. © Banerjee et al, PNAS 2018

    La curcumine se place dans la poche de liaison à l’ATP de DYRK2. Les atomes de curcumine sont présentés en jaune et rouge. © Banerjee et al, PNAS 2018

    La fixation de la curcumine sur DYRK2 gêne la prolifération cellulaire

    Jack Dixon, professeur à l'université, a expliqué dans un communiqué : « Nos résultats révèlent un rôle inattendu de la curcumine dans l'inhibitioninhibition du complexe DYRK2-protéasome. » D'après lui, cette étude propose de nouvelles pistes pour traiter certains cancers, comme le cancer du seincancer du sein triple négatif et le myélome multiplemyélome multiple : « Notre objectif principal est de développer un composé chimique qui peut cibler DYRK2 chez les patients atteints de ces cancers. »

    Notre objectif principal est de développer un composé chimique qui peut cibler DYRK2

    De plus, la curcumine agit en synergiesynergie avec un inhibiteur du protéasome, le carfilzomib, ce qui favorise l'apoptoseapoptose - la mort cellulaire programmée - dans des cellules cancéreuses. En combinaison avec ce médicament, la curcumine induit une mort cellulaire plus élevée chez les cellules cancéreuses, tandis que les cellules non-cancéreuses sont moins affectées.

    La curcumine seule n'est pas forcément suffisante pour être bénéfique, comme l'explique Sourav Banerjee, principal auteur de cette recherche : « En général, la curcumine est expulsée du corps assez rapidement. Pour que la curcumine soit un médicament efficace, elle doit être modifiée pour entrer dans la circulation sanguine et rester suffisamment longtemps dans le corps pour cibler le cancer. En raison de divers inconvénients chimiques, la curcumine seule peut ne pas être suffisante pour inverser complètement le cancer chez les patients humains. »

    Ces travaux suggèrent donc de nouvelles approches pour lutter contre des cancers : cibler les protéines qui contrôlent le protéasome comme DYRK2, en combinaison avec des inhibiteurs de protéasome. D'autres travaux sont nécessaires pour l'appliquer à des patients.