Aux États-Unis, les Mooc participent à une transformation en profondeur de l'enseignement supérieur

Hélène Labriet-Gross Publié le
Aux États-Unis, les Mooc participent à une transformation en profondeur de l'enseignement supérieur
Les Mooc sont devenus une source de revenus non négligeable pour les universités. // ©  plainpicture/Cavan Images
REPÉRÉ DANS LA PRESSE AMÉRICAINE. Introduits en 2012, les Mooc permettent désormais à des millions d'étudiants de suivre à distance des cours dispensés gratuitement. Au-delà de la diffusion du savoir, les Mooc, en particulier ceux qui rassemblent plusieurs centaines de milliers d'inscrits, redéfinissent certains aspects fondamentaux de l'enseignement supérieur sur lesquels revient un article d'EdSurge.

Une nouvelle source de revenus pour les universités

Tout d'abord, les Mooc (Massive Open Online Courses) représentent une nouvelle source de revenus non négligeable pour les universités et les enseignants qui créent ces cours : en effet, si la majorité des inscrits prennent ces cours gratuitement, certains sont prêts à s'acquitter des frais de scolarité inhérents à l'obtention d'un diplôme ou d'une certification.

En général, Coursera et EdX partagent 50 % des revenus de chaque cours avec l'université ou l'organisme qui le dispense. Citant l'exemple d'un cours proposé par Coursera, l'article explique que les frais de scolarité acquittés par 46.000 des 500.000 inscrits ont rapporté près de 2,5 millions de dollars.

Les Mooc poussent à l'innovation

Cette nouvelle manne financière bénéficie non seulement aux universités, mais également aux enseignants qui créent les Mooc : ainsi, à l'université du Michigan, les revenus des Mooc sont divisés en trois, un tiers pour l'administration, un tiers pour le département dispensant le cours, et un tiers pour les professeurs qui l'enseignent.

EdSurge souligne que cette répartition est très motivante et incite à l'innovation, à tous niveaux. Ainsi, l'université du Michigan a investi une partie des revenus des Mooc dans la construction d'un nouveau portail étudiant, ainsi que dans l'accès gratuit à certains micro-diplômes pour ses élèves. Charles Severance, qui enseigne un Mooc sur le langage Python dans cette même université, a lancé sa propre start-up EdTech grâce à l'argent de ses cours en ligne.

Au sein même des cours, les Mooc favorisent aussi la réflexion sur les techniques d'enseignement. Treize des 20 cours les plus populaires sur Coursera ou EdX sont liés à l'informatique : ces apprentissages peuvent facilement se faire à distance, car les étudiants peuvent soumettre leurs lignes de code en ligne, et celles-ci sont instantanément corrigées. Quid des autres matières ?

L'un des Mooc les plus populaires est un cours de psychologie, "La science du bien-être", enseigné par l'université de Yale ; pour rendre la classe plus interactive, l'université a lancé une application, baptisée Rewi, qui aide les étudiants à prendre note de leurs habitudes quotidiennes afin de mieux cerner leur comportement. Pour d'autres cours, les universités n'hésitent pas à engager des professionnels de la production vidéo pour rendre l'enseignement à distance le plus captivant possible.

Vers une diversification de l'enseignement

EdSurge rappelle que, si les Mooc utilisent le prestige des grandes universités comme un outil marketing pour attirer un maximum d'étudiants, celles-ci n'ont plus le monopole du savoir : ainsi, Barbara Oakley, professeur à la Oakland University à Rochester dans le Michigan, enseigne, depuis un studio aménagé dans sa cave, "Apprendre à apprendre", un cours qui rassemble 1,8 million d'étudiants répartis dans plus de 200 pays.

Par ailleurs, certaines classes sont proposées, non par des universités, mais par des entreprises spécialisées. L'enseignant de Mooc le plus connu est Andrew Ng, cofondateur de Coursera, et dirigeant de Deeplearning.ai, qui propose plusieurs des cours les plus demandés sur la plate-forme.

Le rôle même de l'enseignant a évolué grâce aux Mooc : les universités embauchent des instructeurs, spécialisés dans la maintenance de ces cours en ligne. Ils remettent à jour les classes initialement créées par des professeurs réputés, répondent aux questions des élèves sur les forums de discussion, et préparent de nouvelles évaluations.

Ils ne touchent aucun revenu de ces cours en ligne, mais certains utilisent cette expérience lorsqu'ils enseignent face à des vraies classes. EdSurge cite l'exemple d'Ana Bell, qui s'occupe du Mooc sur le langage Python au MIT : sa participation aux cours en ligne l'aide à identifier les aspects les plus complexes du sujet, qu'elle peut approfondir lorsqu'elle enseigne le même cours à des étudiants du MIT.

En six ans, les Mooc ont apporté bien plus qu'une démocratisation du savoir : on assiste à une complète transformation des cours et de ceux qui les enseignent.

Hélène Labriet-Gross | Publié le